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Mesures inattendues dans la 2e loi 'mammouth'

OTTAWA – Nouvelle session parlementaire, nouveau projet de loi omnibus de 400 pages, nouveaux affrontements en vue.

Le ministre des Finances Jim Flaherty a dévoilé jeudi le large contenu de son second projet de loi de mise en oeuvre du budget. Si certaines dispositions étaient déjà annoncées — comme les changements apportés au régime de pension des députés et des fonctionnaires — d’autres sont inattendues. Et mal accueillies.

Le volumineux document modifie par exemple des lois touchant les évaluations environnementales, la définition des eaux navigables, les pêches, les douanes ou l’attribution des terres à travers la Loi sur les Indiens.

«Si le gouvernement était fier de ces changements à l’environnement ou à la recherche et au développement, cela serait dans une loi séparée», a fait valoir le néo-démocrate Nathan Cullen. «Lorsqu’ils veulent cacher quelque chose, ils l’ensevelissent dans une loi omnibus.»

Au printemps, les troupes de Stephen Harper avaient présenté le premier volet de la loi budgétaire en y amalgamant des sujets qui n’étaient pas en lien strictement avec l’économie et les finances. Le projet de loi C-38, qui modifiait près de 70 lois, avait enclenché un bras-de-fer parlementaire avec comme point culminant un marathon de votes de 22 heures consécutives.

Cette fois-ci encore, quelques dizaines de lois sont amendées. Et à nouveau, les partis d’opposition souhaitent que le projet de loi omnibus soit morcelé en bouchées plus digeste afin d’avoir la chance d’en analyser son contenu.

«Nous insistons sur l’opportunité de voir des mesures séparées pour que la Chambre puisse étudier ces mesures d’une façon beaucoup plus juste», a fait valoir le chef libéral intérimaire, Bob Rae.

Le chef bloquiste Daniel Paillé juge pour sa part C-45 tout aussi néfaste que son prédécesseur du printemps. «Quand on répète un mauvais film, le deuxième est tout aussi mauvais que le premier.»

Environnement

En quelques heures, les partis d’opposition disent ne pas avoir eu le temps de se pencher sur l’ensemble des détails de la nouvelle législation. Une nouvelle initiative — qui n’était pas inclue dans le budget de 2012 — les a cependant fait sourciller tous, sans exception.

Le gouvernement conservateur veut en effet changer la «Loi sur la protection des eaux navigables», plus que centenaire, pour la «Loi sur la protection de la navigation», un immense pas en arrière dans la protection des cours d’eau à travers le pays, déplore l’opposition.

Avec ces changements, seuls 97 lacs et 62 rivières tomberont sous la protection de la nouvelle loi, alors qu’il existe des dizaines de milliers de lacs et rivières au pays.

Le ministre des Transports Denis Lebel a justifié cette démarche en arguant que trop de projets avaient été bloqués par le passé simplement parce qu’un petit cours d’eau faisait partie de l’équation.

«On utilisait le vocable d’eau navigable pour parler (…) d’un fossé ou d’une petite rigole ou d’un petit ruisseau, pour bloquer l’avancement de projets. Et c’est ça qu’on ne veut plus», a-t-il tranché. Le ministre a ajouté que des autorisations allaient toujours être nécessaires auprès des autorités municipales et provinciales.

Pour la chef du Parti vert, Elizabeth May, il s’agit là d’un «moment tragique», comme les provinces n’ont pas toutes des standards élevés en terme de protection des cours d’eau.

«Il s’agit là d’un type de comportement classique de la part de Stephen Harper de tenter de retirer les autorités fédérales de l’environnement», s’est-elle désolée.

Le libéral Francis Scarpaleggia a confié regretter cette situation, puisque le fédéral pouvait autrefois faire contrepoids à des provinces qui auraient pu être tentées de favoriser certaines industries, citant en exemple le secteur pétrolier en Alberta.

Même son de cloche de part du chef néo-démocrate Thomas Mulcair, qui soutient que les changements auront «des conséquences énormes» sur les écosystèmes à travers le pays. «C’est une abdication de responsabilité envers les générations futures», a-t-il déploré.

Au bureau du ministre Lebel, on plaide que cette initiative était dans les faits dans le budget, puisqu’un paragraphe annonçait l’intention du gouvernement de réduire «les formalités administratives».

Retraite

Un autre gros morceau du nouveau projet de loi C-45 concerne les régimes de retraite des fonctionnaires et des députés fédéraux, qui devront contribuer davantage à leur régime dès l’an prochain, pour éventuellement le financer à 50 pour cent en 2017. Leur contribution bondira ainsi de 11 000 $ à 39 000 $ annuellement, à terme.

Les nouvelles recrues de la fonction publique ainsi que les élus à la prochaine élection, en 2015, n’auront plus droit à leur pension qu’à 65 ans, plutôt que 55.

Ces changements feront économiser plus de 2,6 milliards $ à l’État en cinq ans, selon le président du Conseil du Trésor, Tony Clement.

Les partis d’opposition espéraient que le ministre des Finances isole ces mesures dans un projet de loi séparé. En conférence de presse dans un magasin de vélo à Ottawa, le ministre Flaherty a clairement fait savoir que c’était hors de question, puisque le thème des régimes de retraite avait déjà été annoncé dans son budget du mois de mars.

À une question des néo-démocrates en Chambre, il s’est montré cinglant en insinuant que l’opposition était paresseuse.

«Il n’y a rien de neuf. Ce qui est dans le projet de loi aujourd’hui était dans le budget. S’ils ne l’ont pas lu, je dirais à mes honorables amis de l’autre côté : ‘je ne sais pas ce que vous avez fait tout l’été. Vous avez été payé, vous avez un bon régime de retraite. Alors faites votre travail, faites votre boulot!’», s’est écrié le ministre.

Le gouvernement conservateur étant majoritaire, C-45 devrait être adopté d’ici Noël.

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