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Patrice Bernier vivra le dernier chapitre de son rêve d’enfance

Paul Chiasson / La Presse Canadienne

Alexis Bélanger-Champagne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Contrairement à de nombreux Québécois, Patrice Bernier ne rêvait pas à la coupe Stanley quand il était jeune. Il rêvait plutôt à la Coupe du monde de soccer.

Même si cet objectif aurait pu difficilement être atteint alors que le Canada oscille toujours autour du 100e rang mondial, Bernier est relativement serein alors qu’il se prépare à mettre un terme à un important chapitre de sa vie. Il reste un dernier tour de piste au Brossardois âgé de 38 ans, dimanche, quand l’Impact de Montréal accueillera le Revolution de la Nouvelle-Angleterre au Stade Saputo.

«On m’en parle chaque semaine et j’ai probablement joué le match dans ma tête avant de le jouer. Jusqu’ici, chaque jour est normal, mais ce sera peut-être différent samedi, quand je participerai à mon dernier entraînement, a expliqué Bernier un peu plus tôt cette semaine. Ma préparation est la même, mais pas tout à fait. C’est la dernière fois que je répète les mêmes gestes. C’est spécial. Je suis peut-être un peu nostalgique.

«C’est ce que je voulais faire depuis que je suis tout petit. C’est la fin de mon rêve d’enfance.»

Ce rêve, Bernier l’a formé en regardant le Canada participer à la Coupe du monde de 1986 au Mexique. Il le doit aussi à son père, Jean, et à ses oncles, tous des passionnés du ballon rond.

«J’ai vécu la coupe Stanley du Canadien en 1993, mais pour moi, c’était le soccer, a raconté Bernier. C’était la Coupe du monde de 1986, avec les exploits de Maradona. Elle avait lieu au Mexique. Ce n’était pas loin. Je voyais les stades remplis. C’était ce que je voulais faire. Je voulais jouer dans des stades remplis.

«À 15 ans, j’ai joué avec l’équipe nationale des moins de 17 ans à la Coupe du monde et c’est là que j’ai compris que je pouvais viser les pros.»

Le parcours de Bernier l’a mené à Syracuse, dans l’État de New York, en Norvège, en Allemagne et au Danemark. Il a aussi parcouru la planète en disputant 56 matchs avec l’équipe nationale du Canada.

Son retour à Montréal en 2012 lui a permis d’obtenir le statut de vedette locale, après une décennie à évoluer dans un certain anonymat en Europe. Il est ainsi devenu une inspiration pour une nouvelle génération de joueurs de soccer québécois.

«J’ai quelques amis qui ont aussi fait carrière, notamment Olivier Occéan, qui est en Norvège, mais nous n’étions pas beaucoup, a rappelé Bernier. Je pouvais peut-être compter sur les doigts d’une main le nombre de Québécois actifs à une certaine époque. Là, il y en a plus.»

La création de l’Académie de l’Impact en 2011 a changé la structure de développement des jeunes au Québec. La popularité grandissante du soccer dans la province a également forcé les organisations locales à repenser leur manière de fonctionner et à augmenter le nombre de centres d’entraînement.

«Les jeunes peuvent jouer 10 mois par année maintenant, a noté Bernier. Dans mon temps, c’était plus saisonnier. On devait louer des gymnases ou jouer dans des arénas sans glace. Maintenant, il y a plus d’endroits pour s’entraîner. (…) On défait les terrains de baseball pour en faire des terrains de soccer.

«Il n’y a rien qui va garantir la réussite d’un jeune, mais le cheminement est meilleur. L’Académie permet notamment aux jeunes de se préparer non seulement comme joueur, mais aussi psychologiquement à la routine d’un pro. C’est un peu comme le Midget AAA ou la LHJMQ, qui servent à préparer les jeunes pour la LNH.

«Je suis content quand je vois le succès de l’Académie et des joueurs en graduer. Oui, j’aurais voulu avoir ça à l’époque, mais je ne regrette pas comment j’ai grandi. J’ai peut-être appris des choses qu’ils n’apprendront pas.»

Cela n’a toutefois pas empêché Bernier de tracer son propre chemin chez les professionnels. Cette aventure prendra fin dimanche et son timbre de voix devient plus fragile quand il discute du dernier match à venir.

«Il y a beaucoup de personnes qui ont fait ce parcours avec moi. Mes parents, mes amis. On jouait dans la rue, dans le parc. On s’imaginait être quelqu’un d’autre, a-t-il raconté. Il y a aussi ma femme, qui a passé les 20 dernières années avec moi. Elle m’a vu devenir un professionnel. Cette carrière-là, c’est la mienne, mais c’est aussi la sienne.

«Je pense aussi à moi. C’est ce que je voulais faire. J’ai réussi et je suis content. Mais il y a une fin. Si je pouvais jouer dans une ligue rémunérée pour les 38 ans et plus, je le ferais! C’est plus qu’une passion pour moi.»

Bernier a aussi admis que c’est probablement au moment du prochain camp, en janvier, qu’il va être frappé par l’absence du soccer dans sa vie. Il a reconnu que la camaraderie dans le vestiaire va particulièrement lui manquer. Mais pour de nombreux Québécois, c’est de la fougue sur le terrain et de la générosité hors du terrain du Brossardois dont ils vont s’ennuyer.

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