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Réfugiés: Terres d’accueil, terres de racisme

BICSKE, HUNGARY - SEPTEMBER 04: Migrants protest outside a train that they are refusing to leave for fear of being taken to a refugee camp from the train that has been held at Bicske station since yesterday on September 4, 2015 in Bicske, near Budapest, Hungary. According to the Hungarian authorities a record number of migrants from many parts of the Middle East, Africa and Asia are crossing the border from Serbia. Since the beginning of 2015 the number of migrants using the so-called Balkans route has exploded with migrants arriving in Greece from Turkey and then travelling on through Macedonia and Serbia before entering the EU via Hungary. The massive increase, said to be the largest migration of people since World War II, led Hungarian Prime Minister Victor Orban to order Hungary's army to build a steel and barbed wire security barrier along its entire border with Serbia, after more than 100,000 asylum seekers from a variety of countries and war zones entered the country so far this year. (Photo by Matt Cardy/Getty Images) Photo: Getty Images
Daniel Casillas - Metro World News

À la veille de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale, demain, Métro s’est intéressé aux consé­quences de ce problème sur les réfugiés.

Depuis le début de l’année, plusieurs organisations humanitaires ont remarqué une hausse des cas de racisme envers les réfugiés cherchant asile en Europe. Les données de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) montrent que la violence, le harcèlement, les menaces et les discours xénophobes sont très fréquents en Europe et émanent autant des autorités étatiques et des compagnies privées que des individus.

Même le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) affirme avoir reçu plusieurs rapports inquiétants d’enlèvements, de tortures, d’extorsion, d’abus sexuels et physiques le long des routes utilisées par les migrants.

Les experts du monde entier s’entendent pour dire qu’on assiste à une croissance marquée de la xénophobie et du racisme contre ces groupes vulnérables.

«La rhétorique de peur et de xénophobie a des effets réels sur le terrain. Le climat politique a un effet direct sur la façon dont les réfugiés sont perçus et accueillis, soutient Oliver Schmidtke, directeur du  Centre d’études internationales de l’université de Victoria, en Colombie-Britannique. La colère des partis populistes envers les réfugiés et les migrants se transforme en gestes de discrimination, si ce n’est de violence, contre ce groupe.»

Les organismes internationaux préviennent aussi que la violence contre les réfugiés n’est pas seulement physique, mais également virtuelle, par exemple sur les réseaux sociaux.

«On a des preuves que la violence envers les demandeurs d’asile est fréquente sur le web, mais les enquêtes sont difficiles à mener», explique un rapport de la FRA publié à la fin 2016.

Le document indique un manque flagrant d’informations sur les incidents violents visant les migrants, les pays de l’Union européenne ne compilant pas de telles données, ou refusant de les partager.

«Respectez l’être humain au lieu de le haïr. Choisissez l’amour, pas le racisme.» –Mustafa Jano, un artiste numérique syrien qui réside dans un camp de réfugiés en Suède

La crise des réfugiés en Europe ne semble pas devoir se résorber, et le HCR s’attend à ce qu’elle se poursuive en 2017. C’est pourquoi l’organisme a demandé aux États membres de cesser toute action aux frontières qui n’est pas en accord avec les lois internationales et européennes, comme le refoulement, le déni d’accès aux procédures de demande d’asile et l’utilisation de la violence.

Les gouvernements ont également un rôle très important dans lutte contre la violence et le racisme envers les réfugiés.

«Lorsque les leaders gouvernementaux appuient ouvertement l’accueil et l’aide aux réfugiés, ça renvoie l’image d’un comportement positif valorisé par le système. Les attitudes et les comportements dans la société en général deviennent plus positifs par la suite», croit Victoria Esses, directrice du Centre de recherche sur l’immigration et les relations ethniques de l’université Western, en Ontario.

La société a aussi un rôle primordial à jouer dans ce processus. Et d’après Jeff Crisp, expert des questions migratoires à l’université d’Oxford, en Grande-Bretagne, tous les citoyens peuvent agir pour combattre le racisme visant les migrants.

«Les gens ne devraient pas voter pour des politiciens qui s’appuient sur un programme anti-réfugiés, dit-il. Ils ne devraient pas consulter les médias qui répandent des discours haineux et qui ont une couverture biaisée des questions migratoires. Les citoyens doivent agir de façon exemplaire en traitant les immigrants avec respect.»

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«La crise ne disparaîtra pas»

Métro s’est entretenu avec Jeff Crisp, spécialiste des réfugiés, des migrations et des questions humanitaires au Centre d’études sur les réfugiés de l’université d’Oxford.

La crise des réfugiés est-elle encore un problème majeur?
La crise ne disparaîtra pas. Les Nations unies et la communauté internationale semblent incapables d’empêcher l’apparition de nouveaux conflits armés et de mettre fin aux crises actuelles. La sécheresse, la famine, les désastres naturels et les conséquences du changement climatique vont certainement provoqués le déplacement de beaucoup d’autres personnes dans les années à venir. Si ces populations sont incapables de mener une vie paisible et prospère dans leurs pays d’origine, elles vont chercher un refuge et un avenir meilleur ailleurs.

Les réfugiés sont-ils victimes de discrimination raciale?
Oui, la xénophobie est une force puissante dans plusieurs régions du monde, et les migrants sont fréquemment discriminés en fonction de leur race, de leur religion, de leur nationalité ou de leur genre. Les jeunes hommes de pays musulmans ont particulièrement de la difficulté à obtenir un traitement juste dans leurs demandes d’asile et à être acceptés comme des membres à part entière de leur société d’accueil.

Considérez-vous que le décret du président américain Donald Trump contre les migrants de six pays à majorité musulmane soit un acte de discrimination?
Oui, il y a clairement un aspect discriminatoire dans le décret de M. Trump. Durant la campagne présidentielle, il avait ouvertement annoncé son intention d’interdire l’entrée aux musulmans sur le sol américain, et c’est exactement ce qu’il fait. Cette décision est très décevante, étant donné le nombre de réfugiés dans le monde qui cherchent une terre d’asile.

Qu’est-ce que les gouvernements devraient faire pour combattre le racisme que subissent les réfugiés?
Les gouvernements ont le devoir de ne pas démoniser les réfugiés et de ne pas s’en servir comme bouc émissaire. Ils doivent également déclarer devant l’électorat que les migrants sont les bienvenus et qu’ils sont des membres à part entière de la société. Malheureusement, dans plusieurs régions du monde, le gouvernement et l’opposition sont en compétition dans l’usage d’un langage négatif pour dépeindre les réfugiés et dans les mesures à prendre pour s’en débarrasser. Des chefs d’État comme Angela Merkel et Justin Trudeau ont toutefois montré qu’il est possible d’afficher un leadership politique clair en faveur des réfugiés et contre le racisme. Leurs efforts devraient être applaudis et reproduits ailleurs. »

À lire aussi: 4 violences infligées aux réfugiés

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