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Élus sans opposition: peut-on parler de confiance des citoyens?

Ce sont 572 maires qui ont été élus sans opposition aux élections municipales de 2021, ce qui représente plus de la moitié des postes à pourvoir. Pour les électeurs, l’impossibilité de pouvoir exprimer un véritable choix diminue le débat politique, et par conséquent affecte la qualité de la démocratie. 

«Il y a peut-être une part de confiance des citoyens, mais elle serait d’autant plus indubitable s’il y avait une compétition», lance d’emblée la professeure au Département de science politique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Caroline Patsias

La course électorale permet de montrer un point de vue de gouvernance différent et de contredire les idées d’un adversaire ou de l’élu sortant. Si un seul candidat se présente, cela affaiblit le débat politique. «Lors des élections, les élus doivent rendre des comptes. Ils sont jugés sur ce qu’ils ont fait. S’il n’y a personne dans l’opposition, qui va contester leur mandat et soulever leurs erreurs?», se demande Mme Patsias.  

La professeure indique qu’un élu sortant a souvent l’avantage dans la course électorale. D’abord parce qu’on le connaît, mais aussi puisqu’il est «enraciné» dans la communauté, c’est-à-dire qu’il possède un large réseau social. Dans le scénario où un maire ne se représente pas, cela peut susciter davantage de candidatures puisque cela augmente les chances d’être élu. 

Toutefois, l’avantage de l’élu sortant serait actuellement moindre, rapporte l’experte en politique municipale. Mme Patsias indique que l’on est dans une période marquée par le «dégagisme», c’est-à-dire qu’il y a une méfiance à l’égard des institutions, un rejet de la classe politique au pouvoir. «Ce n’est pas juste au Québec. Dans l’ensemble des démocraties occidentales, on remarque la montée du dégagisme. On se dit qu’un mandat, ça suffit, après on veut une nouvelle tête», précise-t-elle.  

Phénomène rural

Les maires élus sans opposition sont plus nombreux dans les petites villes et villages. Mme Patsias relate que dans ces milieux, bien souvent tout le monde se connaît. «Dans des communautés tissées serrées, un citoyen qui se présente en politique peut avoir peur d’être vu comme une personne conflictuelle qui veut diviser la communauté», indique-t-elle. 

Elle ajoute que les grandes villes ont plus d’habitants, ce qui augmente le potentiel de candidatures. De plus, les grands centres urbains ont des partis politiques, lesquels ont notamment comme rôle de susciter des candidatures. 

Tout de même, cette année, 10 des 50 plus grandes villes du Québec ont déjà un maire ou une mairesse élue, faute d’adversaire. C’est le cas notamment à Vaudreuil-Dorion pour le maire Guy Pilon, qui est par ailleurs élu depuis 2005. À Dollars-Des Ormeaux, ville liée de Montréal, le candidat Alex Bottausci a été réélu.

Être élu sans opposition ne veut pas dire forcément qu’il y a un haut degré de confiance. Il peut y avoir un désintérêt dans le système politique.

Caroline Patsias

Taux de participation 

Les élections au palier municipal sont les plus boudées par les citoyens. Au Québec, environ 45% des électeurs inscrits exercent leur droit de vote. Ce taux s’élevait à 42,5% pour les élections municipales de 2017 à Montréal. 

Le faible taux de participation reflète le défi d’avoir une relève en politique municipale, explique Caroline Patsias. Selon elle, motiver de nouvelles candidatures passe par la formation. Les partis politiques font déjà de la formation, par exemple pour apprendre à bien parler en public et savoir comment mener une campagne électorale. Or, les petites villes ont rarement des partis politiques avec un encadrement. 

«Dans les petites localités, les rétributions sont extrêmement minimales pour un engagement qui peut être très prenant», ajoute l’experte. Les salaires d’élus des plus petites villes devraient être bonifiés afin d’encourager la relève.

La politique municipale touche de près les citoyens. «C’est le palier politique où les décisions vont avoir un impact immédiat sur le quotidien des gens», explique Mme Patsias. Selon elle, le municipal peut amener des changements importants plus rapidement qu’au provincial ou au fédéral. Par exemple, par rapport à la transition écologique, un virage vert peut commencer «dès demain». 

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