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Le «pot» gouvernemental ne sera pas si bon marché

Si les futures boutiques de pot du gouvernement québécois semblent attirer les compliments des militants du cannabis, ces derniers ont notamment des réserves sur les prix des marchandises.

Les étagères de la succursale de la Société québécoise du cannabis (SQDC) de Rosemont, ouverte mardi aux médias, étaient garnies de près de 110 produits différents sur une possibilité de 180. Il y a deux grandes familles: les fleurs séchées et les huiles. Le produit le moins cher (La Toucher) revient à 5,28$/g quand il est acheté en sachet de 3,5 g.

«C’est un prix pour faire la compétition au marché noir», a expliqué Alain Brunet, le dirigeant de la SQDC, une société d’État qui ouvrira 12 succursales au Québec le 17 octobre, jour de la légalisation.

Dans la première année, l’État espère reprendre 30% de part de marché du pot, mais certains en doutent, notamment parce que deux produits figurent sous la barre des 5,83$ le gramme, le prix au marché noir actuellement au Québec, selon Statistique Canada. La plupart des autres articles sont vendus autour de 7,50$/g en format de 3,5g et à partir de 8,50$ pour des sachets de 1g.

Et pour les grosses quantités, ce n’est pas tellement mieux. «Pour les gros acheteurs, ceux qui achètent une once ou une demi-livre, les prix ne sont pas concurrentiels», a mentionné Jean-Sébastien Fallu, professeur et chercheur spécialisé en toxicomanie. Il souligne toutefois que le prix ne doit pas être trop bas afin de ne pas favoriser l’usage

Hugô St-Onge, porte-parole du Bloc Pot, a souligné de son côté que les prix sur le marché noir ont quasiment été divisés par deux ces derniers mois et que les gros consommateurs ne trouveront probablement pas d’avantages à aller à la SQDC, surtout s’il y a de longues files et des ruptures de stock, comme il l’anticipe. Rappelons que 80% du marché évalué à 5,7G$ au Canada est actuellement acheté par seulement 20% des plus gros fumeurs. La SQDC a toutefois promis qu’elle s’adapterait ses prix au marché si cela est nécessaire.

«La boutique est belle, mais est-ce que ce sera convivial quand les conseillers seront en opération?» s’est questionné M. St-Onge.

«On a l’impression de se trouver dans une pharmacie et de traiter des malades. […] Pourquoi est-ce que ça ne ressemble pas à vos boutiques de vin alors que l’alcool est plus dommageable pour la santé», a ajouté Kshoo, un Français qui a mis sur pied le Collectif d’information et de recherche cannabique. En effet, les recherches démontrent que le taux de dépendance est de 15% pour les buveurs d’alcool et de 9% chez les consommateurs de cannabis (16% si un fumeur de cannabis débute à l’adolescence).

«C’est la volonté du législateur», a répondu M. Brunet. La mission de la SQDC est en effet de vendre un produit longtemps illégal, tout en s’assurant qu’elle ne contribuera pas à l’essor du marché dans une perspective de protection de la santé.

C’est pourquoi les produits ne sont pas visibles de la rue et qu’une zone d’accueil permettra de vérifier si les clients ont au moins 18 ans. Actuellement, selon Statistique Canada, les jeunes âgés de 15 à 17 ans représentent 15% des fumeurs de cannabis. Si le gouvernement de François Legault va de l’avant en élevant la limite à 21 ans d’ici Noël, ce sera 30% des consommateurs québécois de pot (les 15-21 ans) qui devront se tourner vers le marché noir pour s’approvisionner.

«L’avantage de s’approvisionner dans le réseau légal, c’est qu’on connaît la puissance et la provenance des produits», a mentionné Adam Greenblatt, qui a travaillé quatre ans dans des clubs compassion avant de faire le saut chez Canopy Growth, le plus gros producteur de cannabis du Canada. Il félicite la SQDC pour la qualité de ses boutiques qui propose même une politique de retour et échange valable 14 jours en cas produit trop sec ou contenant des moisissures.

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