Des représentants de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL) ont dénoncé mardi le projet de loi 96 promu par le gouvernement de la CAQ.
Ce projet de loi d’une centaine de pages entend revoir en profondeur la Charte de la langue française. Dans un amendement déposé à la fin du mois d’avril, il est prévu que les «ayants droit» dans les cégeps anglophones aient à suivre trois cours «de» français plutôt que trois cours «en» français comme le projet de loi le prévoyait après le dépôt d’un premier amendement par les libéraux. Le projet de loi ne prévoit aucun statut particulier pour les langues autochtones.
L’APNQL se désole de constater que les Premières Nations ont proposé une série d’amendements «pour rendre la loi conciliable avec leurs droits inhérents protégés par la Constitution», mais que ceux-ci aient été «ignorés ou rejetés». L’Association dit également avoir tenté de rencontrer le ministre responsable de la Langue française, Simon Jolin-Barrette, à plusieurs reprises pour discuter de solutions, mais ces demandes demeurent sans réponse.
En conférence de presse, le chef de l’APNQL, Ghislain Picard, a déclaré qu’à ce stade-ci de l’évaluation du projet de loi, ce n’est plus le moment de négocier. Il ne demande ni plus ni moins que les communautés autochtones soient exemptées du projet de loi. «En recevant le rapport Viens en 2019, Monsieur Legault avait dit que “l’État québécois n’imposerait pas ses solutions [aux Premières Nations]”. Or, c’est exactement ce que le gouvernement du Québec est en train de faire aujourd’hui avec le projet de loi n° 96», a-t-il déploré.
À ses côtés, Kahsennenhawe Sky-Deer, la grande cheffe du conseil de la communauté mohawk québécoise de Kahnawake, estime que les impacts sur la vie des Premières Nations seront plus importants que seulement sur leur éducation. «Vous savez, nous essayons d’avancer dans un environnement, à une époque où tout le monde parle de réconciliation. Nous avons essayé de créer une relation avec le Québec, et maintenant, […] cela va à l’encontre de cette relation de nation à nation et de cette relation d’égalité que nous recherchons pour être en mesure d’avoir un dialogue important.»
Nous ne voulons pas voir ce projet de loi aller de l’avant sans aucune forme d’exemption ou de considération des peuples autochtones, de nos langues, de nos cultures qui sont ici depuis des temps immémoriaux.
Kahsennenhawe Sky-Deer, la grande cheffe du conseil de la communauté mohawk de Kahnawake
«L’adoption du projet de loi n° 96 va forcer l’exode de nos étudiants vers d’autres avenues, d’autres écoles à l’extérieur du Québec, craint aussi Ghislain Picard. C’est une ironie renversante, là, que finalement, les premiers occupants du territoire au Québec soient forcés d’aller étudier à l’extérieur de leur territoire, et c’est quelque chose que nous jugeons tout à fait inacceptable.»
«Nous affirmons clairement et d’une voix commune aujourd’hui notre refus absolu de nous soumettre à la loi 96 et à toutes les autres lois portant atteinte à nos droits», soutient aussi le chef de l’APNQL.