Samedi dernier, nous sommes allés aux portes ouvertes d’une prestigieuse école secondaire privée de Rosemont. Il y avait du monde. Des familles comme nous, avec un enfant en cinquième du primaire, qui se magasinent une école secondaire.
Le terme «magasiner» est sciemment utilisé dans la phrase précédente; ce n’est ni une figure de style ni un abus de langage.
Au Québec, aujourd’hui, on magasine l’école secondaire de ses enfants comme on magasine une nouvelle voiture ou une maison. On visite, on compare, on examine, on évalue: qualité, coûts, réputation… On s’informe et on demande conseil à nos proches et à nos amis. On essaye des fois de rationaliser: on se base sur des faits, on dresse un tableau des pour et des contre, on analyse. D’autres fois on laisse nos émotions nous guider: c’est une belle école, les profs sont sympas, c’est prestigieux, etc. Et au final, on hésite, on tergiverse, on angoisse. On est totalement perdus.
En tant que parents, nous voulons toujours ce qu’il y a de mieux pour nos enfants. La majorité des parents du moins. On veut qu’ils et elles s’épanouissent, se sentent accomplis et heureux, qu’ils aient confiance en eux et qu’ils aient toutes les chances de leur côté pour réussir dans la vie. Nous savons au fond de nous, instinctivement, que la société n’est ni équitable ni égalitaire: l’environnement qui entoure l’enfant va définir son avenir: l’éducation des parents, le niveau de vie, le quartier, l’entourage… Et, bien évidemment, l’école où l’enfant passera une grande partie de sa jeune vie. Nous sommes conscients que les connaissances, les compétences et les valeurs qu’il va acquérir pendant les cinq années du secondaire auront un impact fondamental sur son avenir. Nous ne devons pas nous tromper. C’est pourquoi nous étions aussi nombreux samedi aux portes ouvertes de la prestigieuse école privée de Rosemont. C’est pourquoi nous angoissons.
Aujourd’hui, au Québec, on magasine l’école secondaire de ses enfants. On évalue et on compare comme si c’était une vulgaire marchandise qu’on achète et qu’on vend. C’est un système tordu qui nous mène à angoisser sur les bons choix à faire pour eux.
Ça, c’est nous, les adultes. Imaginez un peu ce que ressentent nos enfants.
Je suis mal à l’aise. Je ne sais pas pourquoi on en est rendus là. Pourquoi le système est si tordu et compliqué. On ne devrait pas avoir à magasiner une école. Ça devrait être aussi simple que d’inscrire son enfant à l’école la plus proche parce qu’elle est équivalente à toutes les autres. Je ne sais pas quelle est la solution. Abolir les subventions publiques aux écoles privées? Peut-être. Je ne sais pas.
Tout au long de la visite, j’ai dit à ma fille: tu sais, on ne fait que visiter, il y a d’autres choix, tu n’es pas obligée de passer les examens, mais si tu veux les passer puis que tu n’es pas admise, c’est ben correct aussi, et si t’es admise, t’es pas obligée d’y aller… Et on est là ta mère et moi pour t’aider à prendre une décision…
En attendant les autres portes ouvertes en septembre.