L’administration de Valérie Plante reconnaît que le service responsable de l’achat et de l’entretien des véhicules de la Ville de Montréal a besoin d’un sérieux coup de barre, au lendemain du dévoilement d’un rapport d’enquête «dévastateur» du Bureau de l’inspecteur général (BIG).
L’opposition officielle a interpellé mardi avant-midi la mairesse de Montréal à cet effet. Dans ce rapport de 49 pages, déposé lundi en séance du conseil municipal, l’inspectrice générale de la Ville, Brigitte Bishop, dresse un portrait sombre des pratiques de gestion de contrats publics du Service du matériel roulant et des ateliers de la Ville, qui gérait l’an dernier une flotte de 8700 véhicules.
On y apprend notamment que ce service a omis à maintes reprises dans les dernières années de respecter le principe de l’appel d’offres, préférant accorder des contrats de gré à gré à des fournisseurs en prétextant une «urgence» qui n’avait la plupart du temps pas lieu d’être.
Plan de redressement
À cet égard, le BIG a entre autres constaté que le service a accordé des contrats totalisant près de 9 M$ à 10 fournisseurs, sur une période de cinq ans, sans effectuer d’appels d’offres. Il s’agit notamment de contrats pour des services de remorquage, l’achat de pièces d’automobiles ainsi que la réparation et la location de machinerie de déneigement.
«Évidemment, on prend cette situation très au sérieux. Et conformément aux recommandations du Bureau de l’inspecteur général, il y a un plan de redressement qui sera établi auprès de ce service-là qui, on le sait, est responsable quand même de l’inventaire de plus de huit mille véhicules de la Ville», a réagi Mme Plante mardi, en ce deuxième jour de la séance du conseil municipal.
Le BIG recommande notamment une meilleure compilation des données sur les fournisseurs de ce service. Ses gestionnaires et employés devraient aussi recevoir une formation adéquate sur le «processus d’octroi de contrats et de gestion contractuelle», indique le document.
«Ce ne sont vraiment pas des actions qu’on tolère […] Et bien sûr, ceux qui ont fait preuve de négligence, bien ils n’ont pas leur place au sein de la Ville de Montréal.» -Valérie Plante, mairesse de Montréal
Un rapport dévastateur
En 2018, le Contrôleur général de la Ville avait déjà levé des drapeaux jaunes à l’égard de ce service, qui a effectué des dépenses de plus de 115 M$ l’an dernier. Or, les pratiques évoquées, qui font partie de la «culture d’entreprise» du service, ont continué d’avoir cours, constate Me Bishop.
«On va prendre l’ensemble des actions nécessaires, mais je peux assurer les membres du conseil que des actions ont déjà été faites [à la suite du rapport du Contrôleur général]», a pour sa part affirmé mardi le président du comité exécutif, Benoit Dorais. Il a toutefois reconnu du même souffle que «visiblement, ce n’est pas suffisant».
Dans son rapport, l’inspectrice générale fait état d’une liste de lacunes importantes qui témoignent d’un «dysfonctionnement profond» au sein du service. Elle constate notamment «une absence de suivi formel des dépenses, un dépassement récurrent des seuils d’appels d’offres publics pour de multiples fournisseurs et un non-respect du cadre normatif et des règles du [règlement de gestion contractuelle]». Le BIG n’a toutefois pu établir la preuve de la commission d’actes criminels par des employés du service.
«L’argent ne pousse pas les arbres. Les taxes, les gens les paient en s’attendant d’en avoir pour leur argent, donc ce qu’on demande à nos fonctionnaires, bien c’est de gérer», a lancé M. Dorais, qui a qualifié ce rapport de «dévastateur».
La direction rencontrée
En réponse à une question de l’opposition, M. Dorais a d’ailleurs précisé que des rencontres ont eu lieu «et se poursuivent actuellement» avec le directeur du service en question, Claude Savage, qui est à la barre de celui-ci depuis huit ans.
«Nous allons nous assurer que cette situation est rétablie et que les personnes qui ont des responsabilités seront évidemment tenues responsables, en fonction des gestes qui auront ou non été posés», a ajouté Mme Plante.
Benoit Dorais a par ailleurs assuré que la Ville entend prendre «les actions nécessaires» pour que de telles pratiques douteuses n’aient pas cours au sein d’autres services municipaux.
«De tels gestes, bien sûr, n’ont pas leur place dans n’importe quelle administration publique, et assurément pas dans celle de la Ville de Montréal», a-t-il martelé.