Culture

La bataille entourant le prix du livre aura bien lieu

La réglementation possible du prix des livres crée des remous. Une quarantaine de mémoires seront présentés à l’Assemblée nationale lors de la consultation sur la réglementation du prix de vente au public des livres neufs imprimés et numériques, qui s’amorce la semaine prochaine et qui s’annonce animée.

Actuellement, un best-seller peut coûter jusqu’à 50% moins cher, selon le magasin dans lequel il est distribué. Pour maintenir la diversité dans le monde du livre, le gouvernement songe à en réglementer la vente. La solution proposée: interdire de vendre tout nouveau livre à des rabais supérieurs à 10% du prix suggéré par l’éditeur, et ce, pendant neuf mois suivant sa mise en marché.

Mais les avis sur l’utilité de cette mesure sont partagés. L’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ), qui représente 1400 membres, soutient cette idée, qui serait à la fois bonne pour «la diversité de l’offre littéraire», tout en «équilibrant le marché du livre» et en assurant «la disponibilité des oeuvres des écrivains québécois». Une position partagée par l’Association des distributeurs exclusifs de livres en langue française et une demi-douzaine d’organismes qui ont lancé en novembre l’initiative Nos livres à juste prix.

Si l’UNEQ se défend de partir en guerre contre les grandes surfaces, l’organisme note que leurs politiques de bas prix et le manque de diversité de l’offre déstabilisent le marché. «À titre d’exemple, un détaillant de grande surface tiendra tout au plus 300 titres à la fois (québécois et étrangers), soit 1% des quelque 30 000 nouveautés que l’on peut trouver dans les librairies au cours d’une année. Hors d’une librairie, quelle place y a-t-il donc pour la poésie, l’essai de réflexion, le roman d’exploration?», note l’UNEQ dans son mémoire.

Les opposants à la réglementation logent à plusieurs enseignes. L’entreprise Renaud Bray, qui présentera un mémoire, ne croit pas qu’une réglementation soit justifiée. «Au Québec, il n’y a pas de guerre de prix, contrairement à d’autres pays», a déclaré Blaise Renaud, président de l’entreprise, au Toronto Star. Ce dernier croit plutôt que ceux qui poussent pour une telle réglementation ont surtout pour motivation de sauvegarder leurs marges face aux pressions des grandes surfaces telles que Costco ou Walmart.

Les chiffres gouvernementaux confirment effectivement le déclin des librairies indépendantes dont la part de marché est passée de 35% en 2006 à 28% en 2010. Cela n’a toutefois pas profité aux grandes surfaces, mais plutôt aux chaînes de librairie telles Archambault ou Renaud-Bray, qui ont totalisé 53% du marché en 2010 (contre 45% en 2006).

Selon une étude de l’Institut économique de Montréal, «si les rabais étaient limités à 10% du prix suggéré, le nombre total de livres vendus au Québec diminuerait de 14,2%», et toucherait surtout les acheteurs occasionnels. Une donnée que conteste l’UNEQ qui note que le rapport Gaymard revendique une hausse de 50% des volumes vendus entre 1986 et 2007, malgré la mise en place d’une politique du livre interdisant les rabais de plus de 5%.

La plupart des intervenants s’entendent toutefois globalement pour dire que ce type de réglementation sera inefficace s’il ne s’adresse pas aussi aux nouvelles plateformes de vente offerte par Internet.

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