Cela était attendu. Les transferts en santé par le gouvernement fédéral sont au cœur des discussions entre les 13 premiers ministres des provinces et territoires réunis à Victoria (Colombie-Britannique) à l’occasion du Conseil de la fédération.
«Nous manquons d’argent à travers le pays depuis très, très longtemps parce que nous ne pouvons pas compter sur un partenaire stable», a affirmé ce lundi le premier ministre de la Colombie-Britannique et président du Conseil de la fédération, John Horgan, lors d’un point de presse.
Durant ces 11 et 12 juillet, les chefs de gouvernement feront front commun autour de cette «priorité unanime».
«On répète la même demande depuis maintenant trois ans. On veut que le financement [des systèmes de santé provinciaux] par le gouvernement fédéral passe de 22% à 35%», a lancé à son tour François Legault.
Selon le premier ministre du Québec, cette augmentation de 28 G$ par année est «nécessaire» et «raisonnable quand on regarde les projections des prochaines années».
Ce dernier a rappelé les transferts de montants «importants» du gouvernement Trudeau depuis le début de la pandémie, tout en soulignant qu’il s’agissait de montants «non récurrents». M. Legault estime en outre que le recrutement de personnel de soins «ne peut pas se faire avec l’argent non récurrent».
Le premier ministre de la Colombie-Britannique, John Horgan, préside le Conseil durant ces deux jours. «Nous avons besoin d’une stratégie de ressources humaines à travers tout le pays», a-t-il notamment réclamé au gouvernement fédéral.
«Il nous faut un plan national pour recruter, retenir et former la prochaine génération de travailleurs de la santé, qu’ils soient infirmiers, chirurgiens, médecins ou travailleurs sociaux», a-t-il demandé.
Une augmentation «sans conditions»
François Legault s’inquiète de l’évolution des dépenses en santé «en raison du vieillissement [de la population] et de l’impact des nouvelles technologies». Elles augmenteraient de 5 à 6% par an au Canada, a-t-il indiqué.
De plus, le premier ministre du Québec a rappelé que les dépenses en santé s’élèvent à près de 200 G$ par an pour l’ensemble des provinces, à qui Ottawa ne donnerait qu’«une quarantaine de milliards» annuels.
Le gouvernement fédéral a pourtant balayé ces arguments. Il considère en effet que sa contribution est en réalité supérieure à 35%. Les chiffres avancés par les premiers ministres provinciaux ne prendraient pas en compte la valeur de points d’impôt cédés aux provinces il y a une quarantaine d’années.
«Malgré ce transfert fiscal», François Legault insiste: les transferts de santé vers les provinces seraient proportionnellement injustes par rapport à la part d’impôt fédéral payée par les Québécois. Il évalue cette dernière à 40%.
Cette augmentation du financement fédéral des systèmes de santé provinciaux réclamée par le Conseil de la fédération doit être «sans condition, parce que les priorités sont différentes d’une province à l’autre», a indiqué le premier ministre.
En entrevue avec Métro, le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a avancé que cette bataille était perdue d’avance.
«On se doit de regarder les choses en face: les Québécois n’obtiendront jamais le respect dans le Canada, et le fédéralisme caquiste ne permet aucun gain. La seule solution viable est de gérer nos budgets et nos décisions par nous-mêmes; ça s’appelle l’indépendance», a-t-il répliqué.
Immigration et inflation au menu
L’augmentation du coût de la vie pour de millions de Canadiens est également au cœur des discussions.
Ce sont les conséquences d’un «phénomène international», analyse John Horgan. À la recherche de «solutions sur le long terme», le Conseil qu’il préside tentera de répondre à la question: «Comment pouvons-nous collaborer avec le gouvernement fédéral sur ces défis», a indiqué le premier ministre de la Colombie-Britannique.
L’immigration sera également au menu des discussions entre les premiers ministres, alors que le Canada fait face à une pénurie de main-d’oeuvre. Un sujet sur lequel la position du gouvernement caquiste risque de susciter des débats avec les autres provinces.
«Il faut comprendre que la situation de l’immigration est différente au Québec que dans les autres provinces», a commenté François Legault. Il ajoute que l’entente autour des pouvoirs sur l’immigration entre Ottawa et Québec était due au fait qu’«on est une société distincte, on doit protéger le français».
Le premier ministre a rappelé vouloir obtenir du fédéral les pleins pouvoirs en immigration. Il estime par ailleurs que cette discussion doit être réglée de manière «bilatérale» entre la province et le gouvernement fédéral.
À ce sujet, John Horgan a dit que si les résultats espérés étaient similaires, le Québec et les autres provinces «n’avaient pas la même approche».