La crise sanitaire actuelle a un impact sur la popularité des résidences privées pour aînés (RPA), mais seulement à court terme, pensent des intervenants consultés par Métro.
La Montréalaise Esther H. Loiselle se dit rassurée de savoir que son père et sa mère, âgés de 88 et 87 ans, habitent encore leur domicile à Québec.
«On s’est félicités 1000 fois qu’ils ne soient pas en résidence durant la pandémie», confie-t-elle.
Mme H. Loiselle y pensera à deux fois avant d’inscrire ses parents dans un établissement pour personnes âgées. Et elle n’est pas la seule.
«[Les personnes] qui demeurent dans leur propre domicile et qui sont en mesure de rester là encore un bout, du moins pendant la période de la Covid, ne bougeront pas», affirme Pierre Lynch, le président national de l’Association québécoise de la défense des droits des aînés (AQDR).
Des résidents de RPA pourraient même décider de carrément déménager, avance Anne-Marie Séguin, spécialiste en politiques sociales urbaines de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS).
«Une de nos hypothèses, c’est qu’il y a même des personnes âgées qui habitaient en résidence qui ont décidé de retourner, par exemple, dans un immeuble locatif ou dans un immeuble à condos, explique Mme Séguin. Dans ce type d’environnement, les personnes âgées pourraient sortir, alors que dans les résidences, non, dans la mesure où seraient appliquées les mêmes règles qu’au printemps passé.»
Pas d’impact à long terme
Le président-directeur général du Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA), Yves Desjardins, note une légère baisse du renouvellement des baux.
«Mais les gens comprennent que ce n’est pas la résidence qui impose les mesures, dit-il. On peut tous être déçus ou fâchés, mais c’est la situation.»
Toutefois, il pense que les résidences redeviendront attrayantes lorsque la situation se sera résorbée.
C’est aussi l’avis d’Anne-Marie Séguin. «Les personnes âgées ont beaucoup à cœur leur autonomie. Elles ne veulent surtout pas devenir un fardeau pour leurs enfants», explique-t-elle.
En 2019, 1,5 % des gens âgés de 65 à 74 ans habitaient dans une RPA. Ce pourcentage grimpe à 10,4 % chez les 75 à 84 ans et à 29,7 %, chez les citoyens de 85 ans et plus.
«On a un taux de pénétration, c’est-à-dire le nombre d’aînés qui habitent en résidence par rapport au nombre d’aînés global, de près de 19%», explique M. Desjardins.
Dans les autres provinces canadiennes, c’est moins de 5%, ajoute-t-il.
L’influence des bilans
Néanmoins, la gestion de la crise sanitaire d’une résidence pourrait devenir un facteur important dans le choix de l’établissement, pense Pierre Lynch.
«On va surement regarder le bilan des décès et des cas de l’établissement au courant de la première vague. La famille et l’aîné lui-même vont y penser à deux fois avant de rentrer dans un établissement qui a eu un mauvais bilan», affirme-t-il.
Ce serait également le raisonnement d’Esther H. Loiselle si elle devait emprunter l’avenue des résidences pour ses parents. «La première chose qu’on ferait serait de vérifier laquelle des résidences a été la moins affectée par la pandémie», conclut-elle.
1 sur 5
Ce sont 150 000 aînés qui ont choisi une résidence privée pour aînés comme milieu de vie, ce qui représente 1 aîné sur 5.
2,9 G$
En 2018, les projets de résidences privées pour aînés représentaient des investissements annuels de 2,9G$. Soixante-dix étaient en cours de construction.