Pour tout dire, je demeure d’ordinaire dubitatif lorsqu’une «vedette», peu importe la définition de celle-ci, prête son nom à une cause sociale ou politique. Rien contre, comprenez-moi bien. Mais quelle crédibilité, pertinence ou plus-value, au fond?
Me souviens notamment du débat afférent à la Charte des valeurs, où j’étais un des quatre corédacteurs du manifeste visant à dénoncer cette dernière. Bien que toutes les signatures aient évidemment alors été bienvenues (nous en avions obtenu près de 35 000), une course particulière faisait rage avec le camp adverse: celle d’amasser le plus d’appuis de «stars» de tout acabit. Vous avez Janette Bertrand? Pfff. Nous, on a Richard Desjardins. Dans votre pipe. Je trouvais néanmoins, me rappelle fort bien, l’exercice des plus futile.
C’est dans cet état d’esprit que j’ai accueilli, la semaine dernière, la nouvelle de la horde d’artistes appuyant le Pacte relatif à la transition énergétique lancé par le dramaturge Dominic Champagne. Malgré la réserve mentionnée plus haut, le message a rapidement pris le dessus sur les messagers. Parce que depuis le temps que je crie au meurtre par rapport à notre indolence collective sur la question environnementale, il y avait enfin un mouvement d’envergure en la matière.
Évidemment, et de façon prévisible, l’armada des réactionnaires classiques allait se mettre de la partie. Hyprocrisie des artistes en question, disent-ils. Clergé vert. Donneurs de leçons. Tout pour casser l’élan obtenu. N’importe quoi, sérieusement. Regarder le doigt quand le sage pointe la lune, en quelque sorte.
D’abord, parce que ces mêmes signataires initiaux n’ont nullement prétendu être parfaits en la matière. Ils ont simplement dit s’engager à réduire, du mieux qu’ils le peuvent, leur empreinte écologique.
Ensuite, parce que jamais ceux-ci n’ont critiqué le reste de la population. Ils l’ont plutôt invitée à suivre le mouvement, chose d’ailleurs réussie à ce jour.
Enfin, parce que même si Champagne et compagnie avaient effectivement l’air de curés verts, je m’en accommode très bien. Pourquoi? Parce que c’est justement ce qu’il manque dans la sphère publique. Des ambassadeurs opiniâtres et engagés qui placeront l’enjeu environnemental à l’endroit qui convient sur l’échiquier des priorités sociopolitiques: le sommet. Selon le consensus scientifique, l’heure est grave, bientôt fatale. Pas trop le temps de déconner avec des insultes de style CPE, si vous voulez mon avis. Sérieux, accuser quiconque d’être en 2018 un curé vert relève du plus grand anachronisme. De la bêtise pure.
Une faiblesse du Pacte, cela dit? Donner l’impression que la solution passe par l’action individuelle, alors que celle-ci, malgré toute sa légitimité et sa noblesse, ne se compare en rien à l’importance de décisions de nature politique. Or, et ceci est à se taper la tête sur les murs, le premier ministre Legault refuse à la fois de signer ledit Pacte et d’assister à la COP24, la plus importante conférence internationale sur le sujet. Méprisable.
Mais bon. À force de marteler le message, une portion grandissante de la société civile risque d’exiger des comptes de la part de son gouvernement. Et le jour où le buzz sera suffisamment puissant, les élus en quête de votes n’auront d’autre choix que d’emboîter le pas.
Morale de l’histoire? Bravo, M. Champagne. Et prière d’endosser la soutane du curé vert qui nous fait, actuellement, cruellement défaut.