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Présidentielle américaine: Tom et les méchants

Photo: Mathieu Massé/Métro
Matthieu Massé et Isabelle Bergeron - Textes et Photos

Ils pLOGO Une présidentielle à véloarcourent les États-Unis sur deux roues, du Vermont jusqu’à la Floride, pour tâter le pouls des Américains en cette saison électorale. Voici le troisième texte d’une série de quatre à paraître dans Métro d’ici l’élection présidentielle du 8 novembre, écrits par deux reporters à vélo. Aujourd’hui, ils nous présentent Tom Baum, un militant pro-Trump.

 [Ajout de la rédaction: Ce reportage a été réalisé avant la diffusion d’une vidéo où on entend Donald Trump tenir des propos vulgaires envers les femmes, et avant les accusations d’attouchements sexuels.]

La famille Baum soutiendra Donald Trump le 8 novembre prochain. C’est dit. La table est mise. Si c’est en masses déchaînées, bruyantes et souvent effrayantes que les partisans du candidat républicain sont souvent dépeints, tout est très différent lorsqu’on se retrouve sous leur toit, à discuter calmement.

Dans sa cuisine, devant un bol de chili, Tom expose son pistolet Glock 30 mm et son semi-automatique M4, de marque Colt. «Je sais que j’aurais pu acheter une marque fabriquée ailleurs dans le monde pour beaucoup moins cher, mais les Colts sont des armes américaines et je leur fais confiance.» Il ajoute en chuchotant, un regard vers la cuisine, où sa femme Julie est occupée: «En fait, je suis prêt à payer plusieurs centaines de dollars supplémentaires juste pour ça.»

Tom garde toujours son pistolet chargé dans sa table de nuit. C’est pour s’occuper des «méchants». Les bad guys. Il nous explique que les munitions spéciales qu’il insère dans son chargeur ne passent pas au travers des murs. Il ne voudrait pas blesser accidentellement ses enfants, ou pire… Ces munitions servent à arrêter les intrus. Au moment de la détonation, la balle s’éparpille, un peu comme avec un fusil à pompe. «Avec ça, c’est certain que le méchant ne va pas loin», affirme le père, confiant.

«On ne veut surtout pas d’un autre Obama. C’est le pire président qu’on ait jamais eu. Il faut que les choses bougent!» – Tom Baum, vétéran de l’armée américaine devenu infirmer à Lancaster, en Pennsylvanie.
M. Baum votera à contrecœur pour Donald Trump, le 8 novembre prochain.

En sécurité
C’est près d’Ephrata, dans le sud-est de la Pennsylvanie, que sa famille est installée, au cœur de ce qu’on appelle le Amish Country. Tom est dans la réserve de l’armée américaine depuis plus de 15 ans. Sa principale occupation se trouve toutefois à l’hôpital de Lancaster, où il est infirmier.

La «semi-campagne», comme il le dit. Pas un endroit où on s’attendrait à se faire cambrioler à tout moment. Les petites maisons s’alignent et se ressemblent. Des pancartes Trump-Pence ici et là.

Toujours pas de pancartes Clinton-Kane.

Mais Tom fait tous les efforts pour que nous nous sentions en sécurité dans sa demeure. «Nous avons aménagé une pièce dans la maison uniquement pour les cyclistes que nous accueillons. Faites comme chez vous! La porte se verrouille si vous voulez. La maison des voisins de votre côté est vide depuis des années, donc pas d’inquiétude!»

Il ajoute, comme pour nous rassurer encore une fois: «Pas d’inquiétude à avoir, la maison est pleine de fusils!»

Tom Baum

Une traîtresse ou un asshole?
C’est Tom qui aborde le sujet politique. «Vous êtes journaliste, vous voulez sûrement parler de politique?»

«Le problème avec cette campagne, c’est que les gens n’ont aucune option vraiment intéressante. Je vais voter pour Donald Trump, même si je sais très bien que c’est un asshole! Je le déteste, mais je n’ai pas vraiment le choix. C’est ça ou bien la traîtresse.»

Pour Tom, l’enjeu le plus important est celui des armes à feu. Il sait qu’Hillary Clinton, si elle est élue, ira dans le même sens que Barack Obama. Les Américains n’en peuvent plus du statu quo, assure-t-il. Ils veulent un chambardement de la politique habituelle. «On ne veut surtout pas l’un autre Obama. C’est le pire président qu’on ait jamais eu. Il faut que les choses bougent!» D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle il soutient Donald Trump. Même s’il déteste le personnage, il préfère voir les choses changer.

«Hillary est une traîtresse. Elle ment sans arrêt et paraît complètement opaque.» Il mentionne, entre autres, les rencontres obscures qu’elle organisait avec des officiels de gouvernements étrangers alors qu’elle occupait le poste de secrétaire d’État lors du premier mandat de Barack Obama. «Sans parler des fameux courriels! Elle s’en sort toujours.»

Le vote de Tom Baum ira au parti républicain, mais il reconnaît que son parti n’est plus ce qu’il était. «Les années de Reagan sont terminées, ça, c’est certain! Le parti n’est plus que chicanes d’idéologies. C’est comme ça qu’on se retrouve aujourd’hui avec un homme comme Trump», concède-t-il, un peu déçu.

Tom Baum

Séance de tir
Quand il s’exprime au sujet des armes à feu, Tom est tout sauf agressif. Il en parle comme d’un hobby régulier. Il explique les différentes régulations des armes à feu en Pennsylvanie. «Ici, on peut arborer une arme à feu ouvertement, sans permis. Tout dépend du type d’arme et si on veut la cacher. Si on désire transporter une arme incognito, on doit demander un permis en conséquence.»

Tirer est une activité normale, et pour lui, il est important que les membres de sa famille sachent se servir d’une arme. Ils s’exercent tous à l’occasion. Julie et sa fille Caroline ne se rendent pas au stand de tir très souvent, mais elles peuvent aisément utiliser une arme à feu en cas de besoin.

«Je ne crois pas que de resserrer les règles sur les armes à feu améliorerait quoi que ce soit en matière de criminalité, analyse Tom. Les gens, qui possèdent un permis pour toutes leurs armes, mettent aussi le registre à jour quand ils en vendent une. Ce sont des gens comme moi, qui aiment les armes à feu: les bons gars! Clairement pas les criminels, qui eux, vont en acheter sur le marché noir. Il n’y a pas d’enregistrement sur le marché noir!»

Le port d’arme est interdit dans les écoles, les bars et la plupart des établissements gouvernementaux. Par contre, pour le réserviste de l’armée, la présence d’armes dans les écoles, si elles sont portées par des personnes désignées, permettrait d’éviter des drames. Il ajoute que les écoles deviennent des cibles faciles puisque les gens mal intentionnés savent très bien qu’ils auront le champ libre.

La question visant à savoir si nous avons déjà utilisé une arme émerge de la discussion. La réponse est «non». «Pour se prononcer, il faut au moins savoir de quoi on parle. Nous allons tirer demain. Vous pourrez voir par vous-même.»

Après une séance de tir, c’est sans pression et sans jugement qu’il reprend l’arme des mains d’Isabelle, mal à l’aise après deux coups de feu.

Un amalgame entre Trump, violence et armes à feu reste facile, mais une contradiction saute aux yeux. Avec tout cet attirail dans la maison et l’importance de la sécurité dans son logis, quelle logique pousse le père de famille à accueillir de purs inconnus à l’intérieur même de sa maison?

Pas de contradiction pour Tom. «Honnêtement, vous n’êtes pas une menace, s’exclame-t-il, et les méchants, règle générale, ne parcourent pas les routes à vélo. Il n’y a pas assez de place dans vos bagages pour vous sauver avec ma télé. Pourquoi je priverais ma famille de toutes ces magnifiques rencontres?»

Amoureux des armes, certes, mais également de la raison.

Ce reportage a été réalisé avant la diffusion d’une vidéo où on entend Donald Trump tenir des propos vulgaires envers les femmes, et avant les accusations d’agression sexuelle publiées hier.

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