Le gouvernement Legault mandate le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) pour qu’il se penche sur l’utilisation de l’amiante ou de ses résidus sur le territoire provincial. Québec espère ainsi «éclairer» ses décisions à venir pour tout projet comprenant ce matériel toxique et controversé.
Les ministres de l’Environnement, Benoit Charette, et de la Santé, Danielle McCann, en ont fait l’annonce lundi.
«Pendant plusieurs décennies, l’amiante a été utilisé dans l’industrie sous diverses formes. Même s’il est maintenant interdit, il est toujours présent au Québec, notamment sous forme de résidus sur le territoire des municipalités où il a été exploité», a soutenu M. Charette dans un communiqué de presse.
«À ce stade de notre histoire, je pense […] qu’il convient de faire le point sur les impacts de l’amiante et de ses résidus sur la santé et l’environnement en nous appuyant sur la science», a-t-il ajouté.
L’amiante fait l’objet depuis plus d’un an d’une interdiction totale au Canada, mais Québec ne s’est jamais officiellement prononcé sur cette substance. La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) demande toutefois aux entrepreneurs de vérifier la présence du matériau «avant d’entreprendre un travail susceptible d’émettre de la poussière d’amiante».
Les effets cancérigènes de l’amiante ont maintes fois été prouvés. Selon l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), ce minéral peut engendrer «le cancer pulmonaire, le mésothéliome, le cancer du larynx et le cancer de l’ovaire».
Un mandat large
L’enquête avec audiences publiques du BAPE s’étirera du 25 novembre 2019 au 24 juillet 2020, au plus tard. En plus de «dresser un état des connaissances scientifiques» sur le sujet, l’équipe mandatée devra réfléchir à la potentielle élaboration d’un plan de «valorisation des résidus miniers amiantés au Québec».
Elle aura aussi la tâche de repenser les méthodes de «disposition» de l’amiante. On enfouit généralement les matériaux résiduels de l’amiante, au Québec.
Le président de l’Association des victimes de l’amiante du Québec (AVAQ), Gilles Mercier, se dit «très heureux» de ce mandat d’enquête de l’organisme gouvernemental. «Enfin on parle d’amiante au Québec», constate-t-il.
Selon lui, cependant, Québec se positionne mal face à la problématique. Il aurait préféré que le BAPE se penche entre autres sur la norme d’exposition aux concentrations amiantées. Celle-ci est «cent fois supérieure à certains pays d’Europe», observe-t-il.
«Toute exposition est à proscrire. L’amiante, c’est comme acheter un billet de loterie: respirer une particule et ça peut mal tourner» – Gilles Mercier, président de l’AVAQ
Interdiction efficace?
L’interdiction de l’amiante au Canada pousse le Québec à faire son propre examen, selon la ministre de la Santé et des Services sociaux Danielle McCann. «Il convient d’être prudent également avec [les résidus de l’amiante], ceux qui se retrouvent dans l’environnement de Thetford Mines, d’Asbestos et d’autres municipalités», a-t-elle lancé dans le communiqué.
D’après Gilles Mercier, on retrouve dans ces municipalités «plus de 800 millions de tonnes de résidus, qui contiennent jusqu’à 40% d’amiante». Selon le président de l’AVAQ, le problème réside dans l’interdiction partielle du gouvernement canadien.
«Les résidus miniers ne sont pas couverts par le règlement, analyse-t-il. C’est pour ça qu’au Québec, on est encore aux prises avec ces questions-là.»