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Quand le savoir prend sa retraite

Photo: Métro

Quand un employé se retire du marché, c’est aussi l’expérience qui s’en va.

«De plus en plus de cadres seniors prennent leur retraite sans que les entreprises ne gèrent le transfert des compétences tacites», signale Jacqueline Codsi, gestionnaire RH et consultante-coach auprès des entreprises. Une tendance inquiétante qui touche tant le secteur privé que public. Pourtant, de nombreuses recherches insistent sur l’importance de ce savoir tacite.

Des connaissances tacites?
Une connaissance de la culture organisationnelle, un bon réseau de contacts et un savoir-faire sont autant de compétences dites tacites, c’est-à-dire acquises avec le temps. Ces connaissances, longtemps sous-estimées, constituent pourtant des «ingrédients informels» de la recette du succès pour une organisation.

Mais les entreprises n’ont pas toujours de systèmes pour capitaliser leurs connaissances tacites et les intégrer à des supports d’apprentissage. «Les PME n’ont pas les moyens, le temps, voire la réflexion stratégique pour investir dans la capitalisation de ce savoir tacite que détiennent les plus anciens», déplore Moktar Lamari, professeur et directeur du Centre de recherche et d’expertise en évaluation de l’École nationale d’administration publique du Québec.

Un danger potentiel
La capitalisation du savoir tacite est une tâche que la théorie économique confie à l’État, mais «le gouvernement n’investit pas pour que ce gisement de savoirs acquis au jour le jour soit valorisé et mis à la disposition des générations futures», souligne M. Lamari.

D’ici quelques années, les départs à la retraite des baby-boomers, qui représentent presque le tiers de la main-d’œuvre totale, généreront une forte pression sur l’entrepreneuriat.

M. Lamari s’inquiète aussi pour la productivité et le développement régional du Québec. «Le grand malheur de l’économie québécoise est qu’elle est basée sur un tissu diversifié, mais fondée sur des petites entreprises qui survivent au jour le jour ! On ne peut pas continuer à ignorer la force de ce capital humain, la vitalité des régions en dépend !», lance-t-il.

Le professeur estime même qu’il suffira de ne pas remplacer tous les départs à la retraite pendant de trois à cinq ans pour ébranler la pérennité de nombreuses structures, surtout pour les postes stratégiques avec des employés hautement qualifiés.

«Le capital humain, c’est le plus important dans une entreprise, mais aussi le plus compliqué à constituer.» – Moktar Lamari, professeur et directeur du Centre de recherche et d’expertise en évaluation de l’École nationale d’administration publique du Québec

Un processus à préparer
Malgré le manque de mesures incitatives gouvernementales, les entreprises se sont mises à développer des plans de transfert international en collaboration avec des coachs, comme Jacqueline Codsi. «Je recommande à mes clients d’identifier un plan d’action de transfert le plus tôt possible pour établir des ententes gagnant-gagnant entre les seniors et la jeune relève», indique-t-elle. Pour cette spécialiste des ressources humaines, il est primordial d’agir en amont afin que la démarche soit à la fois valorisante pour le travailleur en fin de carrière et son successeur.

Assurer le relais d’une génération à l’autre ne s’improvise pas. Selon des chiffres communiqués par le cabinet Deloitte, il n’y aurait qu’une entreprise sur trois qui survive jusqu’à la 2e génération; une estimation qui chute à une entreprise sur dix lorsqu’elle atteint la 3e!

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