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Enceinte, la conseillère Brunet dénonce l’absence de congé de maternité

Photo: Hugo Lorini / TC Media

Enceinte de son deuxième enfant, la conseillère municipale de Verdun, Marie-Eve Brunet, déplore que les élues n’aient pas droit à un congé de maternité ou de parentalité. Elle croit que cela n’aide pas à encourager les femmes à se lancer dans une carrière politique. Depuis les dernières élections municipales, les femmes représentent 32 % des conseillers municipaux.

La conviction de Marie-Eve Brunet d’accorder aux femmes et aux pères un congé de maternité et de parentalité est si forte que la Ville de Montréal l’a mandaté pour parler au nom de l’administration de Denis Coderre pour toutes questions concernant cette problématique.

« Partout au Canada, le milieu politique n’est pas adapté à l’ère d’aujourd’hui. C’est encore un milieu d’homme de 50 ans et plus. Des femmes en politique, particulièrement des jeunes, on ne voit pas ça fréquemment. »

Marie-Eve Brunet explique que dans la loi provinciale encadrant les municipalités, tous les élus peuvent s’absenter pendant trois conseils, soit trois mois, pour des raisons de santé, et ce, sans pénalité. Après cette période, une conseillère nouvellement mère par exemple, pourrait perdre son titre si elle s’absentait à nouveau.

« Sur le plan légal, ce n’est pas considéré comme un accouchement, mais comme un arrêt de maladie. »

Travailleurs autonomes
Émilie Thuillier, conseillère d’Ahuntsic pour Projet Montréal, comprend bien ce que vit Marie-Eve puisqu’elle a accouché durant ses deux mandats. « Il n’y a pas de différence entre mon premier et mon deuxième enfant. En quatre ans, il n’y a rien de réglé et aucune conscientisation des hommes à la tête de nos organisations. »

Chez les autres travailleurs, le congé de maternité des femmes est de 18 semaines et l’homme a cinq semaines. À cela peuvent s’ajouter plusieurs semaines de congé parental, ce qui n’est pas donné aux élus parce qu’ils n’ont pas le même titre de travailleurs.

Pour ce qui est de leur salaire, Mme Thuillier affirme qu’ils reçoivent leur paye entière, mais n’ont pas accès au régime québécois de parentalité parce qu’ils sont considérés comme travailleur autonome. Quant aux commissions permanentes sur lesquelles ils siègent, ils ne peuvent être payés que s’ils sont présents.

« Je dois retrancher mon salaire chaque fois que je justifie mon absence. C’est un salaire que je perds directement en m’occupant du bébé », commente la conseillère.

Marie-Eve Brunet_Verdun

Politique à la carte
Andrée-Anne Lacasse, chercheuse au Conseil du statut de la Femme (CSF) ajoute qu’il n’y a rien non plus pour les élus provinciaux autant femmes que hommes. « On parle de négociation à la carte. Ils doivent négocier avec leur parti politique pour le congé de maternité et de parentalité. Il n’y a pas de mesures fixes et systématiques. »

D’après l’étude de l’union interparlementaire comprenant 77 pays, il avère que 11,8 % des parlements ont adopté des politiques spécifiquement pour les congés de parentalité des élues. Ceux ayant des congés de paternité et de parentalité représentent 6,2 %. En majorité, 59,4 % des pays n’ont aucun congé parental pour les élus alors que 39,1 % ont un congé parental qui s’adresse à toute la population.

Moins de femmes en politique
Mme Lacasse mène une étude sur la place des femmes en politique au Québec. Elle et son équipe ont mené 16 entrevues avec d’actuelles et d’anciennes politiciennes des trois paliers de gouvernement. Il ressort que « c’est difficile pour une femme de se projeter à la fois comme mère et politicienne. »

Cela affecte peut-être le recrutement des femmes au sein des formations politiques. Selon une étude du Ministère des Affaires municipales, des régions et de l’Occupation du territoire (MAMROT), les élections municipales de 2013 ont porté 190 femmes au poste de mairesse et 2 204 femmes au poste de conseillère. Les femmes représentent 32 % des conseillers municipaux et 17,3 % des maires. Il y a une légère amélioration par rapport aux taux de 2009, qui étaient de 29,3 % et de 16 %.

À Montréal, il y a 21 conseillères d’arrondissement (sur un total de 38) et 22 conseillères de ville (sur un total de 65). Donc, 43 femmes élues sur un total de 103.

D’après la conseillère Brunet, le manque de ressources pour les femmes enceintes peut décourager certaines à aller en politique. « En campagne électorale, elles me disaient qu’elles préféraient attendre pour avoir des enfants ou commencer leur carrière plus tard. Cela joue sur le regard de l’aspect de conciliation famille et travail. »

Mesures à adopter
Un comité dirigé par le responsable des infrastructures au sein du comité exécutif de Montréal, Lionel Perez, Elsie Lefebvre et dans lequel la conseillère Brunet s’implique, travaille sur une liste de recommandations qui sera remise éventuellement au maire Denis Coderre.

« M. Coderre souhaite que Montréal fasse preuve d’initiative et améliore la réalité. Il est très conscient qu’en 2015 on doit dépoussiérer les règles. Il a mandaté un comité pour regarder de quelles façons sont affectés les congés de maternités et paternités. »

Cette liste de mesures à prendre n’est pas encore finale, mais l’idée est de favoriser la place des jeunes femmes en politique, de même que celle des pères ou des parents qui adoptent en mandat et d’instaurer une conciliation famille-travail plus forte.

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