Montréal

Préposé aux bénéficiaires : enrayer la pénurie

Un préposé aux bénéficiaires regarde au loin dans un couloir de CHSLD

Préposé aux bénéficiaires depuis 2011, Délès Jean étudie maintenant en parallèle de son emploi afin de devenir infirmier.

Afin de rendre la profession de préposé aux bénéficiaires plus attrayante, le ministère de la Santé et des Services sociaux a décidé d’offrir 2 000 bourses de 7 500 $ à des étudiants du programme. Une tentative pour enrayer une pénurie qui perdure.

« Ça vient nous aider, croit Claude Riendeau, directeur du programme de soutien autonomie aux personnes âgées du CIUSSS de l’Est. On est très actif, mais recruter des préposés aux bénéficiaires demeure un enjeu. »

Actuellement, seulement une quarantaine d’étudiants ont pu être recrutés au CIUSSS de l’Est à travers ces nouvelles bourses. Les bénéficiaires doivent en plus fournir une disponibilité à temps complet pour les deux années suivant la fin de leurs études.

Au Centre de formation professionnelle Antoine-de-Saint-Exupéry, le directeur, François Lemire, est plus circonspect quant à l’utilité de cette nouvelle initiative. « Certains étudiants peuvent recevoir plus d’argent du Programme de prêts et bourses, sans avoir l’obligation de travailler pendant deux ans qui l’accompagne », remarque-t-il. Les deux programmes ne sont d’ailleurs pas cumulables.

Il note également une incertitude au niveau de leur application, alors que de nombreux CIUSSS se font concurrence dans la région métropolitaine. « On a des élèves de Laval, de la Rive-Sud, de Repentigny. Ils ne seront pas nécessairement intéressés à travailler au CIUSSS de l’Est, rappelle M. Lemire. Il y a encore quelque chose à travailler dans la mécanique. C’est peut-être moins approprié ici que ça peut l’être en région. »

Recrutement difficile

Pour M. Riendeau, les bourses ne sont toutefois qu’un outil de plus pour combler le besoin de main d’œuvre. Il estime devoir recruter chaque année environ 600 préposés pour compenser les départs. L’effectif total du CIUSS en compte actuellement 3 017. Un roulement d’employés de près de 20 %.

Il note que les problèmes de recrutement ne concernent pas seulement Montréal, mais se répercutent à l’ensemble de la province, estimant que le CIUSSS de l’Est s’en sort relativement bien, malgré tout. Ce n’est d’ailleurs pas le seul secteur du domaine de la santé au prise avec une pénurie de personnel.

« Présentement, on est dans la même catégorie de personnel que les gens d’entretien ménager, que ceux qui entretiennent les bâtiments ou qui travaillent en cuisine. » – Michel Lemelin, président de la FPBQ

« Pour nous, c’est un bon incitatif pour que davantage de personnes s’intéressent au métier, croit Michel Lemelin, président et directeur général de la Fédération professionnelle des Préposé(e)s aux bénéficiaires du Québec (FPBQ). Depuis une dizaine d’années, je remarque un changement. Je pense qu’il y a eu une prise de conscience que la profession est importante. »

Malgré tout, il s’inquiète que la pénurie actuelle ne soit que la pointe de l’iceberg, alors que de nombreux préposés approcheraient de l’âge de la retraite.

Un métier à valoriser

Délès Jean est préposé aux bénéficiaires depuis maintenant 2011. Il constate une détérioration de ses conditions de travail au fil des années. « Il y a un décalage. Le salaire ne suit pas l’augmentation du coût de la vie. On s’occupe aussi de cas plus lourd qu’avant. Il devrait y avoir plus de préposés, et on devrait avoir davantage de formations pour faire face à ces situations », pense-t-il.

Il croit que les préposés ont beaucoup plus de tâches à accomplir, et qu’il manquerait de personnes sur le terrain pour les réaliser. « Avec cette surcharge de travail, il y a des cas de maladie et d’accidents, et tout ça met les autres préposés dans une situation difficile. On manque parfois de temps pour appliquer notre approche. » Il trouve d’ailleurs démoralisant de voir autant de personnes quitter la profession, alors que celle-ci est en contexte de pénurie.

Pour sa part, M. Riendeau estime que le CIUSSS de l’Est est en mesure d’offrir tous les soins et services prévus. « On planifie plus de personnel qu’on en a besoin chaque jour pour être capable de donner les services même avec les absences, juge-t-il. Il peut y avoir des journées où on est plus en difficulté, mais avec nos structures, l’organisation n’est pas compromise. »

Pour Lemelin, autant les conditions de travail que salarial serait à améliorer afin d’enrayer la pénurie. Il souligne également que le rôle de préposé devrait davantage être reconnu, d’autant que ceux-ci sont maintenant appelés à effectuer des gestes médicaux de bases, tels que prendre la température ou le pouls d’un patient.

« Présentement, on est dans la même catégorie de personnel que les gens d’entretien ménager, que ceux qui entretiennent les bâtiments ou qui travaillent en cuisine, se désole-t-il. Je crois qu’une reconnaissance officielle de la profession changerait la façon dont on la perçoit, et que davantage de personnes pourraient s’y intéresser », remarque-t-il.

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