Pour mieux comprendre l’enjeu de la fusion du poste de quartier (PDQ) 45 de Rivière-des-Prairies avec le PDQ de Pointe-aux-Trembles, l’Informateur a retracé les grandes étapes de sa création.
Avant le PDQ 45
Au milieu des années 1990, le chef du Service de police de la communauté urbaine de Montréal (SPCUM), Jacques Duchesneau, a entrepris de revoir la structure des postes de police et de créer plusieurs postes de quartier. L’objectif était alors de travailler sur la prévention, la satisfaction des résidents et le partenariat avec la population.
L’initiative a été mise de l’avant en 1997 avec la création des 23 premiers PDQ dans l’ouest de la ville. Puis, 26 PDQ supplémentaires se sont ajoutés dans l’Est.
Avant cette réforme, le territoire du bout de l’île était desservi par le poste 55, situé sur la rue Sherbrooke, à Pointe-aux-Trembles. La pression populaire avait alors forcé le SPCUM à créer le 55-A, dès 1997. Ce poste de police satellite était situé sur l’avenue André-Ampère à Rivière-des-Prairies.
« Il y avait un fort sentiment d’insécurité. La population avait peur des jeunes et les parents voulaient envoyer leurs enfants dans d’autres quartiers », se rappelle Pierreson Vaval, d’Équipe RDP, un organisme qui lutte contre l’adhésion des jeunes aux gangs de rue.
Guerre de territoire
À l’époque, le clan des Rouges n’hésitait pas à montrer ses couleurs dans la rue et aussi sur les murs. Le quartier était alors connu comme étant le plus graffité de Montréal.
« Les gangs se faisaient un devoir d’être visibles pour lancer un avertissement et créer un climat de terreur parmi leurs pairs. La population aussi percevait ce climat et ça avait un impact négatif. Rivière-des-Prairies avait mauvaise réputation », estime M. Vaval.
Après la création du minuscule poste 55-A qui n’abritait qu’un policier à la fois, des membres de gangs de rue se sont même présentés pour affirmer leur souveraineté sur le territoire, prévenant les policiers de s’en éloigner.
C’est d’ailleurs dans un microposte semblable qu’en 1995, l’agente Odette Pinard avait été assassinée dans Cartierville, un autre quartier aux prises avec des gangs de rues.
Les policiers ont aussi reçu un accueil corsé sur le terrain où certains agents se font littéralement encerclés par des sympathisants des gangs qui les intimident et des objets sont lancés dans les vitres des autopatrouilles.
Il faut dire que des résidents étaient souvent témoins de crimes : tentatives de meurtre dans des lieux publics, bagarres, vente et consommation de drogues en public.
Les jeunes criminels faisaient aussi des victimes parmi la population en commettant notamment des vols dans les commerces, des violations de domicile, des agressions armées et des vols sur des chauffeurs de taxi et des livreurs.
Un véritable poste de quartier
En 1998, le PDQ 45 a finalement été inauguré sous sa forme actuelle.
« Avec le CLSC, le PDQ est l’une des premières institutions à avoir été implanté à Rivière-des-Prairies. C’est en quelque sorte ce qui lui a confirmé le statut de quartier à part entière de Montréal », croit M. Vaval.
Dès le début, le commandant et son équipe ont mis en place une approche de police de proximité. Ils ont développé plusieurs initiatives pour démobiliser les gangs et éviter le recrutement. C’est à cette époque qu’Équipe RDP a vu le jour en collaboration avec le PDQ dont un membre siège toujours sur son conseil d’administration.
« Les policiers ont décidé d’aller plus loin en s’engageant dans différentes tables de concertation et sur des conseils d’administration d’organismes communautaires pour être capables de les influencer et de favoriser un climat sain, raconte M. Vaval. Ils avaient la vision que si les citoyens se sentaient en sécurité, ce serait bon pour le développement du quartier. »
Alors qu’au milieu des années 2000, des quartiers du nord-est de Montréal traversent une crise où les gangs de rues tentent d’imposer leurs lois, le PDQ 45 a attaqué le problème à la base.
Selon des sources policières, il aura fallu une dizaine d’années de travail communautaire avant de récolter le fruit de ces efforts.
« Avant, les gangs de rues étaient le plan B des jeunes en difficulté. Maintenant qu’il y a plusieurs ressources disponibles, c’est devenu une option beaucoup moins attrayante. Notre principal enjeu maintenant est d’aider les jeunes qui ont évolué dans le crime », conclut M. Vaval.