«JF va avoir pas mal d’Aéroplan!» avait énigmatiquement lancé Louis Morissette au sujet du réalisateur Jean-François Asselin, qui co-scénarise Plan B avec Jacques Drolet. Des Aéroplan, on comprend maintenant, car il sera consultant sur les diverses adaptations internationales de la série en six épisodes.
Une série récompensée par le Prix de la meilleure fiction francophone étrangère à La Rochelle. Une série dans laquelle un homme retourne en arrière pour sauver son couple. Puis pour changer encore une chose. Une autre. Et encore une.
Une série qui a donné à Louis Morissette un rôle «ben ben intense à jouer». Un rôle pour lequel l’acteur s’est préparé et donné comme jamais auparavant. Après tout, il était dans 95% des scènes. «J’étais fortement habité par ce projet. Ma blonde ne me reconnaissait plus. J’étais beaucoup dans ma tête. J’y pensais tout le temps, tout le temps, tout le temps, tout le temps.»
Il faut dire qu’il y a pensé longtemps auparavant. Car même s’il cartonne à l’étranger, c’est le projet qui a pris le plus de temps à développer au Québec pour le producteur de KOTV, boîte dont il est le président.
Mais tout vient à point, etc. Et Plan B a finalement été diffusé à Séries+ au printemps dernier. Le succès a été tel qu’une saison 2, qui sera présentée à ICI Radio-Canada Télé, est en route.
Vous l’avez souvent raconté: dans les huit dernières années, tout le monde à Montréal a eu le scénario de Plan B, et tout le monde a refusé de le faire. Ça vous fait un petit velours de voir le succès de la série aujourd’hui?
C’est sûr que ça me fait sourire. En même temps, je suis conscient que ce n’est pas une série simple, sur papier. Je ne considère donc pas que c’était tous des abrutis pour avoir refusé. (Rires) Mais c’est sûr que, quand je disais: «Croyez-moi!», ils n’embarquaient pas. Cela dit, combien de producteurs vendent leur projet en disant «Croyez-moi, ça va fonctionner», et ça ne fonctionne pas?
Vous avez donc souvent répété, à l’instar de votre personnage: «Fais-moi confiance!»?
Voilà. Je l’ai dit souvent : «Faites-moi confiance, ça va marcher!» Finalement, j’ai eu raison. Mais il y a eu d’autres moments où je me suis trompé.
On a fréquemment souligné que c’est un des meilleurs rôles que vous ayez jamais joués. Diriez-vous que c’est parce que c’est celui qui est le plus éloigné de vous?
En fait, c’est le plus riche. Avec beaucoup de nuances, de niveaux de jeu. Ce qui donne l’occasion de briller. C’est difficile de faire un home-run si tu ne reçois pas la balle en plein centre du marbre. Je peux dire que j’ai bien joué, mais ce sont les auteurs qui m’ont permis de performer. Tandis qu’il y a eu d’autres projets où je me suis trouvé très bon. Mais je n’avais absolument rien pour attirer l’attention.
Par exemple?
Oh non, je ne rentrerai pas dans des exemples! (Rires) C’est comme certains des acteurs qui ont joué avec moi dans Plan B, qui sont très, très, très, très bons, mais qui ont trois scènes. Ce n’est pas avec ça que tu gagnes un Gémeaux!
La grande question posée par la série (à savoir «Et si vous pouviez revenir dans le passé pour effacer vos erreurs, le feriez-vous?») vous habite-t-elle encore?
C’est sûr que la question reste, mais ce qui me reste surtout, c’est le constat que c’est une très, très mauvaise idée d’essayer de revivre sa vie. Si je savais ce que l’avenir réserve à mes enfants, par exemple, j’essaierais coûte que coûte de leur éviter des ennuis. Et je deviendrais odieux, contrôlant. Comme mon personnage. Il faut assumer ses bons coups comme ses mauvais. Ce sont les échecs qui forment une personne.
Pour reprendre une réplique que vous lance Roger La Rue: «Faut juste dealer avec sa marde»?
C’est pas mal ça, je pense.
Pensez-vous aussi que c’est en raison de cette question que la série suscite tant d’intérêt à l’extérieur du Québec?
C’est surtout l’histoire du couple qui résonne à l’international. Mais il y a quand même une part de chance dans tout ça. Il y a huit ans, quand on a commencé à développer Plan B, la mode était aux séries de trois, quatre, cinq saisons. On croyait que ça permettait de fidéliser le public sur plusieurs années. Là, le hasard fait que la tendance mondiale est aux séries courtes. Parce que c’est un investissement moins grand.Et si la performance n’est pas au rendez-vous, on mange nos bas moins longtemps.
Sentez-vous que les spectateurs sont moins prêts à s’investir, eux aussi, dans de longues séries?
Aussi. L’offre est tellement grande! Moi, si quelqu’un me dit : «Écoute telle série, je suis rendu à la saison 3, c’est tellement bon!» Je réponds: «Donc, avant de me rendre où tu es rendu, faut que je me tape 30 épisodes? Je ne pense que ça va arriver avec trois enfants, et toute ma job!» Mais si on me dit: «C’est juste six épisodes d’une heure!» Ah! Ça je peux! D’ailleurs, la saison 2 de Plan B, ce sera aussi 6 épisodes. Et si on fait un 3, également.
Ce que vous pouvez dire, justement, de ce Plan B 2?
Ce que je peux dire, c’est que ce sera un environnement et un contexte complètement différents. Je ne jouerai pas dedans, les personnages de la saison 1 ne reviendront pas. On va baigner dans un univers plus féminin.
Le ton sera-t-il similaire?
Le ton, le mood, la musique, oui. Mais pas le questionnement. Comme ce sera une femme qui sera le personnage principal, la série ira dans une autre zone complètement. C’était un questionnement assez masculin, quand même, dans la 1.
Vous êtes rendu à quelle étape?
On est en écriture. On a le tiers de fait. On a la courbe. Maintenant, il faut l’exécuter.
Vous sentez une grosse pression?
Les auteurs, oui! Surtout pour la fin. Parce que celle de la saison 1 était tellement percutante! Ça les angoisse beaucoup. On n’a pas le choix de faire un uppercut.
Parce que vous avez jonglé avec presque une dizaine de finales différentes pour la saison 1, non?
En fait, c’était la même finale, mais dans mon souvenir, j’ai tourné huit versions dans huit tons différents. On ne s’entendait pas, Jean-François et moi, sur la signification de la fin. Et même pour la version montée, nous n’avons pas la même lecture…