Pour cette toute première chronique, on m’a demandé de me présenter. Un petit café, juste vous et moi. Certains me suivent depuis quelques années et me connaissent déjà le plumeau, mais comme il s’agit de notre tout premier rencard, ici, sous cette enseigne, je vais prendre une petite menthe. Enfiler des bas de nylon sous mes collants résille.
Ciel! Ça fait trois fois que je me change!
En fait, me présenter sans me cacher derrière une flamboyante arabesque de Ferrandez ou ce grand moment de télévision lors duquel Julie Snyder a fendu le vent et sacré le camp sur le prélart du Banquier dans une maladroite manœuvre de polka de l’humoriste qui fait les annonces des fromages d’ici n’est pas mince affaire. La fébrilité de ce premier CV parfumé, jadis tendu à la gérante d’une boutique de complets pour dames du Mail Champlain, me gagne de nouveau.
Peut-être s’agit-il simplement de m’exprimer calmement, d’un ton ferme mais détendu, comme le ferait Françoise David. Sans artifices. Le discours qui captive. Le respect qui vient avec la petite blouse de patchwork équitable et la préoccupation citoyenne à la glotte. Françoise ne s’emporte jamais. Et si elle le fait, c’est sur un tapis de yoga, dans une salutation au soleil endiablée avant d’aller abattre quelques kilomètres de marche rapide (et citoyenne).
C’est tout de même formidable, ce qu’on peut obtenir quand on l’exprime posément avec, dans la voix, ce soupçon d’autorité qui déstabilise. Mais une femme, oh! une femme qui s’exprime sans coulisses de mascara ni rouleau à pâte brandi, c’est inhabituel. Et ça fait peur à Mathieu Bock-Côté.
Et Dieu sait que ce Mathieu, en ce premier vendredi, je le désire dans ma petite poche de blouse, à côté de mon bronchodilatateur et de ma petite menthe de secours.
C’est pourquoi, inspirée du flegme de Françoise et de l’humilité de son coiffeur, je tâcherai, chaque vendredi, de vous tirer risette et, qui sait, de vous inspirer. Qu’il s’agisse d’une recette de cipaille ou d’un digne hommage aux huit milliards de boules de papier-cul qui entameront sous peu un formidable périple aquatique de Montréal à Matane en se prétendant chic sous leur nom d’artiste «eaux usées» (visuel de Charmin qui maîtrise la chorégraphie de Single Ladies entre deux courants froids et une seringue), j’y appliquerai la même candeur, le pied pointé.
Je vous retrouve donc dans deux semaines (j’ai la coquetterie de ne pas me faire hebdomadaire), bien coiffée.
La bise.