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Consultation sur le racisme: entre clair et obscur

La consultation s’étalera sur 4 à 6 semaines à compter du mois prochain. Photo: Photo gracieuseté

À la veille des travaux de consultation sur la discrimination et le racisme systémique, il y a encore des zones d’ombre au tableau pour les organismes comme Paroles d’excluEs qui mèneront les consultations locales.

«La consultation est en train de démarrer, mais on a peu d’information encore à ce stade-ci», reconnait Amélie Daigle, la coordinatrice générale de Paroles d’excluEs.
L’organisme est le seul qui s’occupera de recueillir les témoignages pendant les consultations locales à Montréal-Nord. Consciente des apports et des limites de la démarche, Mme Daigle s’apprête à entamer la consultation la tête sur les épaules malgré tout.
«On est conscient que le processus a été précipité et qu’il s’inscrit dans une dynamique où on se doit d’être vigilant au niveau du potentiel de récupération politique, appuie-t-elle. En même temps, on a choisi d’y participer parce que c’est fondamental de parler de ces choses-là pour qu’elles soient dans l’agenda public».

Un cadre encore flou
Pour l’organisme qui travaille à la prise de parole des citoyens pour faire tomber les obstacles structurels de l’exclusion, il était naturel de déposer une candidature auprès de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse pour organiser les consultations.
«Cela rejoint notre démarche, on a déjà une équipe dédiée à ce type de recherche et on est en mesure d’aller chercher des témoignages de façon éthique et respectueuse», partage Mme Daigle qui n’aurait pas posé de candidature sans cette expertise préalable.
Jouissant de «beaucoup de flexibilité» et d’une «belle latitude», Paroles d’excluEs a développé sa propre méthodologie de  collecte de témoignages.
L’organisme collaborera avec d’autres associations du milieu pour tenir des rencontres individuelles et des groupes de réflexion avec les personnes qui se seront identifiées volontairement.
Sans être nécessairement enregistrés, les entretiens se feront dans un milieu où les participants seront «totalement libres de paroles», et pourront ne pas être identifiés par la suite.
Ils auront lieu dans les bureaux de Paroles d’excluEs et des organismes partenaires, et «pourquoi pas dans le salon des participants», suggère Mme Daigle. «Notre approche est d’être là où les gens sont», affirme-t-elle. Mais seule l’équipe de recherche de Paroles d’excluEs sera habilitée à recueillir les témoignages.
Une proximité avec les personnes appelées à témoigner qui est décriée, notamment par la Coalition Avenir Québec (CAQ) et le Parti Québécois (PQ).

Des OBNL critiqués
Après avoir demandé, tout comme la CAQ, l’annulation pure et simple de la consultation, le chef du PQ, Jean-François Lisée a récemment accusé les organisations retenues d’être à la fois «juges et parties», dans ce dossier, se demandant si ce n’était pas «le contraire d’une consultation ouverte et neutre».
Mais cette question, Mme Daigle ne l’appréhende pas sous le même angle. Pour elle, le fait que la consultation soit décentralisée et portée par des groupes qui sont directement sur le terrain est «justement l’élément intéressant» de la formule actuelle.
Selon elle, cette notion d’impartialité des OBNL est un faux débat puisqu’elle estime que la consultation prend déjà un positionnement dans son orientation de départ. «On n’est pas dans une enquête large qui cherche à explorer la perception de l’ensemble des Québécois sur le racisme. Cette consultation cherche spécifiquement à rejoindre des gens qui ont vécu des expériences liées au racisme systémique; donc le choix des organisations permet justement d’aller rejoindre les premiers concernés qui sont malheureusement sous représentés dans ce débat.»
Interrogée à sujet, Carole Poirier, la porte-parole péquiste en matière d’immigration et de communauté culturelle, a réitéré la position de son parti en clamant que la consultation se résumait à «un procès des Québécois».
«L’idée même de dire cela est en soi une phrase obscène, a réagi Haroun Bouazzi, en pesant ses mots. D’abord elle nous passe pour des traitres à la nation mais en  plus elle nous exclut de notre identité québécoise, donc en soit cette phrase fait partie du racisme systémique», assure le coprésident de l’Association des Musulmans et des Arabes pour la Laïcité au Québec.

Comme les 30 autres organismes sélectionnés à l’échelle provinciale, Paroles d’excluEs collectera les témoignages dès le mois d’octobre pour remettre son rapport à la Commission en novembre.

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