Les médecins québécois devraient être salariés de l’État et non rémunérés à l’acte, selon les recommandations d’une étude de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) qui sera publiée mercredi.
Les auteurs de l’étude considèrent comme «insoutenable» le système de rémunération actuel des 19 808 médecins actifs, qui accapare quelque 19% des dépenses en santé et 7,1% du budget total du gouvernement du Québec en 2016. Ils font remarquer que les 7G$ consacrés à la rémunération des médecins dépassent largement les budgets du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale (4,3G$), ainsi que ceux des Affaires municipales (1,7G$) et de la Justice (855M$).
«Depuis une dizaine d’années, [les médecins] sont allés trop loin. Ils se sont donné des augmentations qui sont insoutenables et disproportionnées par rapport aux autres salariés du Québec et sans commune mesure avec les autres dépenses en santé, affirme Guillaume Hébert, coauteur de l’étude et chercheur à l’IRIS. Si on concentre autant d’argent sur ces professionnels-là, ça ne peut plus fonctionner, et on menace la pérennité du système.»
Il reconnaît toutefois que les médecins québécois ont historiquement eu des salaires plus bas que certains de leurs homologues canadiens. Or, les augmentations accordées depuis 2007 ont fait en sorte que, en tenant compte du coût de la vie, les médecins québécois gagnent plus que les médecins ontariens, selon lui.
M. Hébert croit que les médecins, qui touchent 7,6 fois le salaire moyen au Québec, devraient gagner un salaire similaire à la moyenne de l’OCDE, soit 3,3 fois plus que le salaire moyen pour les médecins spécialistes et 2,5 fois plus pour les médecins omnipraticiens.
À la Fédération de médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), on a balayé du revers de la main l’analyse de l’IRIS, un organisme qui a «un biais antimédecin reconnu», selon le directeur des communications, Jean-Pierre Dion.
Ces statistiques ne font pas la distinction entre les médecins spécialistes et omnipraticiens; or, les premiers gagnent beaucoup plus et sont plus nombreux, explique M. Dion, ce qui a pour effet de gonfler les chiffres. «Les médecins de famille québécois gagnent 20% de moins que leurs homologues en Ontario, affirme-t-il. Même si on inclut le coût de la vie, ils gagnent moins.»
Il avance aussi que quelque 30% de la rémunération des médecins de famille est en fait consacrée aux frais de bureau, dont le personnel, le loyer et le matériel, et n’entre pas directement dans la poche du médecin.
Fausse bonne idée?
L’idée de verser des salaires aux médecins est une fausse bonne idée, selon le directeur des communications de la FMOQ, Jean-Pierre Dion.
Salariés, les médecins auraient droit au fonds de retraite, aux avantages sociaux et aux congés de maternité, ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle, étant donné leur statut de travailleurs autonomes.
«Le salariat, c’est peut-être bien beau en théorie, mais ça a plein de désavantages insoupçonnés», illustre-t-il.