QUÉBEC — Le gouvernement Couillard s’est défendu jeudi de s’être ingéré dans le fonctionnement de la Commission d’accès à l’information (CAI), un organisme réputé indépendant.
Pourtant, l’opposition officielle péquiste a obtenu des courriels qui démontrent qu’une attachée de presse de la ministre responsable de l’accès à l’information avait pressé la CAI de diffuser un communiqué avant un point de presse de la ministre.
L’affaire remonte à août 2017. Le président de la CAI, Jean Chartier, avait alors affirmé au Devoir qu’il n’existait «pas de mur» entre les responsables de l’accès à l’information des organismes publics du Québec et les cabinets politiques.
La ministre de l’époque, Rita de Santis, avait ensuite dit que M. Chartier avait été mal cité et son attachée de presse, Laurence Tôth, avait envoyé un courriel pour demander quand la CAI allait diffuser son communiqué de presse, puisque la ministre rencontrait les journalistes plus tard en journée.
Un directeur de la CAI lui avait envoyé le communiqué dans sa version finale avant sa diffusion et avant la rencontre prévue.
En commission parlementaire mercredi, le député péquiste Mathieu Traversy y a vu un cas d’ingérence qui ne respecte pas la séparation étanche entre l’organisme et le gouvernement.
«Il y a un os dans le fromage», a-t-il déclaré au cours de l’étude des crédits budgétaires de la CAI.
«Il y a apparence, évidemment, d’ingérence politique: le président de la commission se fait presser de rectifier le tir», a-t-il conclu.
Le président de la CAI, Jean Chartier, a indiqué que c’était la première fois depuis son arrivée en poste en 2011 qu’un cabinet intervenait ainsi, mais il n’y voyait pas un cas d’ingérence.
«On nous a demandé si le président allait changer sa version, s’il avait été mal cité, j’ai mentionné que ce que j’avais dit, je l’avais dit, a répondu M. Chartier. Est-ce que je trouve normal que le cabinet m’appelle. Difficile pour moi de répondre. Est-ce que c’était de l’ingérence? Je vous laisse porter un jugement.»
L’actuelle ministre responsable de l’accès à l’information, Kathleen Weil, qui a succédé à Rita de Santis en octobre, a pour sa part assuré qu’il n’y avait pas d’ingérence dans les décisions de la CAI.
«De l’ingérence? Je veux rassurer, il n’y pas d’ingérence dans les décisions que doivent prendre les instances indépendantes dans notre système gouvernemental.»
Mme Weil a par ailleurs rappelé son intention de déposer une réforme de la loi sur l’accès à l’information. Elle a reconnu que la loi actuelle, qui date du gouvernement Lévesque, était vétuste. «On a perdu notre classement» parmi les leaders mondiaux, a-t-elle évoqué.
Toutefois le temps presse pour déposer et étudier un projet de loi, puisque la législature se termine à la mi-juin. Le leader parlementaire du gouvernement, Jean-Marc Fournier, qui coordonne le calendrier législatif, est pour sa part resté évasif.
«Je peux vous dire une chose, elle (la future loi) n’est pas au feuilleton aujourd’hui, elle ne sera pas déposée demain.»