Les actionnaires d’Air Transat ont approuvé l’offre d’achat d’Air Canada vendredi au terme d’une assemblée extraordinaire tenue au centre-ville de Montréal. Le gouvernement fédéral devrait toutefois prendre encore quelques mois pour se pencher sur cette acquisition.
La proposition d’Air Canada a été approuvée par un peu plus de 94% des actionnaires de Transat. Le transporteur aérien propose 18$ par action pour un total d’environ 720 M$. Deux tiers des votes en faveur de cette offre d’achat étaient nécessaires pour que cette transaction soit approuvée.
«Vous avez pris la bonne décision et je vous remercie», a déclaré à l’issue du vote le président et chef de la direction de Transat, Jean-Marc Eustache, qui a été vivement applaudi par les nombreux actionnaires de l’entreprise réunis dans la salle de réception de l’hôtel Sofitel.
Ce dernier a par ailleurs affirmé que l’entreprise tentera d’obtenir l’approbation d’Ottawa «dans les meilleurs délais» afin de pouvoir finaliser cet arrangement au début de l’an prochain.
Les actionnaires avaient jusqu’au 21 août pour voter par procuration. L’assemblée d’aujourd’hui visait donc à permettre à ceux désirant voter publiquement sur ce dossier de le faire. L’issue du vote était néanmoins connue d’avance par la direction, puisque 70% des actionnaires ont voté par procuration. De ceux-ci, 95% ont voté en faveur de cet arrangement, donnant l’assurance à la direction que cette offre d’achat serait approuvée.
Les trois principaux actionnaires d’Air Transat sont le gestionnaire de fonds montréalais Letko Brosseau, le Fonds de solidarité FTQ et la Caisse de dépôt et placement du Québec.
Craintes
L’offre d’Air Canada ne fait toutefois pas l’unanimité. Pendant la période de questions réservée aux actionnaires, le directeur du Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC), Willie Gagnon, l’a fortement critiquée.
«Je suis un peu triste aujourd’hui», a-t-il soupiré. Ce dernier a notamment soulevé le fait que plusieurs membres de la haute direction recevront une contrepartie importante de cet arrangement. La somme la plus importante reviendra au président et chef de la direction d’Air Transat, Jean-Marc Eustache. Celui-ci recevra près de 11,7 M$ au terme de la transaction.
«Je ne me sens pas mal à l’aise du tout. […] J’ai gagné honnêtement cet argent-là», a rétorqué celui qui a cofondé le fleuron québécois en 1987. M. Bélanger, âgé de 71 ans, entend prendre sa retraite lorsque cette transition sera complétée.
Ce dernier a néanmoins reconnu qu’il aurait préféré ne pas avoir à vendre Transat.
«L’idéal, ça aurait été que l’entreprise continue, mais elle ne pouvait pas continuer», a-t-il laissé tomber lors d’une conférence de presse tenue vendredi à la suite du vote.
L’an dernier, l’entreprise, qui fait face à une compétition croissante et à la menace d’une récession, a essuyé une perte nette d’environ 42 M$.
«C’est une business extrêmement difficile.» -Jean-Marc Eustache, président et chef de la direction de Transat
«Contraire à l’intérêt public»
Dans les derniers jours, le propriétaire de Québecor et actionnaire de Transat, Pierre Karl Péladeau, a affirmé que cette transaction serait «contraire à l’intérêt du public». Dans un communiqué, le magnat de la presse a soutenu que l’achat d’Air Transat par le plus important transporteur aérien du pays viendrait restreindre la concurrence dans le secteur aérien, ce qui nuirait aux voyageurs canadiens.
«Je peux vous dire quelque chose: de la compétition, il y en aura toujours dans notre domaine. Donc, je pense que les consommateurs auront encore de nombreux choix», a réagi M. Bélanger. Ce dernier a notamment noté la compétition grandissante provenant de compagnies aériennes comme Level, Air France et Norwegian Air.
Par conséquent, le mariage d’Air Transat et d’Air Canada ne devrait pas mener à une hausse du prix des billets d’avion pour les Québécois, estime M. Bélanger.
«Si vous regardez en dollars constants, les prix des billets d’avion n’ont jamais augmenté au cours des 20 ou 30 dernières années», a-t-il souligné.
Le cofondateur de Transat a par ailleurs assuré que la marque de l’entreprise sera conservée et que son siège social sera «préservé au Québec». Les quelque 5000 employés de l’entreprise ne devraient également pas être affectés par cette transaction.
«Je ne crois pas qu’il y aura de pertes d’emplois. Je pense qu’au contraire, il y aura de la création d’emplois», a affirmé le grand patron de Transat.
La seule offre valide
L’offre d’achat d’Air Canada était d’ailleurs la seule sur laquelle les actionnaires ont été appelés à se positionner vendredi. Celle du Groupe Mach a été jugée invalide le 12 août par un tribunal spécialisé. La firme immobilière proposait 14$ par action.
Soucieuse de rallier les deux tiers des actionnaires de Transat, Air Canada a récemment bonifié de 40% son offre d’achat, qui est passée de 13$ à 18$ l’action. Cela a fait gonfler le prix d’achat total de 520 M$ à 720 M$.
Bien que l’offre d’Air Canada ait été approuvée aujourd’hui, le gouvernement fédéral pourrait encore prendre plusieurs mois avant d’approuver cette transaction.