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Les minorités visibles toujours sous-représentées dans les organismes publics

personnes racisées

Des milliers de personnes ont manifesté dans les rues du centre-ville de Montréal le 7 juin pour dénoncer le racisme et la brutalité policière.

Le nombre de membres des minorités visibles occupant un poste dans des organismes publics au Québec demeure nettement en deçà des attentes, constate la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ), dans un rapport mis en ligne mardi.

L’organisme a analysé l’évolution de l’atteinte des cibles de la Loi sur l’accès à l’égalité en emploi dans les organismes publics entre 2009 et 2019. Cette loi, en vigueur depuis 2001, vise à corriger la «sous-représentation» de différents groupes de personnes, notamment dans le réseau de la santé, de l’éducation, de même qu’au sein des sociétés de transport et de la police, entre autres. 

Loin des cibles

L’an dernier, les membres des minorités visibles occupaient 6,3% des postes dans ces organismes au Québec, contre 2,7% d’entre eux une dizaine d’années plus tôt. La cible que Québec comptait atteindre l’an dernier était toutefois de 10,3%, souligne le rapport de plus de 120 pages.

«Les chiffres montrent qu’il y a de la discrimination systémique dans les organismes assujettis à la loi. Les chiffres parlent d’eux-mêmes», affirme à Métro la vice-présidente de la CDPDJ, Myrlande Pierre. Des propos qui surviennent alors que le gouvernement Legault a été pressé par différents groupes dans les derniers jours de prendre des mesures pour lutter contre le racisme systémique

Disparités

Selon le rapport, le réseau des sociétés de transport est celui qui compte «la représentation la plus élevée» de minorités visibles, avec un taux de 12,7%. Dans un courriel à Métro, la Société de transport de transport de Montréal indique d’ailleurs que les minorités visibles, ethniques et autochtones comptaient l’an dernier pour 34% de ses employés.

À l’opposé, ce pourcentage chute à 4,8% dans la catégorie des employés municipaux et à 0,8% dans la Sûreté du Québec.

«Beaucoup d’efforts sont à investir pour les membres de ce groupe afin de faciliter leur embauche dans les organismes publics», constate ainsi la CDPDJ.

Imputabilité

Les minorités ethniques, dont la langue première est ni le français ni l’anglais, n’occupent pour leur part que 3,4% des postes dans ces secteurs, un pourcentage qui n’a presque pas bougé en 10 ans. La cible pour ce groupe est de 6,6%.

La présence de personnes autochtones dans les organismes publics stagne aussi à 0,3% depuis 2009. C’est trois fois moins que la cible de 0,9% pour ce groupe de personnes.

Face à de tels constats, Mme Pierre presse les organismes publics à faire preuve d’«imputabilité» dans le respect des cibles prévues à cette loi. Elle demande aussi au gouvernement Legault d’envisager des mesures incitatives afin de faciliter l’atteinte de ces cibles par les organismes publics.

«On veut s’assurer qu’il y ait une reddition de compte beaucoup plus soutenue de la part des organismes publics.» -Myrlande Pierre, vice-présidente de la CDPDJ

Legault convient d’un retard

Interrogé sur ce rapport de la CDPDJ mardi, le premier ministre du Québec, François Legault, a convenu d’un «problème».

«Il y a un vrai problème, autant dans les ministères que dans les sociétés d’État. On doit se donner des objectifs concrets dans les futures embauches», a soutenu l’élu caquiste.

Le gouvernement du Québec compte par ailleurs présenter «dans les prochains jours» un mandat provincial contre le racisme. «Je veux qu’on agisse», a dit M. Legault.

Les femmes mieux représentées

Les femmes, pour leur part, ont réalisé des gains importants, souligne le rapport. En 10 ans, leur présence dans les organismes publics a grimpé de 11,4% pour atteindre 65,3%. Ce pourcentage demeure toutefois sous la cible de 68% que Québec comptait atteindre l’an dernier.

Le rapport observe également d’importantes disparités en fonction du poste occupé. Par exemple, les femmes occupaient l’an dernier 79,3% des emplois dans le réseau de la santé et des services sociaux et 71,9% de ceux dans les commissions scolaires. Ce pourcentage chute toutefois à 23,2% dans les sociétés de transport et à la SQ.

«Elles sont présentes dans les organismes sociaux et de santé, mais dans les postes de direction, il y a encore beaucoup de travail à faire», souligne aussi Mme Pierre. 

Les personnes handicapées n’occupaient quant à elles qu’environ 1% des postes dans les organismes publics l’an dernier. C’est près de cinq fois moins que la cible de Québec, qui est de 4,6%. Cette sous-représentativité des personnes handicapées concerne d’ailleurs tous les types d’emplois de la fonction publique, constate le rapport.

«Un investissement majeur au niveau du recrutement devra être fait par les employeurs afin de mieux rejoindre les membres de ce groupe visé», indique la CDPDJ.

– En collaboration avec François Carabin

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