Pour les 12% de Montréalais qui utilisent l’autopartage, trouver une Communauto peut relever d’un parcours du combattant. Disposant de milliers de voitures, cette entreprise est-elle aussi «FLEX» que le nom de son service d’autopartage le laisse présager?
À l’aube d’une fin de semaine qui s’annonce printanière et ensoleillée, bon nombre de Montréalais veulent sortir de la ville pour aller profiter de la nature. Pour ceux qui n’ont pas d’automobile, c’est le temps de se tourner vers Communauto. Or, au moment de réserver une voiture du vendredi 12 mai, à 18h, au dimanche 14, à 18h, l’application Communauto affiche «Aucune disponibilité pour cette période».
Cette situation se répète pour de nombreuses fins de semaine pour les abonnés Communauto, qui sont au nombre d’environ 100 000.
La situation est encore pire lorsqu’on s’y prend à l’avance. Pour la fin de semaine du 19 au 21 mai, il n’y avait aucun véhicule disponible ce 12 mai. Alors, les Communauto sont-elles victimes de leur succès?
L’autopartage est un aspect essentiel pour la réduction de la place de l’auto solo en ville, croit le directeur général de Vivre en ville, Christian Savard. Pour chaque voiture Communauto, on a moins de véhicules solos sur les routes, avance M. Savard. Cela s’explique, car le principal facteur d’utilisation d’une voiture est sa possession. «Si tu as déjà payé ta voiture, tu vas l’utiliser pour la rentabiliser», dit-il.
Faute à la pénurie
«Le problème est dans le nombre de voitures qui, dans les dernières années, n’ont pas pu être mises en service parce qu’on ne les a pas reçues», explique le porte-parole de Communauto, Marco Viviani. Dans un graphique dévoilé à Métro, Communauto montre en effet qu’il est plus difficile, en 2022 et 2023 de réserver un véhicule en station par rapport à 2021 et 2020.
Depuis la pandémie, la pénurie mondiale de voitures affecte plus durement les parcs commerciaux, comme celui de Communauto, qui sont moins priorisés. Cela s’explique, car d’autres entreprises de location – mais pas Communauto – revendent leurs voitures quasi neuves à un prix cassé, ce qui ne plaît pas aux concessionnaires qui vendent les modèles neufs.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la grande flexibilité offerte par Communauto pour les réservations ne fait pas partie du problème de disponibilité. En effet, les réservations peuvent être annulées à tout moment avec Communauto. Un choix que justifie l’entreprise par le besoin de flexibilité des usagers qui, s’ils possédaient un véhicule, pourraient être libres de le prendre ou non. Lorsqu’un utilisateur libère une réservation, celle-ci devient d’ailleurs immédiatement disponible pour un autre usager.
Les FLEX, une solution de rechange?
Les véhicules FLEX – des voitures en libre-service disponibles au sein d’une zone délimitée – ne pouvant être réservés à l’avance, un rapide coup d’œil à l’application Communauto montre que la disponibilité est bien plus importante pour ce type de service, y compris à la veille d’une fin de semaine. M. Viviani recommande l’utilisation du service FLEX si une voiture en station est introuvable. Cependant, durant certaines fins de semaine ou pour certains secteurs, la disponibilité des FLEX peut aussi poser problème.
Communauto n’est pas un service de taxi, rappelle Marco Viviani. «FLEX n’est pas toujours disponible immédiatement, d’ailleurs le taxi non plus, mais il ne coûte pas non plus le même prix qu’un taxi», résume-t-il. Le service veut s’inscrire dans un écosystème plus large pour un transport durable à Montréal, et a pour objectif principal l’abandon de la propriété d’un véhicule.
Selon Communauto, les utilisateurs de FLEX tireront un maximum de bénéfices du service s’ils sont également utilisateurs d’autres modes de transport: marche, vélo, vélopartage, transport en commun, taxi, location traditionnelle. L’entreprise a surtout le souhait d’être utile pour se déplacer plus loin que ce qui est accessible en transport en commun, comme pour aller à un magasin de meubles en banlieue, par exemple.
Le service d’autopartage n’a donc pas pour ambition de remplacer ou de concurrencer aucun de ces modes de transport, mais plutôt d’être une option supplémentaire. L’entreprise ne juge pas ses véhicules forcément utiles pour un déplacement quotidien à l’heure de pointe. Pour preuve, parmi les abonnés Communauto, 70% prennent régulièrement le transport en commun, 30% le vélo et 32% utilisent parfois ou souvent le service de vélopartage BIXI.
Christian Savard pense que Communauto est un maillon important d’un écosystème de transport durable. «C’est grâce à ce système et à tous les autres modes qu’on peut désormais facilement vivre sans voiture à Montréal», se réjouit-il. Pour Vivre ensemble, Communauto est un service qui marche bien et le directeur général constate que le lancement du service FLEX a réellement amélioré la facilité d’utilisation du service.
Disponibilités inégales
Comme l’a constaté Métro, certains arrondissements ont moins de voitures FLEX disponibles par rapport à d’autres. Le vendredi 5 mai, à 17h, il n’y avait aucun véhicule disponible dans le Plateau-Mont-Royal, à Ville-Marie, à Villeray et à Hochelaga-Maisonneuve. Par contre, dans des quartiers plus périphériques, comme Ahuntsic-Cartierville, Saint-Michel, l’est de Rosemont, Mercier ou l’ouest de Verdun, de nombreuses FLEX étaient disponibles.
Il a fallu attendre le dimanche 7 mai au soir pour que de nombreuses Communauto soient disponibles dans les quartiers centraux. En semaine, les véhicules FLEX sont un peu mieux répartis. Cependant, même en semaine, le Plateau-Mont-Royal comptait moins d’offre.
Ces quartiers sont ceux où l’utilisation est plus intensive. «Dans les quartiers centraux, les FLEX sont utilisées plus fréquemment et restent disponibles peu longtemps», précise Marco Viviani. À titre d’exemple, un tiers des résidents du Plateau-Mont-Royal disposent d’un compte Communauto.
Sur une autre carte, fournie par Communauto, on voit clairement que les voitures FLEX sont en réalité très nombreuses dans les quartiers centraux; elles sont tout simplement déjà en utilisation ou réservées. Cette indisponibilité apparente «ne veut pas dire qu’une voiture ne sera pas disponible à proximité dans un laps de temps raisonnable», souligne par ailleurs Communauto. Marco Viviani estime qu’en l’espace de 10 à 30 minutes, une FLEX se libérera à proximité partout à Montréal, presque tout le temps.
Les FLEX ont tout de même des destinations habituelles qui se dessinent au gré des heures de pointe. Communauto analyse deux types de secteurs: les quartiers résidentiels et les destinations. Parmi les destinations, on ne compte pas que le centre-ville, mais aussi l’Université de Montréal, les centres hospitaliers, le secteur d’Ubisoft et du Mile End. Ainsi, le matin et les soirs de semaine, les voitures sont plus nombreuses dans les quartiers résidentiels et elles se dirigent souvent vers ces destinations.