Monde

Qu’est-ce que l’arrivée de Trump va changer?

Politique étrangère

L’avis d’Ivan Eland, Directeur du Center on Peace & Liberty de l’Independent Institute (États-Unis)

Russie

«Trump – appuyé par son conseiller à la sécurité nationale, le lieutenant général Mike Flynn, et le secrétaire d’État, Rex Tillerson – essaiera vraisemblablement d’améliorer les relations avec la Russie. Les deux derniers présidents ont tenté de faire la même chose, mais leurs efforts ont échoué, principalement en raison du caractère expansionniste des intérêts des États-Unis en Europe et au Proche-Orient. Toutefois, l’essor de la Chine pourrait entraîner une convergence d’intérêts, ce qui améliorerait automatiquement les relations russo-américaines. Enfin, les deux pays ont un autre intérêt commun: la lutte contre le terrorisme islamiste.»

Chine

«Étant donné les accusations que Trump a faites à la Chine durant la campagne présidentielle – manipulation du yuan, pratiques commerciales déloyales et comportement agressif en mer de Chine méridionale –, les relations sino-américaines pourraient bien entrer dans une période de grande instabilité. Le relèvement des tarifs douaniers par les États-Unis pourrait en outre provoquer une guerre commerciale. Il y aura peut-être aussi une recrudescence des tensions entre les forces navales des deux pays dans les mers de Chine orientale et méridionale.»

Iran

«En dépit des mots très durs utilisés par Trump contre l’accord sur le nucléaire iranien, celui-ci devrait tenir. La raison en est simple: les autres signataires de l’entente n’imposeraient pas de nouvelles sanctions contre l’Iran si les États-Unis se retiraient de l’accord. En d’autres termes, un tel retrait ne ferait que causer du tort à des entreprises américaines. L’Iran pourrait quand même relancer son programme nucléaire et commercer avec le reste du monde.»

Syrie

Le point de vue d’Ivan Katchanovski, Politologue de l’Université d’Ottawa (Canada)

«Durant la campagne présidentielle américaine, Donald Trump a déclaré qu’il préférait se concentrer sur la lutte menée contre État islamique en Syrie et en Irak. Il considère le terrorisme islamique comme étant bien plus dangereux pour les États-Unis que la Russie, et il a même évoqué la possibilité de coopérer militairement avec la Russie en Syrie. Il reste cependant à voir s’il y parviendra, et comment il s’y prendra. Une telle politique serait susceptible de ramener la paix entre le gouvernement syrien et les factions rebelles les plus modérées de l’opposition.»

Cuba

L’avis de Phillip Escoriaza, Professeur de relations internationales à l’université inter-américaine (Porto Rico)

«Cuba est une inconnue, parce que les changements qui ont eu lieu dans la politique américaine à l’égard de ce pays ont été décidés directement par le président. L’embargo instauré par les États-Unis contre Cuba demeure en vigueur. Ce qui a changé, c’est que sur le plan gouvernemental, Barack Obama a effectué un rapprochement en rouvrant l’ambassade américaine sur l’île et en permettant à Cuba d’ouvrir la sienne aux États-Unis. Il faut maintenant voir quelle sera la tolérance du Parti républicain à une telle politique. Développer de nouveaux marchés et créer des possibilités commerciales pour les entreprises américaines – possibilités qui entraîneraient la création d’emplois – ont été deux des principaux éléments de la campagne électorale de Donald Trump. À cet égard, la possibilité que des entreprises américaines puissent faire de lucratives affaires à Cuba aura évidemment un effet modérateur sur l’administration du président élu.»

Déportations

L’avis d’Alejandro Pedraza, Professeur au centre de relations internationales de l’université nationale autonome du Mexique

«Trump a clairement affirmé qu’il allait déporter les immigrants ayant un casier judiciaire, mais on ne recense pas beaucoup d’immigrants illégaux dans les prisons. Il serait très problématique, du point de vue des droits humains, que des gens soient regroupés dans des camps de concentration avant d’être déportés. On a peine à imaginer de telles violations dans un pays démocratique comme les États-Unis. Selon toute vraisemblance, le nombre de déportations devrait être sensiblement le même sous l’administration Trump que sous l’administration Obama.»

Racisme aux États-Unis

Le point de vue de Joe Feagin, Professeur de sociologie à l’université A&M du Texas

«Les données révèlent que Trump opère en dehors du cadre raciste blanc, dont de nombreux aspects sont partagés par la majorité blanche américaine. Les cas de racisme pourraient cependant augmenter aux États-Unis. Si Trump ne demande pas fermement que cessent les crimes haineux, ceux-ci risquent de demeurer aux mêmes niveaux très élevés où ils se trouvent depuis son élection.»

Obamacare

Le point de vue d’Alfonso Aguilar, Directeur du Latino Partnership de l’American Principles Project, basé à Washington, D.C.

«On pourrait croire que les républicains n’ont pas de plan au sujet de l’Obamacare, mais ce n’est pas vrai. Le problème, c’est qu’il existe plusieurs plans et qu’il n’y a pas de consensus à propos de celui qu’il faudrait adopter. De manière générale, on peut dire qu’il y a deux groupes chez les républicains. Le premier propose de révoquer et de remplacer immédiatement l’Obamacare en éliminant la loi qui le permet et en en votant une nouvelle. Le deuxième a une approche plus modérée. Ceux qui en font partie affirment qu’il faut éviter toute approche brutale, parce que cela risquerait d’entraîner un effondrement du système national de santé. Donald Trump a déclaré qu’il conserverait deux choses. La première est que toute personne souffrant déjà d’une maladie ne pourrait être privée d’assurance maladie. La deuxième, que toute personne pourrait être couverte par le régime d’assurance maladie de ses parents jusqu’à 26  ans.»

Mur à la frontière mexicaine

L’avis de Alejandro Pedraza, Professeur au centre de relations internationales de l’université nationale autonome du Mexique

«Donald Trump ne pourra pas faire construire ce mur. Imaginez la logistique! Il devrait débourser des sommes colossales pour payer les propriétaires des terrains où le mur passerait. Et puis, un pareil chantier prendrait plus de huit ans. Au bout du compte, le Mexique ne paierait pas. De toute façon, il n’existe aucun mécanisme international qui pourrait l’y obliger.»

Possible destitution

Le point de vue de Sherry Bebitch Jeffe, Analyste politique et professeur à l’université de la Californie du Sud (États-Unis)

«Spéculer à propos d’une destitution, c’est bâtir des théories à propos de choses qui ne se sont pas encore produites. Il est beaucoup trop tôt pour évoquer un tel jugement politique, qui porterait par ailleurs sur des actes qui n’ont pas été posés pendant un mandat présidentiel. Nous disposons de renseignements sur les entreprises de Trump. Mais s’il a enfreint les lois auparavant ou s’il a eu des conflits à ce sujet, il faut se rappeler que les règles du Congrès ne s’appliquent pas au président. La question à se poser serait donc plutôt la suivante: Que fera-t-il de ses entreprises à l’étranger? Mais même réfléchir à cela ne sert finalement pas à grand-chose: Trump a pour lui toute la force du système politique américain.»

Forces armées

Changements climatiques

Le point de vue de Jefferson Galeano, Professeur d’éducation environnementale à l’université de la Sabana (Colombie)

«Le discours qu’un candidat peut tenir au cours d’une campagne est une chose. Ce qu’il fait ensuite en tant que président en est une autre. Trump n’a pas évoqué les changements climatiques alors qu’il était candidat, parce qu’il se concentrait sur les politiques migratoires et l’économie. Quand il a été interrogé à ce sujet en tant que président élu, il a déclaré qu’il ne croyait pas au réchauffement climatique. Il a même donné quelques explications non scientifiques pour étayer cette affirmation. Mais le fait qu’il ait remporté l’élection a modifié son discours. Il a ainsi dit qu’il était “ouvert” à discuter du sujet. Cela ne signifie pas qu’il reconnaîtra le phénomène, mais il fait évidemment face à une autre réalité maintenant qu’il est président. Les États-Unis sont partie prenante d’accords et de mouvements internationaux de lutte contre les changements climatiques. Bref, si Trump veut faire ce qu’il a dit qu’il ferait sur les questions environnementales durant la campagne, le chemin qui s’offre à lui sera pour le moins ardu.»

Économie

L’avis d’Elizabeth Sherman, Professeure adjointe de politique américaine au département d’études gouvernementales de l’American University, à Washington, D.C.

«Soyons clair: le président pourrait recommander des changements à l’impôt des particuliers ou des entreprises, mais c’est au Congrès qu’il reviendrait d’écrire un projet de loi à partir des propositions de changements. On verrait ensuite si un tel projet de loi obtient l’aval des deux chambres. Les républicains ont une petite majorité au Sénat et un peu plus de latitude à la chambre haute, c’est vrai, mais est-ce que cela signifie qu’on aura forcément droit à une révision majeure du système fiscal? Non. Les républicains du Congrès ne veulent pas apporter de changements importants au code des impôts si la population continue à avoir l’impression que l’administration ne fait qu’aggraver le déficit en réduisant les impôts sans réduire les dépenses. Cela viendrait renforcer l’impression, largement répandue dans la population, que les républicains forment le parti des riches, et cela ferait grimper le taux d’inflation. Trump se comporte comme si des baisses d’impôt étaient nécessaires pour stimuler l’économie. La vérité, cependant, c’est qu’à 4,8%, le système se trouve dans un état de «plein emploi» et que les salaires augmentent.»

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