Culture

Pour les livres de romance, c’est la Saint-Valentin tous les jours

Fini le temps du dédaigneux qualificatif de « romans à l’eau de rose »: les livres de romance ont su évoluer avec la société et n’en finissent pas de séduire des millions de lectrices.

« Il y a 30 ans, dans nos romans, on commençait par se faire la cour puis on couchait ensemble. Maintenant, c’est l’inverse », dit en riant Anne Coquet, directrice éditoriale chez Harlequin, l’éditeur phare de la romance.

La saga « Fifty shades of Grey » (125 millions d’exemplaires des trois premiers tomes vendus dans le monde, dont quatre millions dans le monde francophone) a bouleversé le genre. Maintenant, on parle de sexe crûment et les lectrices adorent. Harlequin, lancé en France en 1978, constitue un bon exemple de cette évolution.

Depuis mars 2015, l’éditeur d’origine canadienne propose à ses lectrices une collection de poche baptisée « Sexy » qui décline des histoires de relations sado-masochistes sur le modèle de « Fifty shades of Grey ». A partir de mars, on trouvera également du « new adult » (des histoires avec beaucoup de scènes de sexe explicites, sur le modèle des best-sellers « After » ou « Before » de l’Américaine Anna Todd, dans la collection grand format « &H ».

Mais même « Azur », la collection de poche emblématique d’Harlequin avec ses couvertures reconnaissables entre mille (la photo en couleurs d’un couple sur le point de s’embrasser), ne s’embarrasse pas de langue de bois quand il s’agit de parler de sexe. Les couples font l’amour et presque aucun détail n’est caché au lecteur.

Le public, quasi exclusivement féminin, suit. Selon le cabinet d’études GfK, cité par Livres Hebdo, le marché de la romance, c’est environ neuf millions d’exemplaires vendus en France en 2015 (tous éditeurs confondus) pour un chiffre d’affaires de 87,7 millions d’euros, en progression de 44,1% par rapport à l’année précédente.

-‘C’est la femme qui gagne’-

Vendue essentiellement en grandes surfaces, la collection « Azur » propose 10 nouveaux titres par mois et, selon Antoine Duquesne, directeur marketing et numérique d’Harlequin, chaque titre s’écoule en moyenne à 10.000 exemplaires.

La sélection est sévère. Chaque titre ne reste qu’un mois sur les présentoirs avant d’être remplacé par un autre. « On ne lit pas un livre Harlequin pour un auteur », reconnaît Emmanuelle Bucco-Cancès, directrice générale de la maison d’édition.

Pourtant, certains noms émergent. Alors que les titres sont en général des traductions d’auteurs anglo-saxons, une Française, Emily Blaine, a réussi à percer. Ses livres se sont écoulés à 140.000 exemplaires.

Repérée grâce à un concours de nouvelles lancé par Harlequin, la Bretonne, âgée d’une trentaine d’années, a d’abord été publiée en numérique avant d’être éditée en format broché. A chaque passage dans un salon du livre, ses admiratrices se bousculent pour obtenir une signature, se félicite Karine Lanini, directrice éditoriale du pôle romance chez Harlequin.

L’éditeur s’enorgueillit également de posséder à son catalogue l’Américaine Nora Roberts, auteur de plus de 200 livres (alliant romance et thriller), vendus à plus de 400 millions d’exemplaires dans le monde.

Un des secrets du succès, outre l’arrivée du sexe dans la romance, est de bien ficeler les histoires. Le genre reste très formaté. Il y a des règles immuables à respecter, explique Karine Lanini. « Une histoire, c’est d’abord un couple improbable du genre Roméo et Juliette. Il est confronté à des obstacles mais, obligatoirement, il faut que ça finisse bien. A la fin, c’est la femme qui gagne », dit-elle. « Nos lectrices aiment retrouver ce genre d’intrigue », affirme-t-elle.

Il reste aussi quelques tabous. Curieusement, il n’y a ainsi pas de couples divorcés dans la collection « Azur ». Juste des couples que les aléas de la vie ont séparé (parfois même la femme a eu un enfant sans que son compagnon le sache) mais qui finissent par se retrouver.

Il y a eu quelques rares tentatives pour faire exister des couples gays ou lesbiens, mais uniquement dans les éditions numériques. « Ce n’est pas vraiment ce que les lectrices recherchent », explique-t-on chez Harlequin.

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