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Couvre-feu: Legault craint que certains s’improvisent sans-abri

François Legault

Le premier ministre du Québec, François Legault

Accorder une exemption aux sans-abri pendant le couvre-feu créerait plus de problèmes que ça n’en règlerait, selon le premier ministre François Legault. «N’importe qui pourrait dire qu’il est un itinérant», croit-il.

L’élu caquiste a tenu ces propos mardi, alors même que des dizaines de personnalités politiques lui demandaient d’accorder une fois pour toutes une amnistie à la population itinérante durant le couvre-feu. Actuellement, un policier peut remettre une contravention à un sans-abri parce qu’il se retrouve à l’extérieur entre 20h et 5h.

Dans les heures précédentes, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, avait été la dernière politicienne à demander une exemption. En matinée, une pétition allant dans le même sens avait atteint les 10 000 signatures sur le site de l’Assemblée nationale.

Mais François Legault persiste et signe. Les corps policiers font leur travail, assure-t-il, et le couvre-feu n’a pas mené à une surjudiciarisation de ces populations.

«Il faut comprendre que si on mettait, dans les règlements, le fait qu’un itinérant ne peut pas recevoir de contravention, n’importe qui pourrait dire: moi je suis un itinérant.» – François Legault, premier ministre du Québec

«Une des forces de notre couvre-feu, c’est que les policiers sont capables, après 8h [du soir], d’intervenir», a soutenu l’élu, avant d’assurer qu’il accordait sa pleine confiance au «bon jugement des policiers».

Depuis l’entrée en vigueur du couvre-feu, plusieurs organismes ont dénoncé la remise de constats d’infractions à des personnes vulnérables.

«Les policiers ne font pas exprès» d’en remettre, maintient le premier ministre.

«Déconnecté»

Les propos du premier ministre n’ont pas tardé à générer des réactions, mardi. La porte-parole en matière de solidarité sociale du Parti libéral, Paule Robitaille, a dénoncé une réponse «déconnectée» de Québec.

«Ce n’est pas sérieux», a souligné l’élue de Bourassa-Sauvé. «D’abord, ne s’improvise pas sans-abri qui veut. Et ce couvre-feu, c’est mettre beaucoup, beaucoup de poids sur l’épaule des policiers.»

Le député de Québec solidaire Alexandre Leduc a aussi sursauté en lisant les dires de François Legault. Ils démontrent, selon lui, l’«aveuglement idéologique» du gouvernement.

«Si le gouvernement fait confiance au bon jugement des policiers pour distribuer des amendes, pourquoi ce même bon jugement ne serait plus efficace pour démasquer une personne qui se ferait passer pour une personne itinérante?», a-t-il écrit à Métro.

Pour le directeur de la Clinique juridique itinérante, Donald Tremblay, «ça ne prend pas la tête à Papineau» pour reconnaître un sans-abri. «Vous allez le savoir très vite. Puis, les policiers les connaissent», soutient-il.

Paule Robitaille en appelle «à l’humanité du premier ministre» et lui demande de revenir sur sa décision. Sa collègue de l’opposition péquiste Véronique Hivon réitère la demande.

«Le premier ministre dit qu’il n’est pas dogmatique, qu’il est capable d’admettre ses erreurs. Je pense que c’est vraiment le temps de le prouver.» – Véronique Hivon, députée de Joliette

Raphaël André

François Legault a par ailleurs réagi mardi à la mort tragique d’un homme en situation d’itinérance à Montréal. Raphaël André a perdu la vie dans une toilette chimique du centre-ville, à quelques pas d’une ressource en itinérance forcée de fermer ses portes à 21h30.

«Il va y avoir une enquête du coroner. […] Ce qu’on comprend, c’est que le refuge qu’il y avait près de l’endroit où il est décédé était fermé à cause d’une éclosion. Donc, peut-être une situation exceptionnelle», a indiqué M. Legault.

Selon les partis d’opposition à l’Assemblée nationale, ce décès n’aurait jamais eu lieu si les sans-abri avaient fait l’objet d’une exception. Mardi, la mairesse Valérie Plante a dénoncé une situation «intenable» pour les populations sans domicile fixe.

«Ce que je veux, c’est que les gens se sentent en sécurité à Montréal. Je ne veux pas exacerber cette vulnérabilité qui est déjà présente», avait-elle signifié.

Véronique Hivon s’insurge de la réaction tardive de Québec. «On dirait qu’ils n’ont pas saisi la mesure du drame», martèle-t-elle.

S’il se refuse à accorder une exception, François Legault convient que son gouvernement doit ajouter des refuges pour leur offrir un toit pendant le couvre-feu.

«C’est possible [qu’il manque d’espace], dépendamment des quartiers, a-t-il dit. Au fur et à mesure qu’on va voir qu’il manque de place, on va en ajouter.»

– Avec Zacharie Goudreault/Métro

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