Sainte-Catherine Ouest: une ébauche en quête d’audace

Le concept de réaménagement de la rue Sainte-Catherine Ouest, dévoilé la semaine dernière à l’Astral, est l’équivalent, pour moi, d’une nouvelle version de l’iPhone.

Ça ne réinvente rien: on modifie le format d’un centimètre ou deux, et on fait tout un tapage médiatique pour convaincre le public d’acheter le produit.

C’est à peu près ce qu’a fait l’administration Coderre avec son plan de réaménagement de la rue Sainte-Catherine, qui se résume à la mettre au goût du jour. On élargira les trottoirs de façon permanente sur à peine 300 mètres. On verdira avec quelques arbres ici et là. On ajoutera du mobilier urbain entre les boutiques et les places de stationnement. Le minimum, quoi! Ah oui, il y aura également un accès au réseau Wi-Fi.

L’innovation, quant à elle, se résume à deux éléments bien précis: des trottoirs chauffants pour la période hivernale et un accès souterrain aux infrastructures (aqueducs, Gaz Métro, Hydro-Québec), ce qui évitera une chirurgie à cœur ouvert de l’artère en cas de pépin. Deux idées brillantes, il faut l’avouer.

Mais pour le reste, je reste sur ma faim. Avec une facture estimée à 95M$, j’espérais davantage comme levier économique pour aider Sainte-Catherine à traverser les cinquante prochaines années. On a besoin d’un concept fort, capable d’arracher des parts de marché à la compétition, soit le Dix30, le Centropolis et un éventuel Quinze40. Réussira-t-on cet exploit avec cette proposition?

J’en doute. Après tout, l’expérience du visiteur ne sera réinventée qu’en période de piétonnisation, soit l’été, durant quelques semaines. Le reste de l’année, les voitures y seront presque aussi nombreuses, les trottoirs de 4,25m de large déborderont toujours, et les cyclistes zigzagueront encore dangereusement dans la circulation. Il n’y aura pas plus de terrasses, pas plus de modules de jeux pour enfants afin d’y attirer les familles.

Sans compter qu’il manque, jusqu’ici, un élément crucial à ce projet de revitalisation: une véritable signature montréalaise. Ce concept d’aménagement générique, issu du cabinet d’architecture Daoust Lestage, ne laisse pas beaucoup de place à la créativité. D’ailleurs, on dirait ni plus ni moins un «copier-coller» de ce que la firme a présenté dans un concours américain pour la revitalisation d’une artère commerciale de Minneapolis… en 2013.

Le réaménagement de Sainte-Catherine, proposé par Daoust Lestage, ressemble à ce que la firme a présenté dans un concours américain, en 2013./Nicollet Mall Project.

Certains parleront de sobriété à propos de ce concept. Pour moi, c’est un manque d’audace. J’aurais aimé y voir un élément distinctif, aussi petit soit-il, qui permettrait à n’importe qui dans le monde de reconnaître notre Sainte-Catherine en un clin d’œil. Une couleur de pavé, un motif artisanal incrusté dans les trottoirs, un mobilier hors norme. Peu importe. Ce petit effort d’imagination pourrait faire toute la différence en créant une nouvelle carte postale pour Montréal, un lieu incontournable où déambuler pour quiconque sera de passage dans notre belle métropole.