Des organismes s’inquiètent d’un possible renforcement de la présence policière dans le square Cabot, un secteur fréquenté par de nombreuses personnes en situation d’itinérance, a constaté Métro.
L’arrondissement de Ville-Marie a annoncé récemment le déploiement de diverses actions visant à améliorer la «cohabitation sociale» dans le quartier Peter McGill et aux alentours du square Cabot, un parc que côtoient de nombreux sans abri, notamment d’origine autochtone. Celles-ci comprennent la création d’une brigade composée de deux médiatrices spécialisées dans les questions reliées à l’itinérance. Elle ont comme rôle d’écouter les préoccupations des résidents et des commerçants et de servir de pont avec les policiers et les différents services de l’arrondissement.
«Le fait qu’il y ait une tentative de prioriser la médiation à l’intervention policière, c’est une bonne mesure», estime le coordonnateur de Résilience Montréal, David Chapman, en entrevue à Métro. Celui-ci intervient quotidiennement auprès de nombreux sans-abri du square Cabot qui bénéficient des services psychosociaux et alimentaires du centre de jour.
Présence policière
L’arrondissement a d’autre part décidé de renforcer dans les derniers jours la présence policière «au square Cabot et ses environs», a confirmé la Ville à Métro. Une décision que décrie M. Chapman.
«S’il y a beaucoup de policiers dans le square, ça risque d’avoir comme effet de faire fuir les personnes en situation d’itinérance à l’extérieur du parc», prévient-il.
La pandémie a fait augmenter le nombre de personnes en situation d’itinérance au square Cabot alors que plusieurs refuges traditionnels ont limité leur capacité ou fermé leurs portes temporairement, attisant les tensions entre les sans-abri et les résidents du voisinage.
«Des citoyens vont appeler la police fréquemment pour se plaindre qu’il y a des personnes sans-abri qui transportent des sacs dans le parc», constate M. Chapman. Une situation qui survient alors que plusieurs organismes déplorent les enjeux de profilage racial et social au Service de police de la Ville de Montréal. Pas moins de 17 policiers s’étaient d’ailleurs déplacés au début du mois de mai à la suite d’un appel concernant une femme autochtone du square Cabot en détresse psychologique, une intervention jugée excessive par plusieurs organismes qui ont depuis porté plainte.
«Les sans-abri sont en mode survie. Ils essaient juste de survivre. Donc, quand on met quelqu’un en position de pouvoir là, qui peut t’arrêter et te donner des amendes, c’est très difficile», soulève la directrice du Foyer pour femmes autochtones de Montréal (FFAM), Nakuset.
Une présence policière «évolutive»
Par écrit, la Ville a indiqué avoir augmenté la présence policière dans le secteur «pour pallier les plaintes des citoyens» reliées notamment à des «incivilités» et à une «baisse significative du sentiment de sécurité». Elle assure d’ailleurs que la présence policière dans le secteur est «évolutive» afin de s’adapter aux besoins des résidents du secteur.
Une bonification de l’animation des espaces publics du quartier est aussi prévue cet été, indique la Ville.
«Ça peut aider le voisinage, mais on n’aide vraiment pas les sans-abri.» – Nakuset
Prévenir des éclosions
David Chapman craint d’ailleurs que les sans-abri du secteur cessent de respecter les mesures sanitaires en vigueur s’ils décident de quitter le square Cabot en raison de la présence de policiers.
«Si on les fait fuir sous un pont, ils n’auront plus accès à du désinfectant et ne respecteront plus les mesures sanitaires», souligne M. Chapman, qui craint alors que des éclosions de coronavirus surviennent parmi les sans-abri de la métropole.