«Mon premier incident raciste, je l’ai vécu à l’âge de 6-7 ans. Il n’y a personne qui dit à tes professeurs que quand tu es jeune c’est compliqué, que quand tu es jeune et noir c’est com-compliqué et que quand tu es jeune, noir avec des parents immigrants…», laisse tomber Renzel Dashington sans retenue, dans le style direct pour lequel il s’est fait connaitre.
«Aujourd’hui, en tant qu’adulte, des fois j’en veux au Québec dans lequel je vis, le système, mes parents, tout le monde tsé».
Ce serait un euphémisme de dire que l’humoriste montréalais n’a pas hésité longtemps lorsque Métro l’a approché afin de participer à cette série sur l’identité. Le fondateur des Bad Boys du Rire et du Bad Boys Comedy Club en a manifestement beaucoup à dire sur la place que cette question prend dans la société québécoise et, surtout, sur son l’omniprésence dans sa vie.
Pendant plus d’une heure, il nous parlera de sa jeunesse partagée entre la culture haïtienne à la maison et la culture québécoises à l’extérieur, de ses années formatrices dans un collège privé où «il n’y a qu’un noir par classe» et de sa relation souvent difficile avec l’identité québécoise.
J’étais en vie pour au moins deux référendums. J’étais conscient pour au moins deux. […] Le monde des adultes bleed dans le monde des enfants. La question identitaire elle arrivait dans nos écoles. Combien c’est arrivé de professeurs qui me demandent «est-ce que tu te sens Québécois toi?». C’est une question loadée ça. Parce que « Québécois » c’est pas une nationalité, c’est une culture. […] T’es le seul noir dans la classe et il ne l’a demandé qu’à toi.
Renzel Dashington, humoriste.
«C’est comme me demander si je me sens catholique. It’s not you f***ing business.»
«Sans le vouloir, tu te défais d’une partie de toi-même pour fiter dans un espace. La manière de parler avec les Québécois, les sujets qui sont intéressants, le fait qu’ils n’en n’ont rien à foutre du racisme. C’est un code ça. Tu es un caméléon toute la journée. Tu es supposé apprendre à exister dans un monde où quand tu es black soit le moins black possible parce que ça met tout le monde mal à l’aise!», se désole l’entrepreneur aujourd’hui dans la quarantaine.
Comme c’est le cas pour beaucoup de Québécois issus de la diversité, Renzel Dashington, confiera avoir longtemps eu l’impression de se chercher, de constamment «naviguer» entre plusieurs identités. Une situation qui n’était «plus tenable».
«Plus tard dans la vie, j’ai compris que l’identité, ça m’appartient. Il n’y a pas de demie, il n’y a pas de bon milieu, il n’y a pas de bonne concession, il y a ce qui me rend heureux, il y a qui je suis, comment je suis à l’aise de me décrire moi-même dans un miroir.»