Culture

Star Trek: Au-delà des frontières

Edward Thompson - Metro World News

Le réalisateur américain d’origine taïwanaise Justin Lin, connu pour la franchise Fast and Furious, succède à JJ Abrams à la barre de Star Trek Beyond. Le cinéaste donne à Métro son point de vue sur la diversité à Hollywood.

Ayant réalisé quatre films de la série Fast and Furious, Justin Lin est un habitué des scènes d’action et des cascades à couper le souffle. Grâce à Star Trek Beyond (Star Trek au-delà), le cinéaste de 44 ans a pu repousser encore plus loin les lois de la gravité en voyageant dans l’espace.

Pourquoi avez-vous décidé de laisser la franchise Fast and Furious derrière vous?
Pour moi, tout repose sur la croissance et l’évolution. Je viens du cinéma indépendant, et j’aime bâtir une franchise et tisser une relation avec le public. Et après quatre volets, je sentais qu’il était temps pour du changement, pour de nouveaux défis. Je me suis fait appeler pour Star Trek, et ça me semblait tout à fait approprié pour moi en termes de croissance.

Les Trekkies vont vous surveiller pour être sûrs que vous êtes fidèle à l’histoire de la série. Avez-vous fait attention pour ne pas décevoir les attentes des fans?
Je pense que c’est une question de respect. Quand j’ai commencé avec Fast and Furious – alors que je ne suis pas un gars de voitures du tout –, j’ai voulu être certain d’être respectueux envers les gens qui adorent les voitures, et c’est la même approche que j’ai adoptée avec Star Trek. Je trouvais que c’était important de comprendre pourquoi il y a une telle passion pour la série.

Vous avez dit que, quand vous étiez petit, vous trouviez que le cou du USS Enterprise avait l’air vulnérable. Aviez-vous envie de lui couper la «gorge», en quelque sorte?
[Rires] Oui, j’avais huit ans. J’adorais le vaisseau, mais je n’avais pas réalisé qu’il n’était pas conçu pour le combat, mais pour l’exploration. Cette idée a donc germé quand j’étais petit, et c’était génial de la voir devenir réalité. C’est bizarre, ce long cou!

Vous commencez à rebâtir le USS Enterprise à la fin du film. Vouliez-vous épargner des larmes aux fans après sa destruction?
Je voulais déconstruire ce qu’est Star Trek, et je crois que nous l’avons fait de manière très littérale. En faisant de la recherche, je me suis rendu compte qu’il n’y avait pas de véritables plans officiels du vaisseau. J’ai donc voulu avoir la possibilité d’en construire un pour que les gens puissent voir comment il se monte, et avoir quelque chose d’officiel pour que l’Enterprise puisse continuer à vivre à part entière.

«J’ai repoussé sans arrêt les lois de la gravité avec les films de Fast and Furious, et je crois que la seule manière, pour moi d’aller encore plus loin, c’était avec un film d’espace comme Star Trek !» –Justin Lin

Vous avez parlé de diversité dans plusieurs entrevues. Croyez-vous que Hollywood prend le problème au sérieux ou pensez-vous encore, comme vous l’avez déjà dit, que ce n’est qu’une mode?
C’est une problématique complexe. En ce qui me concerne, c’est une question d’occasion. Quand j’ai commencé à être cinéaste, seuls des acteurs blancs décrochaient des rôles principaux. Et en tant que réalisateur, je me disais : «Pourquoi on ferait ça?» Pourquoi fermer la porte au nez de talents potentiels? Je me suis donc battu pour que les auditions soient ouvertes à tous. Parce que, même si on finit par ne pas retenir la candidature de quelqu’un, au moins on aura interagi, et on leur aura donné une chance. Donner la chance à tout le monde, c’est ça qui devrait être au cœur du débat.

Avez-vous été choqué qu’à notre époque, l’homosexualité de Hikaru Sulu cause une telle commotion?
Je ne sais pas si «choqué» est le mot. Je l’ai été un peu de constater qu’autant dans le monde de Star Trek que dans le nôtre, ce soit considéré comme une nouvelle. Ça ne devrait pas l’être. C’est la vie, et c’est de cette manière que je voulais le communiquer au public. Et les réactions m’ont montré où nous en sommes en tant que société. Je crois que la chose que j’aime le plus de Star Trek est la notion d’espoir qui teinte la série. En tant qu’humains, on peut être idiots, avoir des défauts. Nous avons nos différences, nos contextes de vie différents, mais quand on se rassemble et qu’on est inclusifs, on devient meilleurs et plus innovateurs – on fait du meilleur travail.

«Le mouvement LGBTQ ne peut pas être arrêté»

Zachary Quinto, interprète de Spock dans la franchise Star Trek, se réjouit de l’inclusion d’un personnage homosexuel dans Star Trek Beyond.

On n’était pas censés faire tout un plat de la révélation de l’orientation sexuelle de Mr. Sulu. Mais le fait que ce dernier, interprété par John Cho, soit en couple avec une personne du même sexe que lui dans Star Trek Beyond a fait la manchette depuis que George Takei, qui jouait le pilote de l’Enterprise dans la série originale et dans six films, a exprimé son désaccord face au fait que «son» personnage ait été sorti du placard. Zachary Quinto, comédien ouvertement homo­sexuel qui joue l’imperturbable Spock, veut calmer l’hystérie qui a marqué la période précédant la sortie du troisième film de la nouvelle version de la franchise.

Il y a une scène comique dans le film durant laquelle vous donnez à votre copine un collier, qui est en réalité un dispositif de pistage. Vous avez déjà considéré faire un cadeau similaire à votre amoureux?
Mon Dieu, non! Nous savons toujours où l’autre se trouve. [Rires].

Vous a-t-on encouragé à improviser et à ajouter un peu d’humour dans le film?
Comme Simon [Pegg] est l’un des co-scénaristes du film, l’humour venait naturellement. Simon mène toujours le bal avec son cœur et son humour, et on se fait tous rire les uns les autres; nous adorons rire ensemble. C’est la pierre d’assise de nos relations.

Simon Pegg a dit qu’un nouveau personnage homosexuel aurait pu être présenté, mais qu’il ne voulait pas que le seul point sur lequel on se concentre soit la sexualité de cet individu, au détriment de son personnage et du film lui-même. Est-ce que ça vous choque de voir l’attention démesurée accordée à l’orientation sexuelle de Sulu dans un monde supposément libéral, au XXIe siècle?
La réalité, c’est que chaque fois qu’un film comme celui-là est tourné, ça devient une moins grosse affaire, et que chaque fois qu’un individu s’affiche tel qu’il est, ça devient aussi une moins grosse affaire. Je suis honoré de faire partie de ce processus, autant personnellement que par mon association avec ce film. Nous avons été très heureux de l’avalanche de réponses positives, surtout de la part de jeunes gens inspirés et galvanisés par cette réalité qui fait maintenant partie de notre monde et qui a été traitée de très belle manière, avec goût. La communauté LGBTQ a longtemps soutenu qu’elle devrait être représentée dans l’univers de Star Trek, et nous pouvons maintenant dire que nous le sommes – ce qui est fantastique.

Êtes-vous préoccupé par le fait que l’instabilité politique et la montée de groupes extrémistes aux Etats-Unis et en Europe puissent avoir un impact négatif sur les progrès réalisés par la communauté LGBTQ?
La Cour suprême des États-Unis vient de légaliser le mariage homosexuel, donc, dans l’état actuel des choses, il n’y a pas moyen de revenir en arrière. Il y a d’autres pays – l’Australie, la Russie – qui n’ont pas encore atteint ce niveau de progrès. Et c’est leur responsabilité. Tout le monde doit arriver à ce point en suivant son propre rythme. C’est un mouvement qu’on ne peut arrêter. C’est un mouvement d’égalité et de droits humains qui ne peut être renversé. C’est une question de temps avant qu’il n’atteigne tous les coins du monde.

Star Trek Beyond
En salle dès vendredi

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