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Parce qu’on est en 2015

Governor General David Johnston (third from right) and Prime Minister Justin Trudeau (third from left) pose with members of the Liberal cabinet following a swearing-in ceremony, Wednesday Nov.4, 2015 in Ottawa. THE CANADIAN PRESS/Adrian Wyld Photo: Adrian Wyld/THE CANADIAN PRESS

«Pourquoi était-ce si important pour vous d’avoir un cabinet paritaire?» a-t-on demandé à Justin Trudeau après la cérémonie d’assermentation. «Parce qu’on est en 2015», a-t-il répondu du tac au tac.

Pourquoi un premier ministre doit-il encore se justifier de nommer autant de femmes que d’hommes à son conseil? Parce qu’il y en a encore qui, en 2015, craignent que l’impératif de la parité mette en péril celui de la compétence. Le journal satirique The Beaverton titrait ironiquement qu’une nomination de 50% de femmes conduisait à une augmentation de 5000% de ceux qui se soucient soudainement du mérite.

En effet, la réflexion sur la méritocratie semble refaire surface surtout quand il est question de poser des gestes concrets pour améliorer la représentativité des femmes en politique. Comme s’il allait de soi qu’en nommant autant d’hommes que de femmes, on favorisait forcément des personnes moins compétentes. Et comme si des hommes incompétents ne réussissaient pas à se faufiler dans les sphères décisionnelles grâce à leurs privilèges.

Cette réflexion sur la méritocratie est simpliste, particulièrement en ce qui a trait à la composition d’un conseil des ministres, un exercice des plus complexes. Imaginons un cabinet formé à 70% de ministres provenant de l’Ontario. On crierait au scandale. Le premier ministre expliquerait que, bien qu’il eût préféré que chaque province soit bien représentée, 70% des personnes les plus compétentes se trouvaient, par hasard, en Ontario. Heureusement, ce n’est pas ainsi que ça se passe. Le choix des ministres est toujours le fruit de nombreux compromis. La représentativité des provinces, notamment, est un enjeu très important. On ira jusqu’à nommer un non-élu ministre lorsqu’un parti ne compte pas de député dans une province.

Maintenant, imaginons que la tradition ait toujours voulu qu’il y ait 70% de ministres provenant de l’Ontario, et qu’un nouveau premier ministre décide de rompre avec le statu quo en sélectionnant un nombre proportionnel de ministres par province. Craindrait-on que cela mette en péril la méritocratie? Non. On se réjouirait qu’enfin chaque province soit adéquatement représentée.

En 2015, réjouissons-nous que les femmes soient représentées à leur juste valeur. Et qui plus est, que cette représentativité s’étende, dans le cabinet Trudeau, aux membres des Premières Nations et des communautés culturelles, et aux personnes en situation de handicap.

En quoi une paralympienne serait-elle moins apte à diriger le ministère du Sport que Denis Coderre? Comment une avocate ayant une impressionnante feuille de route en matière de relations internationales pourrait-elle faire pire qu’un climatosceptique à l’Environnement? Qu’est-ce qu’une représentante des Premières Nations peut apporter à la Justice quand le dernier titulaire de ce ministère croyait que les femmes étaient trop occupées par leurs enfants pour devenir juges? Quant à Mélanie Joly, on peut l’accuser de bien des défauts, à commencer par sa propension à ne pas tenir sa parole. Mais s’il y a une chose qu’on ne peut lui reprocher, c’est son bilan politique: elle n’en a pas! Laissons donc la chance à la coureuse.

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