Des femmes monoparentales peinent à trouver un logement à Montréal et se disent victimes de discrimination dans un contexte de crise du logement. À plusieurs reprises, elles ont été confrontées à des refus sans motifs justifiés lors de visites d’appartements à LaSalle et à Lachine.
«Au moins quatre propriétaires m’ont dit de vive voix qu’ils ne voulaient pas d’enfant dans leur appartement», raconte Mélanie Bonder, mère monoparentale d’une fille de 10 ans.
La Charte des droits et libertés de la personne du Québec interdit pourtant strictement de discriminer une personne en fonction de son état civil.
Mélanie est obligée de quitter son appartement dans quelques semaines. Après avoir visité près de 60 appartements à LaSalle et à Lachine, elle ne trouve rien.
Dans un contexte de crise du logement, entre augmentation des loyers et forte concurrence sur le marché, les propriétaires se permettent des comportements de plus en plus discriminatoires.
Un jour, un propriétaire m’a demandé combien de plus j’étais prête à payer que les autres candidats.
Mélanie Bonder
Elle mentionne avoir pourtant de bonnes références, une enquête de crédit favorable et n’avoir jamais manqué de payer son loyer à temps.
Désespérée, Mélanie exprime son impuissance face aux critères de certains locataires. «On n’est jamais à la maison avec ma fille, ce n’est pas comme si ma fille faisait du bruit, elle passe sa vie à dessiner dans le calme», exprime-t-elle.
Une discrimination présente dès le début
Certaines annonces en ligne peuvent être ouvertement discriminatoires, mais c’est souvent lors de l’entrevue de présélection que des propriétaires se permettent de poser certaines questions qui vont leur permettre de filtrer les futurs locataires.
«C’est souvent à cette étape que les personnes qui ont des enfants ou qui ont un nom qui n’est pas à connotation québécoise se font refuser la location d’un logement pour des motifs discriminatoires», selon l’enquête discriminatoire de 2021 du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ).
On m’a souvent demandé: est-ce que vous avez des enfants? Je dis toujours la vérité, je dis que j’ai une fille puis souvent un malaise s’installe.
Mélanie Bonder
Mélanie est loin d’être la seule dans cette situation difficile. Une mère de six enfants a bien voulu témoigner, mais dans l’anonymat.
«Un jour, on m’a carrément dit: vous n’allez jamais trouver un appartement avec tous vos enfants!», lance une mère de famille.
Résidente de LaSalle, cette maman cherche à quitter le domicile familial à la suite de sa séparation avec son mari, avec qui elle vit toujours. Elle a contacté plusieurs courtiers immobiliers qui la refusaient dès le premier appel.
Manque de plaintes enregistrées, le système peine à avancer
«Peu de chiffres sont recensés, car les gens ne portent pas plainte ou ne savent pas que ces discriminations sont illégales», explique la porte-parole du RCLALQ, Marjolaine Deneault.
Les plaintes reçues par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) ne refléteraient pas la réalité sur le terrain.
La discrimination contre les enfants n’est qu’une petite partie du problème; des personnes peuvent être confrontées à de la discrimination en fonction de leur origine, couleur de peau, genre, orientation sexuelle, situation de handicap, situation d’emploi ou pour plein d’autres raisons encore, selon l’enquête discriminatoire faite par le RCLALQ.
Le RCLALQ recommande de porter plainte auprès de la CDPDJ en cas de discrimination.