GATINEAU, Qc — Une femme à qui un ex-technicien médical de l’armée a demandé de lui montrer sa poitrine pour un examen médical de routine, en 2005, n’a pas immédiatement porté plainte parce qu’elle craignait d’éventuelles répercussions sur sa carrière, a-t-elle fait valoir mardi en cour martiale.
Celle qui est aujourd’hui caporale de la réserve des Forces armées canadiennes (FAC) — et dont l’identité ne peut être dévoilée en raison d’un interdit de publication — a indiqué aux cinq membres du tribunal militaire qu’elle avait seulement fait part de l’incident à son copain de l’époque.
La femme de 30 ans a précisé qu’elle avait imploré ce dernier de ne rien ébruiter à ce sujet après que celui-ci eut insisté pour qu’elle contacte le centre de recrutement de Thunder Bay, en Ontario, où se déroulent les examens médicaux.
Ce témoignage s’ajoute à ceux d’autres femmes qui ont été entendues, la veille, dans le cadre du procès contre l’ancien technicien médical militaire James Wilks, qui est accusé de plusieurs chefs d’abus de confiance, en plus d’un chef d’agression sexuelle relativement à des plaintes déposées par des femmes à Thunder Bay, London et Windsor.
Mardi, la plaignante a raconté que l’accusé lui avait proposé qu’une autre femme reste dans la salle d’examen à titre de chaperon tout en lui disant que le personnel du centre de recrutement était plutôt occupé.
La victime alléguée a donc éventuellement accepté de subir l’examen en question sans la présence d’une autre personne, a-t-elle dit.
L’examen de sa poitrine visait à déterminer si sa cage thoracique était concave, lui aurait-on affirmé.
«Cela semblait avoir du sens à l’époque, a-t-elle dit. J’ai donc exposé mes seins nus. C’était très inconfortable.»
Une culture hostile aux femmes
Ce procès survient dans la foulée d’incidents qui, aux dires de l’ex-juge de la Cour suprême Marie Deschamps, témoignent d’une culture sexualisée hostile aux femmes au sein des FAC.
Dans son rapport publié en 2015, Mme Deschamps a qualifié les comportements déviants d’«endémiques» dans l’armée.
Dans un autre témoignage entendu plus tôt mardi par la cour martiale, une lieutenante de la marine qui a également été recrutée à Thunder Bay a raconté qu’elle avait aussi subi un examen inapproprié de M. Wilks en 2007. Dans son cas, une autre femme était aussi présente dans la salle, mais n’est pas intervenue, a-t-elle précisé.
«J’ai trouvé qu’il avait observé mes seins pendant un long moment», a dit la femme, dont l’identité fait aussi l’objet d’une ordonnance de non-publication.
«C’était gênant», a-t-elle dit, décrivant comment le technicien médical avait fait des mouvements de va-et-vient avec sa main qui se trouvait vis-à-vis sa poitrine, sans dire un mot.