Depuis plusieurs semaines, la pandémie de la COVID-19 a plongé le Québec dans une situation d’urgence sanitaire. Des mesures spéciales ont été décrétées par le gouvernement afin de protéger la population, notamment les personnes vulnérables et celles qui sont les plus à risque en cette période pandémique.
Conscients de l’extrême gravité de la situation, les ordres professionnels de la Table des ordres du domaine de la santé mentale et des relations humaines se sont immédiatement engagés dans une collaboration particulièrement soutenue et appréciée avec le ministère de la Santé et des Services sociaux. La mise en place d’actions, tant par le Ministère que par les ordres individuellement, a eu pour effet de répondre à certains besoins de nos professionnels afin de leur permettre d’effectuer leur travail en dépit de ce nouveau contexte difficile […]. Beaucoup a été fait. Beaucoup reste à faire.
Depuis plusieurs semaines, nos membres sont auprès des enfants, des parents, des personnes âgées, des patients. […] Pendant qu’ils aident des gens, ils ont eux-mêmes besoin d’aide, de soutien psychologique. Chaque jour, nous recevons des messages de leur part, des appels au secours. Le cumul du stress et de l’anxiété mène à une détresse palpable qui augmente constamment. Nos membres se sentent seuls, voire abandonnés. Qui plus est, alors qu’il manque plus de 11 000 personnes dans le réseau de santé et services sociaux, l’épuisement est un autre facteur qui aggrave la condition psychologique de celles et ceux qui sont encore en poste.
La crise perdure et rien ne permet d’entrevoir sa fin dans un avenir proche, d’autant qu’une deuxième vague de la pandémie est anticipée. Notre mandat est d’assurer la protection du public. Cette protection passe sans contredit par la stabilité émotionnelle des professionnels qui prodiguent des soins et des services à la population dans plusieurs milieux différents.
Nous devons vous signaler que nous sommes inquiets pour la santé mentale, non seulement de nos membres, mais aussi pour la santé psychologique de l’ensemble du personnel qui œuvre dans le réseau.
Monsieur le premier ministre et madame la ministre, vous reconnaissez la détresse des Québécoises et des Québécois. Votre annonce de financement pour rehausser l’accès aux services psychosociaux et aux servies en santé mentale pour la population en est un exemple probant et nous tenons à saluer cette initiative gouvernementale.
Comme vous l’avez vous-mêmes répété, la santé mentale est une priorité dans la crise que vivent de plus en plus les personnes mises à contribution dans la lutte pour contrer la pandémie. […] Les enjeux de santé mentale requièrent du dépistage et des interventions précoces pour lesquels nos membres sont prêts à intervenir.
Or, dans un souci de protection du public, et considérant que le plan d’action sur les services psychosociaux et de santé mentale ne précise pas clairement les modalités pour soutenir les intervenants, nous vous demandons une reconnaissance particulière de leur détresse, de l’usure induite par ce contexte pour le personnel du réseau qui est en première ligne, et ce, par la mise sur pied de services de soutien psychologique de proximité. Les programmes d’aide aux employés répondent à certains besoins et les services du 811 sont utiles. Cependant, la situation exceptionnelle actuelle commande davantage de mesures d’aide tout près et sur leurs lieux de travail du personnel. Ces services de soutien à la santé mentale doivent être significatifs dans le quotidien des professionnels qui doivent recevoir et ressentir le message qu’on s’occupe également d’eux.
Nous reconnaissons les efforts et les initiatives que votre gouvernement a déjà mis en place afin d’aider le personnel du réseau […]. Toutefois, nous avons des échos du terrain à savoir qu’il y a encore beaucoup de besoins à combler, et que le lien se fait difficilement entre les offres de soutien et l’utilisation de ces ressources sur le terrain qui sont à géométrie variable dans les établissements.
Comme ordres professionnels du domaine de la santé mentale et des relations humaines, nous vous offrons de collaborer activement, avec vos équipes, à la recherche de solutions et de moyens pour soutenir celles et ceux qui sont au front dans le contexte qui prévaut. Le temps presse; il faut développer des initiatives concrètes et les mettre en place rapidement, avant qu’il ne soit trop tard.
Nous suggérons la création, par votre Ministère, d’un comité de vigie afin de recenser les meilleures pratiques qui se déploient sur le terrain et de partager les initiatives probantes dans le milieu. En outre, nous proposons que des «groupes d’urgence mobiles» soient désignés localement, selon les territoires, pour intervenir là où les besoins sont les plus criants.
Cette semaine est dédiée à la santé mentale ; il faut agir rapidement pour contrer ce mal. Vous pouvez compter sur notre entière collaboration; il ne manque plus que votre signal.
Mauril Gaudreault et 10 autres signataires de la santé mentale et des relations humaines
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