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«Nous avons la responsabilité de protéger» – Roméo Dallaire

Photo: Université Concordia/Collaboration spéciale

Le 11 novembre, jour du Souvenir, les Canadiens ont une pensée pour ceux qui ont servi et servent toujours dans les Forces canadiennes. Le lieutenant-général à la retraite Roméo Dallaire aimerait également que le gouvernement se souvienne qu’il était un chef de file en matière de maintien de la paix.

Que représente le jour du Souvenir au Canada, en 2012?
Depuis quelques années, le jour du Souvenir évoque moins un passé lointain. Il y a une solidarité qui s’est développée dans la population canadienne par rapport aux nouveaux vétérans qui sont déployés dans différents pays, que ce soit pour des missions de paix avec l’ONU, ou avec l’OTAN dans des contextes de guerre civile.

Est-ce en raison de la mission en Afghanistan qui a coûté la vie à 158 soldats canadiens?
Il y a eu le choc des nombreux décès en Afghanistan et le fait qu’on ne les a pas cachés comme on l’avait fait dans les années 90. Il a fallu faire réaliser au gouvernement l’ampleur des pertes et des sacrifices. Avec l’Afghanistan, on a pleinement pris conscience que, si on envoie nos jeunes outre-mer, il y a un coût.

Est-ce que le rôle de l’armée canadienne a évolué dans les dernières années?
La nature des conflits a évolué. Auparavant, il y avait des conflits entre deux pays et un arbitre veillait au respect des traités de paix. Cela a radialement changé avec la fin de la Guerre froide. On a maintenant des pays en implosion, des Rwandais qui tuent des Rwandais. Avec le Rwanda, on a compris qu’on ne pouvait rester sur place à observer. Il fallait être prêt à protéger et à utiliser la force. Donc, la nature même du maintien de la paix a changé.

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Est-ce que, depuis le génocide du Rwanda, les Canadiens acceptent davantage que la force soit parfois nécessaire?
Ça a amené le Canada à créer en 2001 le concept de la responsabilité de protéger, qui a été accepté par les Nations unies (ONU) en 2005. Cela implique que, si les autorités d’un pays abusent massivement des droits de la personne, on a la responsabilité d’intervenir par l’entremise de l’ONU, comme en Libye. C’est un changement d’envergure dans la doctrine du maintien de la paix de l’ONU.

L’intervention en Libye est directement liée à ce concept mis de l’avant par le Canada?
Totalement. Et on est encore en apprentissage, on n’a pas toutes les réponses comme on peut le voir avec les conflits en Syrie et au Darfour. On est encore loin du principe fondamental qui demanderait d’intervenir pour prévenir que des scénarios de frictions dégénèrent en conflits.

Vous avez déjà dit que le Canada n’était plus le leader qu’il avait été dans le maintien de la paix…
Exactement, on est presque isolationnistes, sauf si ça correspond à certains critères établis par le gouvernement. Et ces critères ne découlent pas d’une recherche du bien pour l’humanité ou d’une politique internationale articulée. Quand on n’a pas de politique énoncée qui nous donne des paramètres d’intervention, on se contente de réagir. C’est pour ça que le Canada ne se trouve même plus sur le Conseil de sécurité de l’ONU.

On semble avoir pris la décision que l’ONU n’était pas un outil utile pour la sécurité et l’humanité.

Ça vous décourage?
Ça me met en maudit.

Le Canada à la traîne

Roméo Dallaire travaille en étroite collaboration avec l’Institut montréalais d’études sur le génocide et les droits de la personne (MIGS) afin de sensibiliser les citoyens et les dirigeants afin de prévenir les génocides. «On veut aider les gouvernements nationaux pour développer des stratégies de prévention, explique Kyle Matthews du MIGS. Il y a une absence de volonté politique pour intervenir et mettre des politiques en place.»

Grâce au MIGS, la Maison Blanche a même créé le poste de National Security Director for War Crimes and Atrocities.

Et pendant ce temps, le gouvernement conservateur se montre encore réticent, selon M. Matthews. M. Dallaire a confirmé à Métro avoir rencontré John Baird, ministre des Affaires étrangères, il y a près de quatre mois. «Il nous a dit qu’il étudierait nos recommandations, mais on attend encore», a indiqué le lieutenant-général.

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