Montréal

Mardi

Chaque mardi, la journaliste et animatrice Julie Laferrière et l’humoriste, animateur et illustrateur Pierre Brassard posent un regard original sur les usagers du transport en commun.

À l’entrée de la station Laurier, rue Saint-Joseph. Il est 8 h 40.

Nous sommes mardi et la journée sera aussi chargée que le lourd sac qui m’entaille l’épaule droite. Il faut dire que le mardi est, à mes yeux, une journée ingrate.

Il est comme un caillou dans une chaussure, une ombre qui plane sur le tableau des semaines. C’est une journée incertaine, en points de suspension, lors de laquelle il faut faire bonne figure et être alerte alors que notre élan n’est pas encore pris.

Le lundi, lui, jouit de notre clémence; comme on revient tout juste de la fin de semaine, on se sait débordés et un peu décalés. Alors, on se permet, et on concède aux autres, le droit d’être plus lents.

Le mercredi, lui, est dynamique. Il se retrousse les manches, inspire le défi. Le mercredi, en fait, c’est un Rocky Balboa qui saute à la corde et peut venir à bout de n’importe quel adversaire.

Les jeudi et vendredi, quant à eux, nous donnent des petites tapes encourageantes dans le dos. Comme des cheerleaders qui baliseraient de leurs joyeux pompons le trajet qui mène à la fin de semaine. Finalement, le samedi, c’est du miel, du chocolat. De la douce langueur. Tout comme le dimanche… sauf pour ceux qui souffrent du «Sunday Blues». Ainsi donc passe le temps, avec ses petits mardis qui détonnent. Surtout en mars et en novembre. Ceux-là, pour des raisons saisonnières, sont encore moins séduisants.

Ce qui nous amène à ce mardi de novembre, où il vente très fort. La porte de la station, pour ceux qui la connaissent, est encore plus lourde que d’habitude. Je le devine à voir les usagers qui me précèdent se battre avec elle.

Devant moi, il y a un garçon d’à peu près 20 ans. Coiffé d’une casquette, il chique une gomme et porte un gros manteau bouffant et chaud.

Il tient la porte et attend patiemment. Comprenant son geste si courtois et si gentil, je presse le pas et le remercie sincèrement.

Puis soudainement, nous sommes en juin.

Et c’est samedi.

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