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Une chronique, 200 tranches

Photo: Métro

Il me semble que c’était hier que je rédigeais ma 100e chronique pour le journal Métro… et me voilà en train de travailler sur la 200e!

Bien des choses sont demeurées pareilles, et pourtant, bien d’autres ont changé. Mes cheveux ne sont plus aussi noirs, et ça, c’est mauvais. Je pèse un peu moins, ça, c’est bien! Je suis devenu plus cynique avec l’âge… bon ou mauvais? Je n’en suis pas sûr. Mais la principale raison pour laquelle j’écris, c’est pour parler de la santé mentale et de la nature humaine. Et le seul changement qui compte vraiment, c’est de savoir si notre compréhension de la maladie mentale a évolué depuis 2005, quand j’ai commencé à écrire «La vie en tranches».

J’écris pour deux raisons. La première, c’est pour démystifier et déstigmatiser les maladies mentales graves, comme la schizophrénie et le trouble bipolaire. Ces maladies peu fréquentes frappent 1 % de la population et s’apparentent aux autres affections neurologiques, comme la maladie de Parkinson, la maladie d’Alzheimer ou l’épilepsie, mais elles sont perçues différemment par le grand public. Je pense que c’est parce qu’il est difficile de déterminer où la personne se limite, et où la maladie commence.

Si une crise cardiaque fait perdre connaissance à un conducteur et s’il emboutit un signal d’arrêt, nous ressentirons de la compassion pour lui et pour tout passant qui sera blessé ou tué dans cet accident. Mais si un dérèglement de la chimie du cerveau pousse une personne à sauter dans un puits ou à tuer quelqu’un, nous aurons beaucoup plus tendance à blâmer la personne que la maladie. La mort à la suite d’un cancer nous incite à porter du rose, à faire un parcours en vélo ou à prononcer des discours en vue de recueillir des fonds destinés à la recherche. La mort à la suite de la schizophrénie est habituellement accueillie par des hochements de tête et un silence confus.

Saviez-vous qu’une personne atteinte de schizophrénie risque 100 fois plus de se suicider qu’une personne qui n’en est pas atteinte? Combien de vies sont marquées à jamais par un seul suicide? Et pourtant, à quand remonte la dernière fois où vous avez marché pour recueillir des fonds destinés à la recherche sur la schizophrénie?

La deuxième raison pour laquelle j’écris, c’est pour aborder des difficultés psychologiques beaucoup plus courantes, comme la dépression, l’épuisement professionnel, les crises de panique ou les obsessions. Environ 20% des gens éprouvent ces problèmes à un certain moment de leur vie. Mais si vous lisez cette chronique régulièrement, vous savez que j’utilise rarement ces termes. Je préfère parler des gens et des expériences communes qui ont des effets sur nos perceptions, nos craintes et nos humeurs. Nous éprouvons tous les mêmes émotions. Ces états mentaux ne sont pas vraiment des «maladies». La grande majorité des gens qui souffrent d’anxiété débilitante ou de dépression traversent la même chose que nous, mais à un degré extrême.

Bien des gens me disent qu’ils ont l’impression que j’écris à leur sujet, dans une chronique en particulier. Je pense que, si nous pouvons nous identifier aux expériences des autres, nous constaterons rapidement que nous sommes tous faits du même bois.

Nous pouvons en conclure deux choses: premièrement, cela nous aide à nous sentir plus normaux et à moins nous étiqueter à tort. Et deuxièmement, cela nous aide à comprendre les autres qui éprouvent des difficultés. Cela est essentiel pour faire tomber les barrières qui empêchent les gens de demander de l’aide quand ils en ont besoin, ainsi que pour éliminer les préjugés à l’égard des personnes qui paient déjà un prix élevé.

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