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Il y a 45 ans, l’âge de la majorité passait de 21 à 18 ans au Québec

Hippie Love and Peace poster. Retro style typography, pretty girl in neon colors. Groovy vintage illustration. Photo: Métro

Histoire. Devenir adulte trois ans avant le moment prévu: le rêve? C’est arrivé à tout un pan de la jeunesse québécoise le 1er janvier 1972, lorsque l’âge de la majorité est passé
de 21 ans à 18 ans.

Il y a 45 ans, le 14 décembre 1971, les parlementaires québécois ont voté le projet de loi 66 qui, notamment, faisait passer l’âge de la majorité civile de 21 ans à 18 ans.

«Nous sommes en 1971», avait déclaré au moment des débats sur ce projet de loi le député de l’Union nationale Jean-Jacques Bertrand pour justifier le fait qu’il était temps de procéder à ce changement. Une phrase qui n’est pas sans rappeler le «parce qu’on est en 2015» du premier ministre du Canada, Justin Trudeau, pour justifier son cabinet paritaire.

«“La société a changé, réveillons-nous”: c’est un peu ça, le message», analyse Louise Bienvenue, professeure d’histoire à l’Université de Sherbrooke.

Cette nouvelle loi sur la majorité est entrée en vigueur le 1er janvier 1972. Cela signifie que les jeunes nés en 1954 ont atteint leur majorité trois ans plus tôt que prévu. Ceux qui sont nés en 1952 et en 1953 ont eux aussi pu devancer quelque peu ce moment.

«Je ne m’en souviens pas du tout! Ça n’a pas dû m’impressionner!» confie toutefois à TC Media Aline Harvey, qui est née en 1954. Même son de cloche pour Joane Marois, elle aussi née en 1954. «Je ne m’en rappelle pas vraiment. Ça n’a pas fait une grosse différence dans nos vies…» Les deux femmes, étudiantes à l’époque, se souviennent toutefois qu’elles fréquentaient les bars… Ce qui était complètement légal.

«On voit cette génération comme ayant des atouts que les autres n’avaient pas.» -Louise Bienvenue, professeure d’histoire à l’Université de Sherbrooke

En effet, des droits avaient déjà été accordés aux jeunes de 18 ans, droits probablement plus marquants dans la vie d’un adolescent presque adulte, par exemple le droit de vote, le droit de fréquenter des «débits de boissons alcooliques» et même le droit d’aller voir des films «de toutes les catégories».

La majorité civile, elle, implique plutôt d’être affranchi de l’autorité parentale et d’avoir, pour un individu, «pleine capacité*». Dans les discussions relatives au projet de loi 66 à l’Assemblée nationale, on souligne surtout que les jeunes de 18 ans pourront dorénavant signer des contrats et effectuer des transactions financières. «Au fond, [au moment de l’adoption de la loi] en 1971, on allait dans le sens de ce qui avait été fait et on confirmait un changement», commente Mme Bienvenue.

Une décision unanime
«En abaissant carrément la majorité à 18 ans, je pense que nous ne faisons tout simplement que reconnaître un état de fait, un état qui est celui de l’évolution de la société québécoise», avait affirmé Jérôme Choquette, ministre de la Justice et élu du Parti libéral, pour appuyer cette démarche lors d’une lecture du projet de loi en 1971.

Pour Mme Bienvenue, il est nécessaire de mettre cette nouveauté dans le «grand contexte des années 1960», soit l’époque des Trente Glorieuses**, après la Deuxième Guerre mondiale. «Ce sont des années de grands changements à tous égards: sociaux, politiques, culturels», précise-t-elle. «Elles ont été marquées par une vague d’optimisme. La jeunesse est nombreuse, ce sont les jeunes du baby-boom.» Cette jeunesse, selon Mme Bienvenue, a des caractéristiques nouvelles par rapport à la génération précédente. «Elle est plus scolarisée. On mise beaucoup sur les études. C’est l’heure du “qui s’instruit s’enrichit”.»

Cette évolution de la société était reconnue par tous les partis à l’Assemblée nationale, même si certains députés ont émis quelques commentaires. «Rarement a-t-on vu un débat aussi unanime : tous les partis de l’époque sont d’accord», ajoute Mme Bienvenue. Selon le député Antoine Drolet, du Ralliement créditiste, le ministre de la Justice aurait même copié une motion proposée précédemment par son parti.

Le Québec était toutefois à la traîne. Trois provinces canadiennes (l’Alberta, l’Ontario et le Manitoba) avaient déjà abaissé l’âge de la majorité à 18 ans.

* Après l’adoption de ce projet de loi, certaines exceptions (âge requis pour être dirigeant d’une entreprise et pour être juré) sont demeurées fixées à 21 ans.

** Les «Trente Glorieuses» désignent la période allant de 1946 à 1975, marquée par une forte croissance économique et une amélioration des conditions de vie dans plusieurs pays développés.

À lire: À quel âge devient-on majeur dans le monde?

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