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Québec sommé d’implanter un tribunal spécialisé sur les violences sexuelles

La ministre Isabelle Charest fait partie du comité transpartisan qui avait mandaté les experts d'étudier le fléau des violences sexuelles et conjugales.

La ministre Isabelle Charest fait partie du comité transpartisan qui avait mandaté les experts d'étudier le fléau des violences sexuelles et conjugales.

Pour mieux accompagner les victimes, Québec aurait avantage à mettre sur pied un tribunal des violences sexuelles. C’est une des 190 recommandations d’un comité d’experts mandaté par l’Assemblée nationale, et qui a remis son rapport final mardi.

Le Comité sur l’accompagnement des personnes victimes d’agressions sexuelles et de violence conjugale travaille depuis le printemps dernier à élaborer ses appels à l’action. Déposé mardi, l’épais rapport exige formellement des autorités gouvernementales qu’elles mettent en place cette initiative juridique, qui a eu du succès dans des États comme l’Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande.

«Les personnes victimes ne se tournent pas assez vers la justice. Pourquoi? Le système, clairement, ne répond pas à leurs besoins», a souligné l’ex-juge Élizabeth Corte, membre du Comité, lors d’un point de presse, mardi.

Les experts et expertes du Comité proposent d’attacher le Tribunal spécialisé sur les violences sexuelles à la Cour du Québec. Elles suggèrent par ailleurs que tous ses employés, «allant des officiers de justice aux intervenants», en passant par les juges et les procureurs, suivent une formation «spécifique et continue» sur le thème des agressions sexuelles et conjugales.

Les installations physiques de cette cour spécialisée bénéficieraient par ailleurs d’être adaptées, en offrant aux victimes alléguées «des contacts [minimisés] avec l’accusé», argue-t-on.

La mise sur pied d’un tribunal permettrait, selon les dires du Comité, «de restaurer la confiance des personnes victimes dans le système de justice criminelle».

Une conclusion qui fait écho à celle de la directrice générale de l’organisme Juripop, Sophie Gagnon. Selon elle, la venue d’un tribunal spécialisé permettra l’uniformisation des pratiques à travers le système judiciaire au Québec.

«Il y a des mesures qui sont susceptibles d’augmenter le nombre d’accusations qui sont portées en la matière», a commenté Mme Gagnon, mardi.

Un Ombudsman?

Et ça ne s’arrête pas là. Pour assurer un soutien suffisant aux victimes, les expertes pressent Québec de créer au plus vite un Bureau de l’Ombudsman québécois des victimes d’actes criminels.

Son rôle? Entre autres, «recevoir et traiter de manière impartiale les plaintes des victimes ayant épuisé les mécanismes de traitement».

Chapeauté par des élues des quatre partis représentés à Québec, le document somme par ailleurs le gouvernement de mettre sur pied un poste de ministre responsable de mener à terme ces recommandations.

Parmi les 190 recommandations, on compte aussi l’accompagnement psychosocial des victimes, l’embauche de personnes autochtones dans le système judiciaire et la révision des dossiers d’agression par deux procureurs du Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Le dépôt du rapport est survenu mardi dans un contexte mouvementé à l’Assemblée nationale. Quelques minutes plus tôt, le Parti québécois chassait le député Harold LeBel de son caucus pour agression sexuelle alléguée. Les faits remonteraient à 2017.

«Un engagement ferme»

Le document du Comité est le dernier d’une série de rapports de toute sorte déposés récemment sur le bureau du premier ministre. Après un rapport de 58 recommandations sur l’exploitation sexuelle des mineurs et un rapport d’étape de la protectrice du citoyen sur l’impact de la COVID-19 dans les CHSLD, François Legault s’est vu remettre lundi 25 appels à l’action pour mettre fin au racisme au sein de la société québécoise.

Malgré cette marée de rapports, les élues chargée de chapeauter le document maintiennent qu’il ne doit pas se faire «tabletter». La ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest, prend l’«engagement ferme» de faire mousser ses recommandations au gouvernement.

Le travail transpartisan avec les trois autres partis représentés à Québec ne s’arrête pas là, a-t-elle martelé en point de presse.

«On est quatre défenderesses de ce rapport avec la ferme intention de le faire aboutir», a-t-elle lancé.

«J’ai vu des courriels de victimes qui m’ont arraché le coeur. Ce n’est pas vrai, comme élues, qu’on peut dormir la tête tranquille avec ces histoires en tête. Ce rapport-là va nous survivre.» – Isabelle Melançon, porte-parole de l’opposition officielle en matière de condition féminine

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