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Syrie: la Turquie menace de frapper «partout», tensions avec la Russie

Syrie: la tension monte entre la Turquie et la Russie

Recep Tayyip Erdogan

Rédaction - Agence France-Presse

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a menacé mercredi de frapper «partout» le régime en cas de nouvelle attaque de la Syrie contre ses forces, au moment où l’escalade des tensions donne lieu à des échanges acrimonieux entre Ankara et Moscou.

Signe de la complexité du conflit en Syrie où plusieurs pays sont impliqués de manière plus ou moins directe, de rares affrontements ont éclaté mercredi dans le nord-est du pays entre des milices loyales au régime de Bachar al-Assad et des militaires américains.

Mais c’est dans le nord-ouest, dans la province d’Idleb, que la situation est la plus volatile: en dépit d’un accord de désescalade entre Ankara et Moscou, le régime y mène depuis plusieurs mois une offensive, avec l’appui de l’aviation russe.

Crise inédite en Syrie entre Ankara et Moscou

À la catastrophe humanitaire — environ 700 000 personnes ont fui l’offensive —, s’est ajoutée une crise inédite entre Ankara et Damas, après la mort de 14 soldats turcs en une semaine dans des bombardements de l’artillerie syrienne.

Lors d’un discours au vitriol prononcé mercredi à Ankara, M. Erdogan a menacé de «frapper le régime partout» en Syrie en cas de nouvelle attaque contre les forces turques à Idleb.

Il a en outre réitéré un ultimatum au régime le sommant de se retirer de certaines positions à Idleb d’ici fin février, menaçant de l’y contraindre en faisant «tout ce qui est nécessaire, sur terre et dans les airs».

Ces derniers jours, la Turquie a considérablement renforcé sa présence militaire dans la province d’Idleb, où le régime et la Russie ont enregistré des gains face aux groupes rebelles et jihadistes ces dernières semaines.

Selon la presse turque, Ankara a déployé plus de 1000 véhicules dans la province d’Idleb en deux jours. Mercredi, un correspondant de l’AFP a vu un nouveau convoi de véhicules blindés turcs arriver dans la ville de Binnish, au nord-ouest de la ville d’Idleb.

Ankara s’intéresse de près à Idleb en raison de sa proximité avec la frontière turque, redoutant que l’offensive du régime syrien ne provoque un nouvel afflux de réfugiés vers la Turquie, qui accueille déjà 3,7 millions de Syriens.

La montée des tensions à Idleb a en outre commencé à éroder l’entente entre la Russie et la Turquie, qui, en dépit de leurs intérêts contradictoires en Syrie, ont renforcé leur coopération depuis 2016.

Fruit de ce partenariat et des bonnes relations entre M. Erdogan et son homologue russe Vladimir Poutine, Ankara et Moscou avaient notamment parrainé en 2018 un accord prévoyant la cessation des hostilités à Idleb.

La Russie accusée de participer au «massacre» des civils

Rompant avec son habituelle retenue lorsqu’il s’agit de la Russie, M. Erdogan a accusé mercredi Moscou de prendre part au «massacre» de civils au côté des forces du régime à Idleb et dénoncé les «promesses qui ne sont pas respectées».

M. Erdogan a en outre affirmé que les avions et hélicoptères qui bombardent les civils à Idleb «ne pourront désormais plus mener leurs actions tranquillement comme avant», sans préciser les moyens qui seraient mis en oeuvre ou si les appareils russes seraient visés.

Peu de temps après, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a accusé la Turquie de ne rien faire pour «neutraliser les terroristes à Idleb», une situation qu’il a jugée «inacceptable».

Dernier bastion de l’opposition à M. Assad après près de neuf ans d’un conflit ayant fait plus de 380 000 morts et des millions de réfugiés, la province d’Idleb est dominée par des groupes jihadistes.

Damas et Moscou affirment y combattre des «terroristes», mais M. Erdogan les a accusés de viser «majoritairement des civils» dans le but de pousser les populations vers la frontière turque.

Signe toutefois qu’Ankara souhaite maintenir le dialogue avec Moscou, le chef de la diplomatie turque a annoncé l’envoi dans les prochains jours d’une délégation en Russie pour essayer de trouver une solution à la crise d’Idleb.

Affrontements à Idleb

Sur le terrain, les affrontements ont gagné en intensité ces derniers jours à Idleb.

Mardi, un hélicoptère de l’armée syrienne a été abattu par un tir de roquettes au sud-est de la ville d’Idleb, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), qui attribue l’attaque aux forces turques. Ankara n’en a pas revendiqué la responsabilité.

Les forces de Damas ont néanmoins marqué un point important en reprenant le même jour l’autoroute clé M5. Le régime s’attelait mercredi à sécuriser les environs de cet axe stratégique, selon l’OSDH.

Alors que l’attention est rivée sur la situation à Idleb, la région de Qamishli, dans le nord-est, a été le théâtre mercredi d’une rare altercation entre des militaires américains et des forces pro-Assad, d’après l’OSDH.

Selon la coalition internationale antijihadiste menée par les États-Unis, une patrouille américaine a répliqué à des tirs d’armes légères après être tombée sur un checkpoint des forces loyales à M. Assad.

D’après l’OSDH, ces affrontements ont fait un mort côté régime et ont pris fin après un raid américain sur le secteur ayant permis l’évacuation de deux véhicules militaires américains retenus dans le village de Kherbat Ammo.

Alors que la crise d’Idleb tend les relations entre la Turquie et la Russie, les États-Unis ont apporté un soutien franc aux autorités turques.

Le représentant spécial des États-Unis pour la Syrie, James Jeffrey, devait rencontrer mercredi plusieurs responsables turcs à Ankara. Lors de son arrivée mardi soir, il a assuré que Washington voulait soutenir la Turquie «autant qu’il est possible».

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