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État islamique inc.

L’argent, c’est bien connu, est le nerf de la guerre et celle menée en ce moment contre le groupe État islamique (EI) ne fait pas exception. Alors bombarder des champs pétroliers contrôlés par l’organisation terroriste en Irak et en Syrie, c’est s’attaquer directement à son portefeuille.

Follow the money, disent les Américains. Suivre l’argent à la trace est souvent payant. EI, qui règne sur un territoire huit fois plus vaste que la Gaspésie, empoche au bas mot 2M$ tous les jours en vendant – en contrebande bien sûr – son baril entre 25 et 50$, contre 100$ sur le marché.

À l’or noir extrait d’une trentaine de champs pétrolifères (une douzaine ont été bombardés depuis une semaine), s’ajoutent ventes de femmes et d’enfants comme esclaves sexuels, rackets de toutes sortes, commerce d’antiquités, pillages de banques, rançons et collectes auprès des croyants du «califat» dirigé par Abou Bakr-al Baghdadi, alias le calife Ibrahim.

La destruction des champs pétroliers ne suffira donc pas à assécher les revenus de EI, dont le trésor de guerre dépasserait déjà les 2G$. Assez pour payer pendant des années la prime mensuelle de 300 à 400$ versée à ses 30 000 combattants, même si ceux venus d’Occident reçoivent une enveloppe supplémentaire de 700$.

Les jours du groupe terroriste ne sont pas comptés, croit Leslie H. Gelb, président honoraire du Council on Foreign Relations, un think tank américain.

«Les raids aériens auront seulement des effets marginaux sur État islamique. Nous n’avons, par ailleurs, pas calculé comment nos attaques aériennes vont affecter l’économie syrienne et comment elles pourront compenser l’absence significative de troupes au sol» [échange de courriels]…

Et si le «calife Ibrahim», dont la tête est mise à prix pour 10M$, devait la perdre lors d’un bombardement? Sa mort n’aurait pas plus de conséquences pour EI que celle de Ben Laden pour Al-Qaïda. L’hydre aura toujours plusieurs têtes.

Le maître du «califat pétrolier», qui «n’obéit qu’à Dieu», est assis sur une mine d’or et il a largement de quoi voir venir, d’autant que rien ne prouve que les fonds en provenance de donateurs privés de pétromonarchies sunnites du Golfe et de l’Arabie Saoudite se sont taris, même s’ils sont menacés de poursuites et d’emprisonnement.

Aucune source ne peut dire avec précision combien pèse État islamique inc.

Le point d’interrogation finira par se clarifier avec le temps, comme ce fut le cas avec Al-Qaïda. En attendant, tout indique que le groupe terroriste, né après l’invasion américaine de l’Irak en 2003, devance financièrement tous les autres. Il est bel et bien le plus riche de la planète.

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