Dans mes suggestions de la semaine, Radio-Canada me lançait la missive suivante pour accrocher mon intérêt: Bébéatrice, la première sitcom animée pour adulte d’ICI TOU.TV.
Voilà, ma curiosité était piquée. On parle ici de l’adaptation animée en courtes capsules d’environ cinq minutes de la bande dessinée d’Éric Godin, inspirée des propos de la jeune fille de Guy A. Lepage, Béatrice. Vous voyez le topo, des mots d’enfants comme on partage sur les médias sociaux. De petites anecdotes avec lesquelles on compare les apprentissages de nos enfants et leurs maladresses linguistiques.
C’est mignon, ça fait sourire, c’est rassembleur. Un beau petit projet de livre, assurément un projet très stimulant pour un père et sa fille afin de laisser une trace de son enfance. Mais la série animée, issue de ce projet, telle que présentée sur ICI TOU.TV – c’est là que le train déraille, frappe un mur et s’enflamme dans un foudroyant brasier.
J’ai visionné trois capsules et, en quinze minutes de contenu, je cherche encore la première blague, la première anecdote, voire même la première situation un tant soit peu sympathique dans lequel l’auditoire pourrait s’investir ou se projeter.
Bébéatrice, format animé, est un collage malhabile de couleurs vives et de mots creux. L’ensemble de la distribution, pourtant fort talentueuse, emprunte un niveau de jeu qui donne des airs de Molière à la défunte série jeunesse Caillou et, croyez-moi, je trouve la comparaison peu envieuse pour l’un des succès de notre télévision.
On me présente Bébéatrice comme une production pour adulte, mais je cherche quel adulte normalement constitué appréciera le fait de se faire parler comme dans une mauvaise capsule éducative des années 80 qui tentait de calquer les succès de Passe-Partout afin de le distribuer dans les écoles primaires de la province. Si c’était une série jeunesse, comme Caillou, probablement que les exigences seraient moindres – mais ça n’ajouterait pas du relief aux textes et aux situations. On sent d’ailleurs une très désagréable volonté d’employer un français «international», probablement avec l’espoir naïf d’exporter la production dans la grande francophonie. Sauf que si même ma fille de huit ans n’esquisse pas un sourire devant l’utilisation du mot «caca» par la petite Bébéatrice, elle qui pourtant éclate de rire dès qu’elle entend le mot, je me demande bien quel public se taperait sur les cuisses devant cette proposition.
Au premier coup d’oeil, je m’attendais à un truc sympathique et inventif avec un peu de dégaine dans la gâchette, comme Guy A. Lepage nous a habitué à voir durant sa longue et fructueuse carrière. Sauf qu’ici, il tire à blanc.
Au moment d’écrire ces lignes, des répliques de la série résonnent dans ma tête et, je dois l’avouer, j’ai une certaine agressivité qui me traverse les doigts en pianotant sur mon clavier. Ce n’est pas une réaction que devrait provoquer une sitcom animée, surtout pas avec un sujet aussi léger et sympathique que des virelangues infantiles.
Vous verrez le tout à la télé durant le temps des fêtes, malheureusement, mais au moins c’est court et vite oublié, comme une extraction de dents au primaire.