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Bâtir une économie des voisins

Photo: Collaboration spéciale

L’économie collaborative a représenté un marché de 5G$ en 2017 au Québec et Montréal serait l’une des métropoles canadiennes les plus actives, selon une récente étude de l’Université du Québec à Montréal. Métro présente des initiatives porteuses de cette économie solidaire en mutation.

1-Produire de l’énergie
Les instigateurs du projet Celsius ont terminé leur étude de faisabilité sur la création d’un réseau géothermique, qui permettra de produire de la chaleur dans trois ruelles de Rosemont. Ils passeront bientôt à l’étude opérationnelle qui précisera notamment les aspects techniques et juridiques du projet et officialisera la création d’une coopérative. «Implanter ce genre de projet dans une ruelle verte est plus facile, car la mobilisation entre voisins est déjà là», souligne Gabrielle van Durme, la coordonnatrice de l’organisme Solon. Celui-ci est responsable de piloter ce projet allant plus loin que la production d’énergie. «Établir un réseau solidaire de voisins contribue à la santé de ses membres», dit Mme van Durme, en faisant référence à l’initiative londonienne Participatory City. En développant une gamme de plus de 100 activités participatives dans deux arrondissements de Londres, les chercheurs ont notamment remarqué une hausse de plus de 40% du bien-être des participants, ainsi qu’une amélioration de leurs compétences et du niveau de confiance qu’ils avaient envers leurs voisins (+60%).


2-Créer une monnaie.
Sur papier, JoatU est un hybride entre Facebook et LinkedIn, tout en intégrant aussi une monnaie: le CAPS (Community Actions Points). Les membres du réseau y enregistreront leurs compétences (ménage, massage, comptabilité, etc.), ainsi que leurs besoins. On y trouvera aussi un calendrier public des activités organisées en commun (échanges de vêtements, cuisines collectives, soirées de jeux, ateliers de conception, etc.). «L’idée derrière tout cela, c’est de rassembler des gens pour améliorer ta communauté», résume le Montréalais Jamie Klinger, dont le projet a remporté le prix de la Ville intelligente et inclusive au Coopérathon, organisé par Desjardins l’automne dernier. Grâce aussi à l’aide de l’incubateur de startups District 3, une plateforme web pourrait être opérationnelle d’ici quatre mois. Mais pourquoi avoir créé une monnaie d’échange? «Pour se différencier des autres initiatives comparables et aussi pour créer une motivation supplémentaire à participer aux activités», ajoute ce féru de monnaies alternatives. Créer de la richesse (plus de CAPS) en rendant simplement service, toute une révolution!

3-Partager des véhicules. Posséder une auto coûte plus de 9 000$ par an, pour un bien qui reste inutilisé 95% du temps. Pour y remédier, des voisins songent à partager leur voiture. «Mais si on veut rémunérer le propriétaire, son assurance ne le couvre plus et il n’existe pas de produit complémentaire adapté aux besoins des particuliers», explique Gabrielle van Durme, coordonnatrice chez Solon. Une constatation corroborée par Guillaume Lavoie qui préside le Groupe de travail sur l’économie collaborative mandaté par Québec. Celui-ci pilotera une consultation, lancée sous peu. «Chez les assureurs, l’accent doit être mis sur les utilisateurs multiples, comme le fait déjà la MAIF, [une société d’assurances] en France», indique M. Lavoie.  En attendant, Solon jongle avec l’idée d’organiser des prêts de véhicules pour les petits trajets. «Il reste notamment à mettre au point un calendrier partagé et à évaluer la meilleure façon de rendre disponible les clés», précise Mme van Durme, qui aimerait aussi inclure des vélos cargos et des remorques à vélos. Dans ce projet pilote appelé Locomotion, Solon espère réunir dix ménages et cinq voitures personnelles. «On veut entre autres évaluer si les propriétaires seront à l’aise de rendre leur auto disponible, même quand il y aura une petite possibilité qu’ils en aient besoin. Il y a un aspect psychologique non négligeable!», dit-elle. Pour les trajets plus longs en auto, Solon suggère d’utiliser la plateforme de la startup Turo, qui offre la location entre particuliers.

4-Installer une «boutique»
Selon une étude du World Wildlife Fund, datée de 2013, une perceuse n’est utilisée qu’une minute et demie par an, soit 0,00029% du temps. C’est l’outil le moins utilisé devant la souffleuse à feuilles (quatre heures par an). Pourquoi alors ne pas en partager l’utilisation pour éviter d’en acheter? Mais encore faut-il un point de chute. C’est à cela qu’a répondu la Société de développement environnemental de Rosemont (SODER) en créant la Bwat, dont les plans sont accessibles à tous. Un premier spécimen de ce cagibi, où des objets du quotidien pouvant être partagés, a été installé dans la ruelle verte Le chemin des cheminées. Il sera inauguré ce printemps. «Pour l’instant, il y a des accessoires de jardinage, un crazy carpet et un pompe à vélos, mais on pourrait y ajouter une cloche à gâteau, un ensemble à raclette ou même des vêtements à échanger», lance Mélanie Charbonneau, résidente de la ruelle.


5-Une ferme dans un triplex
Dans son triplex de Rosemont, Martin Desmarais a installé une petite ferme. Dans la cour, quatre pondeuses produisent 600 oeufs par an. Au sous-sol: un bassin de 60 tilapias irrigue un mini champ de laitues et de kale et lui fournit du poisson. Sur le toit, des bacs hébergent une quinzaine de variétés de légumes. Il y a aussi 12 panneaux solaires et une éolienne, de quoi lui fournir 20% de son électricité. L’investissement en matériel agricole est d’environ 3 000$. Si ce preneur de son pour le cinéma n’avait pas une grande famille à nourrir, il pourrait aisément en faire bénéficier cinq ou six voisins au plus fort de sa production.  «L’autonomie alimentaire est impossible en ville et nourrir une famille toute l’année prendrait près de 30 heures par semaine», souligne Martin Desmarais.

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