L’administration Trump ne cesse depuis un an de lier immigration et criminalité. Selon un sondage Gallup en 2017, tel que rapporté par le New York Times du 30 mars 2018, près de 50% des Américains sont d’accord avec l’idée que les immigrants augmentent la criminalité. Or, aucune preuve scientifique démontre des liens entre l’immigration et la criminalité. Dans certains cas, l’augmentation de l’immigration fait même reculer les taux de criminalité. Et cela concerne autant les immigrants réguliers que les irréguliers.
En ce qui concerne les États-Unis, il existe de nombreuses études sur la question. J’en mentionnerai quatre ici.
En juillet 2015, Alex Newrasteh (voir Cato at Liberty) a résumé une série de recherches qui démontrent que les immigrants sont moins prônes à la criminalité que les natifs. Cela est vrai autant pour les immigrants réguliers que les irréguliers.
Dans le Journal of Ethnicity in Criminal Justice (volume 15, 2017), un article de Lesley Reid et collègues portant sur la période entre 1970 et 2010 conclut que les crimes tels que les meurtres et les vols diminuent au fur et à mesure que l’immigration augmente.
L’étude la plus récente vient d’être publiée dans l’Annual Review of Criminology (2018) par Graham Ousey & Charis Kubrin. Ces deux chercheurs ont synthétisé les travaux réalisés entre 1994 et 2014 concernant l’impact de l’immigration sur la criminalité (51 études en tout). Les résultats sont clairs: il n’y a pas de lien entre immigration et criminalité. Lorsqu’il y a un lien, il a tendance à être négatif (plus d’immigration = moins de criminalité).
La dernière étude est particulièrement importante car elle s’interroge sur l’association entre criminalité et immigration irrégulière (l’administration Trump préfère parler d’immigration illégale). Dans la revue Criminology (mars 2018), l’étude de Miller montre que les mêmes conclusions que ci-haut s’appliquent aux immigrants irréguliers, à savoir qu’il n’y a généralement pas de liens entre l’immigration irrégulière et la criminalité; lorsqu’un lien existe, il est également négatif. Notons que la période étudiée couvre 24 années (1990-2014).
À ma connaissance, ce mythe n’est pas très répandu au Canada. Cela explique peut-être pourquoi il existe peu de recherches sur cette question ici. Cela dit, on peut mentionner une étude récente qui arrive aux mêmes conclusions que celles mentionnées pour les États-Unis. En effet, l’étude de Zhang (2014, dans le Canadian Labour Market and Skills Research Network) montre que si l’immigration récente n’a pas d’impact sur les crimes contre la propriété, avec le temps, ces taux de criminalité diminuent.
Voilà un bel exemple de mythes qui perdurent malgré des conclusions de recherches évidentes sur l’absence de liens entre immigration et criminalité.
Deux facteurs sont avancés pour expliquer ces résultats: la forte sélectivité migratoire (les gens viennent pour améliorer leurs conditions de vie) et la peur de la punition extrême, l’expulsion.