Des professeurs s’opposent aux sondages de la Commission scientifique et technique indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique dans le milieu universitaire du Québec. Ils craignent que celui-ci soit motivé par des considérations politiques.
Le premier sondage, dont les résultats ont été diffusés hier, révèle qu’une majorité des professeurs d’université s’étaient censurés dans les cinq dernières années en évitant d’utiliser certains mots en classe.
En effet, c’est ce qu’ont dit plus du tiers des 1079 répondants dans le questionnaire soumis à l’ensemble des membres du corps professoral cet été.
Un deuxième sondage traitant du même sujet a aussi été réalisé auprès de 992 membres de la communauté étudiante universitaire. Celui-ci révèle notamment que 63% des étudiants considèrent que les membres du corps professoral devraient pouvoir utiliser tous les mots qu’ils jugent utiles à des fins universitaires.
En mêlée de presse, la ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann, avait qualifié les données dévoilées de «très inquiétantes».
Un sondage «motivé par des considérations politiques»
Or, à ce jour, plus d’une centaine de professeurs ont voulu exprimer leur objection aux sondages en signant une déclaration électronique.
Selon les signataires, le coup de sonde est «motivé par des considérations politiques» puisqu’il apparaît dans un contexte de débats très médiatisés sur l’utilisation du «mot en N» par des membres de la majorité blanche dans des classes universitaires.
Le gouvernement du Québec est même intervenu face à ce qu’il considère comme une «menace» contre la liberté d’expression sur les campus en créant une commission sur la liberté académique.
C’est d’ailleurs cette commission qui a rédigé le sondage communiqué aux enseignants de toutes les universités du Québec.
«Toute donnée obtenue à partir de ce sondage serait problématique et biaisée, et susceptible d’être instrumentalisée d’une manière politique qui serait préjudiciable aux groupes marginalisés», déclarent les signataires.
Cinq problèmes soulevés
L’opposition des professeurs aux questionnaires distribués repose sur cinq facteurs, écrivent-ils.
Dans un premier temps, les signataires indiquent que le sondage est contraire à l’éthique notamment puisqu’il ne comporte aucun objectif clairement énoncé.
De plus, les opposants estiment que le sondage ne donne pas suite aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation à traiter les peuples autochtones avec respect.
Ils déplorent également le fait que le sondage ne fait aucune référence ni aux conventions collectives des universités ni aux lois québécoises et canadiennes régissant la liberté universitaire.
«Comme le fait remarquer la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université (FQPPU), la définition utilisée de la « liberté académique » ne comprend pas le droit de critiquer l’université ou de s’exprimer sans censure dans une arène publique», ajoute-t-on.
Finalement, les professeurs pensent que certaines questions du sondage sont «extrêmement problématiques».
Ils font notamment référence à la simplicité et à la dualité des options offertes dans certaines questions. «Le sondage n’offre aucune possibilité d’aborder ces nuances ou ces contextes», indique-t-on.