Soutenez

Les filles, le génie et la testostérone

Photo: Métro

Dans un collège américain de la Californie, 56% des diplômés en génie sont de jeunes femmes. Comment cela est-il possible?

Les filles sont plus nombreuses que les garçons à fréquenter l’université, mais certaines disciplines sont encore l’apanage de ces derniers, soit l’informatique et le génie. Tel que mentionné dans une chronique précédente, alors que les jeunes femmes représentent environ 66% des diplômés universitaires, ce pourcentage n’est que de 39% en sciences appliquées.

Or, il semble que la rectrice du Harvey Mudd College, un établissement juste à l’extérieur de Los Angeles, ait trouvé une bonne partie de la solution. Dans cet établissement, 56% des diplômés des programmes de génie sont de jeunes femmes.

La rectrice Maria Klawe a réussi ce tour de force en s’en prenant à ce qu’elle nomme la culture de la testostérone. Durant une entrevue offerte au Huffington Post, elle a dénoncé la compétition intense vécue par les étudiants durant leurs études en génie. Chacun doit prouver qu’il a le droit d’être là en se montrant au moins aussi brillant, sinon plus, que les autres. Les étudiants se mesurent donc constamment les uns aux autres et sont exposés au ridicule s’ils expérimentent des difficultés à suivre le rythme d’apprentissage. Cette recherche constante de la prédominance rappelle les sports de contact que beaucoup de jeunes hommes affectionnent et qui sont associés à des taux élevés de testostérone. Or, ce sont souvent ces mêmes jeunes qui s’inscrivent en génie à l’université.

Maria Klawe fait valoir, avec raison, que beaucoup d’étudiants, filles et garçons, ne sont pas à l’aise dans un tel climat d’apprentissage et préféreront décrocher que de continuer à le supporter. Ce serait particulièrement vrai des filles, qui préfèrent de beaucoup les travaux d’équipe centrés sur un problème à résoudre à la compétition intense à laquelle se livrent bon nombre de leurs pairs.

C’est donc en introduisant des modes d’apprentissage collaboratif centrés sur la résolution de problèmes que Maria Klawe réussit à mener jusqu’au diplôme une proportion aussi impressionnante de jeunes femmes. Dans son collège, tous les étudiants travaillent ensemble et se soutiennent afin de compléter leurs apprentissages. Le défi d’avoir à prouver qu’on a le droit d’être là est remplacé par celui de résoudre par la collaboration des problèmes intéressants et de se préparer ensemble à la profession d’ingénieur. La culture de la testostérone est remplacée par une culture d’entraide qui a comme objectif la réussite du plus grand nombre.

Certains diront que la profession d’ingénieur est elle-même caractérisée par une compétition intense et que la formation ne fait donc que refléter la réalité que devront affronter les diplômés. Peut-être, mais il est aussi bien connu que le niveau de décrochage est important en génie; des données de la CRÉPUQ permettent de l’évaluer à plus de 22%. Une approche plus coopérative, moins compétitive, n’aiderait-elle pas à le réduire?

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.