Le congrès des jeunes libéraux a l’habitude de susciter des malaises. Comme si, pour se faire remarquer, le délégué moyen de la commission jeunesse du PLQ ressentait le besoin de soumettre la proposition la plus saugrenue, de manière à voir son nom dans le journal. Le plus souvent, toutefois, le malaise vient de la contradiction entre les propositions de l’aile jeunesse et la ligne du parti, du contraste entre l’ingénuité de l’inexpérience politique et la langue de bois bien forgée par des années de ratés dans les médias.
Idéalement, les congrès jeunesse devraient insuffler aux vieux partis des idées nouvelles issues de la génération montante. Dans les faits, toutefois, il arrive que l’aile jeunesse propose de vieilles idées, comme celle, l’an passé, d’encourager les femmes à faire plus d’enfants. Placé sous le thème de l’innovation, le rassemblement annuel de cette belle jeunesse ne pouvait toutefois pas se permettre de ressasser des idées de l’ère Duplessis cette année et, bien que la remise en question de l’ancienneté syndicale ne soit pas exactement une nouvelle idée, il n’en demeure pas moins que deux propositions des jeunes libs apportaient un vent de fraicheur à l’institution : celle de mettre sur pied une commission d’enquête sur le racisme systémique, et celle voulant que le parti s’engage à présenter une proportion paritaire de candidates aux élections.
La première, présentée par certains médias comme étant «controversée» et «polémisante» alors qu’il s’agit essentiellement de consacrer des deniers à la compréhension d’une réalité qui touche plusieurs membres de la société, a été adoptée sans amendement par la relève libérale, au grand plaisir de la ministre de l’Immigration Kathleen Weil. Le Parti Libéral des grands s’est même engagé à entamer une réflexion sérieuse sur ce sujet important et de proposer des mesures concrètes pour contrer le phénomène. Par l’adoption de cette résolution, les apprentis-politiciens semblaient reconnaitre que des facteurs systémiques pouvaient porter atteinte à l’égalité des chances.
Mais cette compréhension des barrières structurelles s’est butée à celles qui se présentent devant l’accès des femmes en politique. En assemblée, une majorité d’hommes a jugé que s’engager à présenter entre 40% et 60% de candidates risquait de miner le principe de compétences. Autrement dit, les jeunes du parti qui nous a donné Sam Hamad, David Heurtel, Yves Bolduc, et sans oublier Tony Tomassi, croient fermement que les politiciens sont choisis selon leurs compétences, et qu’il n’y a pas assez de femmes compétentes pour se mesurer aux hommes dans une proportion paritaire.
Ce très vieil argument contre les quotas ne tient jamais compte des quotas invisibles déjà en place à la faveur des hommes. Mais c’est sûrement parce qu’il manquait de filles compétentes que le nouvel exécutif de la commission jeunesse élu dimanche compte maintenant 17% de femmes, une baisse par rapport au 35% de l’an passé. Avec cette proportion fracassante, on attend de pied ferme les prochaines propositions. La tenue d’une enquête publique sur la perte de vitesse des hommes en politique? Des tickets-modérateurs pour l’accès à l’avortement? Une taxe pour les femmes qui ne font pas d’enfants? À suivre!